Source : Blog Mediapart – Fabien Escalona
Dès 1971, l’économiste postkeynésien Nicholas Kaldor prévenait qu’une union monétaire sans intégration fiscale et politique accentuerait les divergences entre ses membres, au point d’empêcher son parachèvement.
Une petite révolution qui ressemble à une grosse rustine. Ce lundi 18 mai, Angela Merkel et Emmanuel Macron ont présenté un dispositif pour venir en aide aux États, territoires et secteurs d’activité les plus affectés par la pandémie. En résumé : dans le cadre du budget pluriannuel de l’Union, 500 milliards seraient empruntés par l’UE sur les marchés financiers, puis redistribués comme des aides directes à dépenser. Les remboursements de l’emprunt seraient bien effectués solidairement par les 27 États-membres, et non pas seulement par les consommateurs de ces crédits.
Ce premier pas vers une politique de transferts est analysé comme une concession importante de la part de Berlin. Pour autant, à l’échelle du PIB européen et sur une période s’étalant de 2021 à 2027, on est encore loin de montants qui seraient véritablement significatifs. Si ce n’est pas trop tard, c’est trop peu pour bouleverser la donne. Par ailleurs, rien n’est encore acté. Le projet, bien que soutenu par la Commission, peut encore subir des vétos ou des altérations, notamment de la part des exécutifs autrichien, finlandais et danois, hostiles par principe à des « dons » sans conditions. Bref, un processus « tortueux », comme l’écrit pudiquement Politico.
Cet épisode récent, qui fait suite à la controverse sur les « coronabonds » ainsi qu’à un arrêt très commenté de la Cour de justice allemande à propos de la Banque centrale européenne (BCE), illustre les difficultés insurmontables à rendre « viable » la zone euro. Son intégrité, déjà testée au moment de la crise des dettes souveraines au début des années 2010, va l’être à nouveau dans la débâcle économique et financière qui s’annonce. Le risque est qu’un État, asphyxié par sa dette, s’aventure à recouvrer sa souveraineté monétaire. Moins dramatique mais guère plus riant : que la zone euro continue d’abriter des divergences élevées entre ses membres gagnants et ses membres perdants, nourrissant des divisions politiques entre les peuples, véritable cadeau pour les nationalistes.Lire la suite
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