Covid-19 et « orage de cytokines » : quand le système immunitaire s’emballe

Source : Pour la science, Dominique Emilie, Marc Humbert, Pierre Galanaud

L’une des particularités du Covid-19, dû au coronavirus SARS-CoV-2, est dans une proportion notable de cas le déclenchement d’un « orage de cytokines » (on parle aussi de lymphohistiocytose hémophagocytaire secondaire), c’est-à-dire la libération massive de ces molécules impliquées dans l’activation et le contrôle de l’immunité. Il s’agit en quelque sorte d’une hyperinflammation qui peut être fatale. Cet article en détaille les mécanismes principaux. La biologie des cytokines explique également, du moins en partie, le fait que nous ne sommes pas tous égaux face aux infections : pour certains, le Covid-19 est bénin, pour d’autres, il prend des formes sévères.

Lors d’une infection, des molécules libérées par le système immunitaire détruisent l’intrus. Quand la réaction de défense s’emballe et que les cytokines sont trop abondantes, elles créent des lésions. De nouvelles substances les inhibent spécifiquement, soulageant ainsi des maladies chroniques invalidantes.
Le système immunitaire préserve l’intégrité des personnes face à leur environnement : son rôle est primordial dans les mécanismes de défense contre les agents infectieux ou parasitaires. Il prévient aussi certains désordres internes, notamment en détruisant les cellules tumorales. Ces combats permanents sont rigoureusement contrôlés, car ils ne doivent pas se retourner contre la personne elle-même. L’intensité des réactions immunitaires doit être ajustée – intense pour l’élimination de l’intrus, mais pas trop pour que la personne elle-même soit épargnée ; elle doit être spécifique – la réaction est dirigée exclusivement contre les intrus, mais pas contre les molécules propres à l’organisme, et adaptée, car la protection n’est pas assurée de la même façon selon l’agent pathogène.
La première phase de toute réaction immunitaire est celle de la reconnaissance et de la présentation au système immunitaire des antigènes des intrus, dont se chargent les cellules présentatrices d’antigènes. Dès qu’un antigène étranger est reconnu, ces cellules «avalent» les protéines étrangères, les découpent en fragments qu’elles exposent à leur surface. Puis la réaction de défense s’amplifie, les lymphocytes T auxiliaires attirant les différents acteurs de la défense à l’endroit où l’agent pathogène a été localisé. Après la phase de reconnaissance et celle d’amplification, la troisième phase est celle de l’élimination de l’intrus. Plusieurs acteurs interviennent, notamment les lymphocytes Bproduisant des anticorps qui se lient aux antigènes étrangers et empêchent, par exemple, les bactéries de se fixer sur de nouvelles cellules et de les infecter ; des lymphocytes Tcytotoxiques qui libèrent des enzymes destructrices ; des macrophages qui éliminent les cellules infectées. Les réactions des différents partenaires sont rigoureusement coordonnées. Les cellules échangent des signaux de régulation, soit par contacts intercellulaires directs (des molécules exprimées à la surface d’une cellule interagissent directement avec des récepteurs présents à la surface d’une autre), soit par des médiateurs solubles, libérés par les cellules dans le milieu environnant : ce sont les cytokines.Lire la suite

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