Source : Les Crises, Éric Juillot, 28-12-2019
Un rapport sénatorial a récemment été consacré à la question de la balance commerciale agroalimentaire de la France [1]. La conclusion à laquelle il aboutit aurait paru tout à fait invraisemblable il y a quelques années encore : si la trajectoire actuelle se confirme, cette balance deviendra déficitaire à court terme, peut-être dès 2023. Tout à fait réaliste compte tenu de l’évolution récente, cette prévision n’en constitue pas moins un retournement d’ampleur puisque, depuis le début des années 1970, le solde commercial du secteur agricole était structurellement excédentaire [2].
Il faut prendre cette annonce pour ce qu’elle est, une très mauvaise nouvelle, témoignant du déclin — relatif, mais continu — de la base productive de notre pays. Après l’industrie, l’agriculture est à son tour confrontée à des problèmes tels que l’impossibilité d’assurer à court terme l’autosuffisance alimentaire de la France. Le potentiel agricole de notre pays est pourtant sans équivalent en Europe : l’étendue de sa surface agricole, la qualité de ses sols et sa diversité climatique en font un pays depuis toujours susceptible d’une production agricole massive. Le basculement annoncé dans le déficit structurel relève donc d’une anomalie, surtout lorsqu’on a en tête les performances quantitatives de l’agriculture productiviste depuis un demi-siècle. Comment en est-on arrivé là ?
Vers un déficit structurel
La France reste le premier producteur agricole européen, avec une production en valeur de l’ordre de 72,6 milliards d’euros en 2017, loin devant l’Allemagne (53,4 milliards) et l’Italie (52,9 milliards).Lire la suite