Source : Proche & Moyen-Orient, Richard Labévière, 30-04-2018
Brasilia, Rio de Janeiro, 11 septembre 2017.
Poursuivons notre suite brésilienne en commençant par revenir sur prochetmoyen-orient.ch de la semaine dernière, qui demande une correction et deux précisions. Pan sur le bec ! Le juge Sergio Moro n’est pas un ami de l’actuel président brésilien Michel Temer, comme nous le laissions entendre. « Sa hargne pour Lula s’explique de manière plus profonde », estiment plusieurs sources du ministère de la Justice et de la Citoyenneté ; « ce qui se passe au Brésil est assez comparable à ce qu’a connu l’Italie avec Mani Pulite dans les années 1990 : Moro se rêve en juge Giovanni Falcone, tombeur de tous les puissants, à commencer par l’ancien président Lula et sa successeure Dilma Roussef. Ce processus de lava jato, qui prendra sans doute des années, finira par engloutir Sergio Moro lui-même et risque d’aboutir – comme en Italie – au triomphe d’une solution populiste ».
Concernant l’annonce de Michel Temer d’une privatisation de 4 millions d’hectares de forêt amazonienne, classés « parc naturel », le décret vient d’être annulé après une levée de boucliers tous azimuts. Cela dit, nous fait remarquer un universitaire brésilien, l’Amazonie n’est pas un « jardin botanique » et, comme les autres pays, le Brésil a un droit légitime à pouvoir exploiter ses ressources naturelles, selon des critères de développement durable, bien entendu ! Comme le souligne l’éditeur Carlos Andreazza dans sa tribune « Ambientalismo de oportunidade »1, cela fait des décennies que l’orpaillage, des coupes sauvages de bois précieux, des pistes d’aviation et des routes clandestines, détruisent la forêt, sans que les belles âmes des ONGs nationales et internationales ne s’émeuvent vraiment. Au Brésil, comme en Europe, les réserves naturelles servent souvent d’alibi : protéger ici pour mieux détruire ailleurs ! Dans tous les cas de figure, les problématiques amazoniennes nécessitent des politiques concertées qui s’inscrivent dans la durée et la clarté.
Enfin, Fora Temer, certainement ! Les dernières révélations d’Antonio Palocci (56 ans), l’ancien ministre de l’économie de Lula – venant de confesser qu’il existait un « pacte de sang » entre Lula et Emilio Odebrecht, le dirigeant du groupe de BTP du même nom, au cœur du plus gros scandale de corruption de l’histoire du pays – risque de créer de nouvelles difficultés à l’ancien chef de l’Etat et sa dauphine Dilma. Mercredi 6 septembre, Antonio Palocci, qui purge une peine de douze ans de prison pour « corruption » et « blanchiment d’argent », est passé à table. Après s’être muré de longs mois dans le silence, il est devenu soudainement bavard et très bavard. On peut donc légitimement se demander ce qui l’a ainsi décidé à faire ces soudaines révélations ! Toujours est-il que Lula conserve une très grande popularité : les sondages le donnent gagnant pour la prochaine élection présidentielle de l’automne 2018, à la condition que le juge Sergio Moro ne parvienne pas à l’empêcher d’être candidat… Quant au Parti des travailleurs (PT), on peut déplorer que – comme le PS français – il se soit vidé de tout contenu, abandonnant son rôle d’intellectuel collectif pour devenir une machinerie de pouvoirs et d’ambitions.Lire la suite
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