Source : Proche & Moyen-Orient, Guillaume Berlat
« L’avenir n’est pas ce qui va arriver mais ce que nous allons faire » (Henri Bergson). Tel n’est pas le mantra de nos dirigeants obnubilés par le très court terme, le présentisme, le médiatique, la tactique, la politique politicienne, les coups foireux qui s’apparentent à de vulgaires pétards diplomatiques. Alors que la planète plonge dans une crise sociale, économique sans précédent, consécutive à une pandémie1 et que la défiance à l’égard des dirigeants s’installe dans l’opinion publique, il est indispensable de prendre le temps de la réflexion. Prendre le temps de comprendre où nous nous trouvons aujourd’hui (pourquoi ?) pour mieux imaginer où nous irons demain et après-demain (comment ?).
Dans cette optique, les philosophes peuvent être d’une très grande utilité dans la démarche des internationalistes, des diplomates, des décideurs. Michel Foucault a magnifiquement expliqué, combien la tâche des philosophes, aujourd’hui, consiste à dresser un « diagnostic du présent ». Il a montré comment le rôle de la philosophie n’est pas de colorier les calendriers de l’avenir (Roger-Pol Droit). Le terme « diagnostic » est important par ce qu’il emporte comme conséquences. Nous ne le répèterons jamais assez. À l’instar de ce que nous dit Hubert Védrine, le travail du diplomate est comparable à celui du médecin, ni plus, ni moins. Sa priorité consiste à examiner le patient monde, région « X », État « Y », à l’ausculter avec attention pour dégager le tableau clinique qui s’impose.
Ce n’est que dans un second temps, qu’il peut, raisonnablement, envisager le diagnostic idoine2 permettant d’envisager, le cas échéant, le traitement des maux. Mutatis mutandi, ce n’est qu’au prix d’un diagnostic sans tabou du tableau clinique actuel – très peu encourageant au demeurant – que nous pourrons nous livrer à un exercice sans complexe d’anticipation du futur sans lequel nous nous promettons des jours difficiles3.
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