Deux ou trois choses dont je suis presque certain à propos des « gilets jaunes »

Source : Le Parisien, Laurent Mucchielli, 04-12-2018
À la différence de la plupart des commentateurs que l’on peut entendre tous les jours donner leurs avis dans les médias, il est difficile pour un chercheur de s’exprimer sur un sujet sur lequel il n’a pas enquêté. L’enquête en sciences sociales n’a en effet pas grand-chose à voir avec les reportages télévisés que l’on peut voir ou revoir en quelques clics sur Internet, ni avec les verbatim rapportés ici et là par les journalistes et dont on ne peut pas présumer de la représentativité à l’échelle nationale, ni même à l’échelle locale d’ailleurs.
Plutôt que de se précipiter pour mettre des mots d’allure savante sur des choses mal connues, ou pour fournir des interprétations toutes faites informant davantage sur les représentations de leurs auteurs que sur la réalité qu’ils prétendent éclairer, on souhaite ici partager simplement quelques enseignements tirés d’une expérience de sociologue ayant, dans un passé récent, travaillé sur diverses formes de violences sociales et politiques (notamment les émeutes), ainsi que sur les stratégies sécuritaires (notamment le maintien de l’ordre) déployées à leur encontre par les pouvoirs publics.

Mettre à distance la fascination-sidération-répulsion pour la violence

« La violence » n’est pas une catégorie d’analyse, ni un ensemble homogène de comportements. C’est une catégorie morale. La violence, c’est ce qui n’est pas bien. Dès lors, on comprend que le spectacle de la violence produise des effets de sidération-fascination-répulsion qui empêchent de penser. De fait, les analyses que l’on développe généralement à partir de là sont, en réalité, triviales, donc sans intérêt.Lire la suite

Source