Haut-Karabagh : l’Arménie et l’Azerbaïdjan au cœur de la « nouvelle guerre froide »

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Située entre la Turquie, l’Iran, la Géorgie et la Russie, cette zone de conflit implique des enjeux stratégiques majeurs
Dimanche 17 juillet 2016, à l’aube, un groupe d’hommes armés a pris d’assaut un bâtiment de la police dans le quartier d’Erebouni à Erevan, capitale de l’Arménie. Les assaillants arméniens du commando Sasna Tsrer (Les enragés de Sassoun), exigeaient la libération de l’opposant politique et militaire Jirair Sefilian. Ils reprochaient notamment au président arménien Serge Sarkissian sa gestion du conflit dans la province du Haut-Karabagh (disputée par l’Azerbaïdjan voisin). Les derniers otages ont été libérés samedi 23 juillet.
Sefilian, meneur du Front de salut public Nouvelle Arménie, ainsi que six de ses partisans, ont été arrêtés le 20 juin dernier. Motif : « avoir planifié une attaque armée contre des bâtiments gouvernementaux et des infrastructures de communication afin de renverser le pouvoir ». La détention d’armes faisait partie des griefs.

1921–2016 : Un conflit identitaire aux portes du « Heartland »

L’enchaînement de causes et de conséquences ayant conduit à cette prise d’otages, perçue par certains observateurs comme une tentative de coup d’État, mérite le temps de la réflexion.  L’ensemble conflictuel Arménie–Haut-Karabagh–Azerbaïdjan relève d’une complexité inhérente à l’histoire du Caucase. Frontalier de la Turquie à l’Ouest, de la Géorgie et de la Russie au Nord, de l’Iran au Sud et de la mer Caspienne riche de ses ressources pétrolières à l’Est, il s’est imposé comme un champ de bataille essentiel de ce que certains auteurs appellent désormais la « nouvelle guerre froide » (Gaïdz Minassian) ou « Le Nouveau Grand Jeu » (Friedemann Müller).
Ces deux expressions s’en réfèrent à des périodes et des concepts élaborés durant la lutte ayant opposé l’Empire Russe à l’Occident pour le contrôle des ressources et des territoires situées dans une partie de l’Afrique, ainsi qu’au cœur et à certaines extrémités de l’Eurasie. C’est ce territoire que le géographe Halford Mackinder baptise le Heartland, dans une conférence prononcée en 1904, « Le pivot Géographique de l’Histoire ». Il y définit le « Heartland » comme le cœur de « l’île-monde » composée de l’ensemble Afrique–Europe–Asie. Il y déclare : « qui contrôle l’Europe de l’Est contrôle le Heartland, qui contrôle le Heratland contrôle l’île-monde, qui contrôle l’île-monde contrôle le monde ».
La théorie du Heartland de Mackinder, couplée en une carte à la théorie des Balkans caucasiens de Brzezinski, et à celle d’un nouveau grand pivot américain englobant le Caucase et l’Afrique de l’Est, par le sociologue Mahdi Nazemroaya.
Cette théorie aura marqué les stratèges de la guerre froide, notamment Zbigniew Brzezinski (conseiller de Jimmy Carter dès 1975, puis d’Obama dès 2008), qui distingue dans Le Grand Échiquier (1997) les  « acteurs géostratégiques » (France, Allemagne, Russie, Chine et Inde) des « pivots géopolitiques » (Ukraine, Azerbaïdjan, Corée, Turquie et Iran). Les premiers ont le pouvoir de modifier les relations internationales, « au risque d’affecter les intérêts de l’Amérique », les seconds occupent une position leur donnant « un rôle clé pour accéder à certaines régions ou leur permet de couper un acteur de premier plan des ressources qui lui sont nécessaires ». Il y dédie tout un chapitre aux « Balkans eurasiens ». L’influence des USA y est selon lui disputée par la Russie, la Turquie, l’Iran et la Chine.
L’histoire du Haut-Khalabagh est grandement liée à celle de la guerre froide. Dès 1921, Staline confirma la décision prise par les Britanniques en 1919 de rattacher ce territoire composé à 94 % d’Arméniens à l’Azerbaïdjan. Cette décision est la source directe du conflit armé entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan issu de la dislocation de l’URSS dans les années 1990. De plus, la dimension religieuse du conflit l’inscrit potentiellement dans la lignée du scenario catastrophe des Balkans. L’Arménie est un pays à la tradition chrétienne orthodoxe singulière, tandis que l’Azerbaïdjan est un État dont la population est majoritairement chiite. Tous les ingrédients ethniques, religieux et territoriaux semblent mêlés pour embraser le conflit. Il nous reste donc à remonter le cours des évènements pour démêler le nœud menant de cette prise d’otages aux cases du Grand Échiquier.

