Juvin/Belhimer : Deux livres pour un été intelligent ! Par Richard Labévière

Source :Proche & Moyen-Orient, Richard Labévière, 23-07-2018
Toulon, 20 juillet 2018.
Contrairement à ce qu’affirmaient un peu vite quelques idéologues fatigués, l’histoire ne s’est pas perdue dans les gravats du mur de Berlin, ni dans les délices d’une mondialisation qui ne pouvait qu’être heureuse… Non, l’administration tranquille des choses et des hommes ne s’est pas substituée mécaniquement au bruit et à la fureur des passions et des intérêts. Les identités se réveillent, les frontières se réaffirment, les pauvres du Sud se jettent sur les routes de l’exil vers un Nord fantasmé, tandis que des nostalgies d’empire remontent de la nuit des temps à coups de menton et de Tweets…
Dans cette anomie générale, la gauche s’est convertie au libéralisme économique, tandis que la droite s’appropriait les droits de l’homme et les « valeurs » du nouveau héros moderne : le Bobo/bourgeois-bohème qui boursicote en écoutant France-Culture. Comme les partis de gauche n’ont plus rien à dire, comme ceux de droite ne savent plus qui ils sont et comme la nature politique continue à avoir horreur du vide, le Bobo s’est mis en marche. Vers quoi ? La réponse n’est pas simple et se perd dans une récurrente scolastique qui n’est plus de grande fraîcheur : réforme, modernisation, innovation et communication. Communication permanente ! L’important n’est plus de faire et savoir faire mais de faire savoir, partout, tout le temps et par tous les temps.
Là-dessus, la révolution numérique n’a pas arrangé les choses, le Bobo s’acharnant à liker ou disliker le monde, accumulant des millions d’amis tout en continuant à ignorer cordialement son voisin de palier. Bien au-delà de tout ce que pouvait imaginer George Orwell, de ce qu’il nous annonçait dans son 1984, le Bobo ne respire plus qu’avec son téléphone, ne quitte plus son GPS et ses merveilleuses Apply qui comptabilisent ses pas, ses battements de cœur, ses pets et ses envies les plus secrètes. La disruption a remplacé le désir : le progrès technologique ne libère plus mais impose ses procédures et ses normes. Le Bobo prend le train, va au cinéma comme au supermarché sans n’avoir plus aucun contact avec l’homme laborieux. Il s’enthousiasme d’emprunter métros et bus automatisés, dépourvus de toute espèce d’intervention humaine tout en s’inquiétant d’une montée exponentielle, structurelle et structurale du chômage.Lire la suite

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