Chantal Mouffe: «Obtenir un consensus en politique est par principe impossible» Par Sonya Faure et Anastasia Vécrin

Source : Libération, Sonya Faure et Anastasia Vécrin, 15-04-2017
Pour la philosophe belge proche de Podemos, il est urgent de renouer avec une vision conflictuelle de la démocratie, sous peine de glisser sur le terrain de la morale et de faire des adversaires politiques des ennemis irréconciliables.
La gauche, la droite, c’est dépassé. En atteste le mouvement En marche ! du populaire ministre de l’Economie, Emmanuel Macron. Nous serions désormais entrés dans l’ère de la «postdémocratie» : les conflits partisans seraient choses du passé et le dialogue entre acteurs raisonnables nous amènerait tout naturellement au consensus, pour le bien de tous. Pourtant, face à cette manière de voir idéalisée, le mouvement Nuit debout vient montrer la volonté des citoyens d’investir autrement le politique. Proche du parti espagnol Podemos, Chantal Mouffe rappelle justement que la politique est par définition le lieu du conflit, de l’antagonisme. Cette philosophe belge est la référence de ceux qui veulent réformer un jeu politique à bout de souffle depuis son ouvrage avec Ernesto Laclau, Hégémonie et stratégie socialiste (les Solitaires intempestifs, 2009). Dans l’Illusion du consensus, écrit en anglais il y a dix ans et traduit aujourd’hui en français, elle remet en cause la vision néolibérale d’une démocratie sans affect et sans heurt. Et plaide pour un populisme de gauche.
Si certains considèrent scandaleuse la référence à Carl Schmitt, philosophe compromis avec le nazisme, Chantal Mouffe justifie son choix théorique. Elle met en avant «la force intellectuelle et non les qualités morales» de celui qui fut aussi un opposant intransigeant au libéralisme.

Quel regard portez-vous sur le mouvement Nuit debout ?

Lire la suite

Source