Juillet 2016 : prise d’otages au siège de la police et manifestations dans les rues d’Erevan

Dès la prise du bâtiment de la police dans le quartier d’Erebouni par le groupe armé Sasna Tsrer dimanche 17 juillet matin, un policier a été tué. Selon Nikol Pachinian, un député de l’opposition ayant pu rencontrer les assaillants, un otage sur huit aurait d’abord été relâché à cause de problèmes de santé. Deux autres auraient été libérés dans la nuit de dimanche à lundi après plusieurs heures de négociations. Varoujan Avetissian, l’un des assaillants, avait affirmé que Vardan Egyazaryan, chef adjoint de la police nationale et Valeri Osipyan, chef adjoint de la police d’Erevan, faisaient partie des otages. Ils furent les deux derniers otages libérés, samedi 23 juillet. Le commando adressait directement ses revendications au peuple arménien via Facebook où il publiait commentaires et vidéos en temps réel.

« Nous faisons ça pour vous. Descendez dans la rue ! Nous demandons la libération de tous les prisonniers politiques » (…) « Rejoignez-nous ! Pour le moment, nous tenons les positions. Nous allons tenir aussi longtemps que nous le pouvons »

Il semblerait qu’ils aient été entendus. On dénombrait en effet plus de 1500 manifestants rassemblés dans la soirée du Lundi 18 sur la place centrale d’Erevan, tentant de se rapprocher du lieu de la prise d’otage. Selon un journaliste de l’AFP, la police aurait encerclé la zone et arrêté plusieurs manifestants. Certains auraient forcé les cordons de sécurité pour affronter la police. Mercredi 20 juillet, des manifestants ont attaqué les policiers à coups de pierres, aux abords du lieu de la prise d’otage.
Paradoxalement, ces manifestants sont notamment descendus dans les rues pour exiger une gestion pacifique du conflit de la part du gouvernement. Et pour éviter aussi un bain de sang pouvant conduire à la guerre civile. Les chaînes de télévision arméniennes permettent elles aussi d’observer en temps réel l’évolution de la situation à Erevan :

Heurts entre manifestants et policiers le 21 juillet 2016 dans Erevan

Avril 2016 : guerre des 4 jours, désirs de « solution finale » et appel au coup d’État militaire

Dans la nuit du 1er eu 2 avril 2016, des affrontements éclatent à la frontière du Haut-Karabagh. Alors qu’environ 20 000 soldats se tiennent de part et d’autre de la ligne de front, les deux camps s’accusent mutuellement d’avoir lancé les hostilités. L’artillerie lourde, les hélicoptères et les chars sont engagés. Le 3 avril, l’Azerbaïdjan annonce un cessez-le-feu unilatéral, mais l’Arménie affirme que les attaques persistent malgré cette proclamation. Un cessez-le-feu bilatéral est enfin proclamé le 5 avril, puis réaffirmé le 8, afin de permettre la recherche des corps disparus. La majorité des combats aura éclaté entre le 2 et le 5. En moins d’une semaine, officiellement, on dénombre près de 64 morts, mais d’autres sources évoquent plus d’une centaine de morts rien que du côté arménien.

Le cessez-le-feu a nécessité l’intervention de grandes puissances, notamment de la Russie, qui a des intérêts militaires et commerciaux dans les deux camps. Les détracteurs de Poutine le soupçonnent de vouloir provoquer la Turquie sur ce terrain explosif. Le cessez-le-feu s’est effectué au regret des groupes les plus belliqueux dans les deux camps. Jirair Sefilian, l’opposant arménien dont la libération était exigée par les preneurs d’otages, a exprimé devant la presse, fin avril, 2016 sa déception quant aux accords. La poursuite des hostilités aurait pu apporter une « solution finale » au conflit, a-t-il déclaré, reprochant au président Serge Sarkissian de ne pas avoir proclamé la mobilisation nationale du peuple arménien. Lors de la même conférence de presse, Sefilian a une nouvelle fois appelé à la démission de Sarkissian, le menaçant d’un coup d’état militaire s’il ne s’exécutait pas :

« Il serait préférable d’avoir son renvoi du pouvoir sans un soulèvement, sans un coup puissant du peuple. Sinon, notre peuple pourrait offrir une surprise à l’arrière comme nos soldats ont surpris le monde en première ligne », a-t-il déclaré
Armenews, Jeudi 21 avril 2016

Selifian jouit du prestige militaire dû à son rôle durant la guerre de 1988–1994, spécifiquement dans la libération de la ville Shushi en 1992. Il parie sur la mobilisation anti-Sarkissian sur laquelle le sentiment national mêlé au désir de revanche et à la volonté d’annexion du Haut-Karabagh pourraient déboucher.
Le 16 mai 2016, s’est tenu à Vienne en Autriche un sommet réunissant le président arménien Sarkissian et son homologue Azerbaïdjanais Ilham Aliyev. À sa suite, un conseiller d’Aliev a fait courir le bruit que Sarkissian y avait accepté le principe « d’importantes concessions territoriales de l’Arménie à l’Azerbaïdjan » dans le Haut-Karabagh. Bien que Sarkissian, appuyé par Moscou, ait démenti cette déclaration, la rumeur a eu un effet dévastateur sur l’opinion arménienne. Nul doute que l’effet était recherché par Aliyev, et qu’il fait le jeu des groupes les plus belliqueux du côté arménien, tel que la faction de Jairir Sefilian. Il n’est pas anodin que les partisans d’une guerre totale contre l’Azerbaïdjan soient aussi ceux d’un coup d’état contre Sarkissian et  d’une rupture diplomatique avec la Russie.

Juin 2015 : manifestations populaires ou prémices d’une révolution colorée ?

En juin 2015, le peuple arménien est sorti en grand nombre dans les rues d’Erevan pour manifester contre la hausse brutale du prix de l’électricité, assimilée à un racket. Moscou a pointé du doigt ce soulèvement pour y dénoncer les ferments d’une « révolution de couleur » visant à neutraliser l’influence russe dans le pays. Inter-RAO, la compagnie qui sous-traite la gestion de l’électricité en Arménie, est pilotée par Igor Setchine, le Richelieu russe, proche de Poutine, souvent considéré comme le troisième homme de Moscou derrière Dimitri Medvedev. Setchine est manifestement ciblé par l’administration états-unienne pour cette raison.
Les dix mille manifestants se défendirent d’une manipulation atlantiste de leur colère en  répondant à ces soupçons par ce slogan : « ici ce n’est pas Maidan, c’est l’avenue Baghramyan » (avenue principale d’Erevan). Par ailleurs, les accointances de Sarkissian avec le pouvoir russe, critiquées par les manifestants, n’empêchent en rien le chef d’État arménien de négocier avec l’OTAN lorsqu’il sent le vent tourner. Les contestations ont été notamment soutenues par la Fédération Révolutionnaire Arménienne. Un organe socialiste à tendance expansionniste (vers le Karabagh) dont Jirair Sefilian a été membre, et dont nous recroiserons le nom en remontant le cours des évènements.

Arménie et Haut-Karabagh : de la défiance à l’ingérence réciproque

Environ 80 % de la population habitant aujourd’hui le Haut-Karabagh est d’origine arménienne. Il peut donc sembler étrange qu’une faction arménienne du Haut-Karabagh, plutôt que de se concentrer sur la lutte pour la conservation de son territoire contre les velléités azerbaïdjanaises, descende des policiers arméniens dans les rues d’Erevan. Le tout pour obtenir la démission du gouvernement arménien. Afin de saisir les causes de cette hostilité, il est nécessaire de retracer une partie de l’histoire complexe des relations entre le gouvernement arménien et les factions politiques karabaghtsies. Il nous faut donc remonter à l’éclatement de l’URSS en 1991, lorsque la perestroïka provoque l’indépendance de fait de l’Arménie comme de l’Azerbaïdjan.
L’assemblée nationale du Haut-Karabagh profite alors du chaos généré par la dislocation de l’empire soviétique. Elle proclame son indépendance le 2 septembre 1991. Elle la réaffirme par référendum le 10 décembre 1991. Seulement, aucun État au monde n’accepte de reconnaître l’indépendance du Haut-Karabagh, hormis d’autres entités politiques non reconnues par la « communauté internationale » : l’Abkhazie, l’Ossétie du Sud et la Transnistrie.
L’Arménie elle-même refuse alors de reconnaître l’autonomie du Haut-Karabagh. Les Britanniques en 1919, puis Staline en 1921, l’avaient rattaché à l’Azerbaïdjan, bien que la population fût composée dès cette époque à 94 % d’Arméniens, selon l’historienne Anahide Ter Minassian (1918–1920 — La République d’Arménie, éditions Complexe, Bruxelles, 1989 -réimpr. 2006, p.260).

Reconnaître officiellement le Haut-Karabagh, ce serait déclarer une guerre ouverte à l’Azerbaïdjan, et l’Arménie s’y refuse, parce qu’elle n’en a pas les moyens. L’usufruit du pétrole donne à l’Azerbaïdjan les moyens de mener une guerre dans laquelle l’Arménie, dans un premier temps, refuse de s’engager officiellement. C’est notamment ce que les groupes armés karabaghtsis reprochent au gouvernement arménien, aujourd’hui encore. Mais lorsqu’en 1990–1992, l’Azerbaïdjan impose un blocus aux Arméniens du Haut-Karabagh et envoie des troupes pour reprendre le contrôle de la région, le gouvernement arménien aide les Arméniens karabaghtsis à repousser les troupes azerbaïdjanaises.
À cette époque, une génération de Karabaghtsis acquiert les postes clés du pouvoir arménien. Robert Kotcharian (alors premier ministre du Haut-Karabagh, dont il deviendra président avant de devenir président de l’Arménie de 1998 à 2008), Serge Sarkissian (actuel président de l’Arménie, à l’époque ministre de la défense) Vassken Sarkissian, (alors chargé de la sécurité nationale et des affaires internes, devenu plus tard premier ministre), organisent dès 1992, depuis Erevan, la constitution de l’Armée de défense de la République du Haut-Karabagh.
Malgré la non reconnaissance du Haut-Karabagh en tant qu’entité politique officielle, l’engagement personnel des membres du gouvernement arménien dans la cause du Haut-Karabagh n’est donc un mystère pour personne. La cooptation se déroule alors dans les deux sens. D’un côté, les Karabaghtsis phagocytent le pouvoir politique arménien et les postes clés de l’armée. De l’autre, le gouvernement arménien récompense les dirigeants karabaghtsis obéissants en leur offrant des postes clés dans son propre gouvernement.

Vers la reconnaissance officielle et l’implantation des réfugiés ?

En mai 2016, le vice-ministre des affaires étrangères de l’Arménie  a lancé une procédure de reconnaissance officielle du Haut-Karabagh
Plus que jamais aujourd’hui, la reconnaissance officielle de l’indépendance du Haut-Karabagh (toujours considéré comme territoire azerbaïdjanais par la « communauté internationale ») par l’Arménie est un sujet houleux. En mai 2016, quelques dizaines de jours seulement après la fin des combats,  une procédure de reconnaissance officielle de la région contestée a été lancée par le vice-ministre des affaires étrangères arménien, