« Colonisation à l'envers » : Olivier Faure, patron du PS, a-t-il vraiment tenu sur France Inter des propos dignes du FN ?

Jeudi 25 octobre, le Premier secrétaire du Parti Socialiste Olivier Faure était l'invité du grand entretien de France Inter. L'un de ses propos a fait sensation et a été exploité par le site Fdesouche. Selon ce site identitaire, Olivier Faure aurait déclaré : « Il existe des endroits où le fait de ne pas être issu de l'immigration donne l'impression d'être dans une sorte de colonisation à l'envers. » Rapidement, des militants socialistes s'en sont offusqués sur les réseaux sociaux, estimant que leur leader n'avait fait que relayer la parole d'une concitoyenne, sans la faire sienne.

Olivier Faure , Premier secrétaire du Parti socialiste : « Il y a une crise identitaire. Il existe des endroits où le fait de ne pas être issu de l'immigration donne l'impression d'être dans une sorte de colonisation à envers. » pic.twitter.com/4OIX6aIQ8y — Pierre Sautarel (@FrDesouche) 25 octobre 2018

Le site de fact-checking de Libération a essayé de démêler le vrai du faux : "Qu'a vraiment dit Olivier Faure sur l'immigration ?" Voici l'intégralité de cette séquence, à partir de 22:30. Un auditeur interpelle d'abord Olivier Faure, qui est ensuite relancé par les journalistes.

Auditeur : « C'est simple, je suis d'accord à 95% du programme. Mais les 5% qui sont rédhibitoires, c'est la politique d'immigration. J'ai vécu à Villiers-le-Bel [Val d'Oise, ndlr] pendant 20 ans, et j'ai vécu la discrimination anti-blanc. Vraiment je l'ai vécue. Et il y a un déni de réalité par rapport à ça. On ne voulait pas me donner d'appartement à certains endroits, pour en donner à d'autres, pour faire un mélange ethnique, et je trouvais ça totalement injuste. »

Olivier Faure : « C'est une question [sic] qui est l'une des questions les plus difficiles aujourd'hui. »

Journaliste : « Deni de réalité, sur la question migratoire, vous acceptez le reproche ? »

Olivier Faure : « Je ne sais pas s'il faut parler de déni de réalité, je pense que c'est une question que nous n'avons pas assez réussi à aborder de manière frontale. Nous avons souvent évité la question, pour ne pas avoir à y répondre. Mais il n'y a pas de déni de réalité. Tous les élus qui vivent aujourd'hui connaissent les difficultés, et y compris la crise identitaire qui est profonde chez un certain nombre de nos concitoyens. »

Journaliste : « Vous entendez l'auditeur. Il parle de racisme anti-blanc. Est-ce qu'il y a parfois du racisme anti-blanc dans certains quartiers ? »

Olivier Faure : « Il existe aujourd'hui des endroits où le fait de ne pas être issu de l'immigration peut poser problème à des gens dans ces quartiers, et qui peuvent se sentir exclus. Il y a des endroits où il y a des regroupements qui se sont faits génération après génération et qui donnent le sentiment qu'on est dans une sorte de colonisation à l'envers, ce que m'a dit un jour une de mes concitoyennes. Qui me disait après avoir voté longtemps pour la gauche, qu'elle ne voulait plus voter pour nous parce qu'elle avait le sentiment d'être colonisée. Ce message-là, je l'entends. En même temps, la difficulté, elle ne tient pas aux étrangers ou à ceux qui sont français depuis plusieurs années en réalité. Elle tient à la politique du logement, elle tient à la façon dont a été conçu l'ensemble des politiques, et on a créé des ghettos, de véritables ghettos, des quartiers qui sont devenus des endroits où la mixité ethnique n'existe plus, donc c'est cette question-là qu'il faut reprendre. [...] Quand je vois dans ma propre circo, quand on doit intégrer des gens qui viennent de Syrie par exemple, si vous dites qu'on en accueille 500 dans un gymnase. Les gens disent non, pas d'accord. En revanche, si on vous dit on va prendre la famille du boulanger parce qu'on n'a plus de boulanger dans le village. Alors là, les gens ils applaudissent. Et la question, c'est comment on organise les choses, comment on ne laisse pas le terrain s'organiser tout seul, parce que sinon ça donne ce que dit [l'auditeur] à Villiers-le-Bel, ça donne le sentiment de regroupement qui ne sont pas maîtrisés. »

Contacté par CheckNews, Olivier Faure a clarifié sa position par SMS :

« Polémique absurde. Je citais une habitante pour dire que je connais ce sentiment. Je ne le partage en rien. Il n'y a évidemment pas de colonisation ! »

Au Figaro, il avait déjà répondu :

« A chaque fois, on cherche à instrumentaliser les propos, c'est le jeu politique », explique au Figaro Olivier Faure, presque résigné par ces réactions. Sa déclaration n'implique « aucun revirement » dans le ton ou le programme du PS sur l'immigration, assure-t-il. « Je n'ai fait que répéter ce que j'entends parfois. La “colonisation”, ce n'est pas une expression de ma part, elle ne correspond ni à ma pensée, ni à ce que je suis. » Le premier secrétaire du PS veut montrer qu'il « entend cette exaspération qui monte », tout en voulant « combattre ces discours-là en proposant des solutions : non pas le rejet des étrangers, mais le rejet des ghettos urbains, à travers la mixité ». Il plaide en faveur d'un meilleur accueil des étrangers, et non d'une limitation de l'immigration.

Voir en ligne : https://www.agoravox.tv/IMG/jpg/Olivier_Faure.jpg

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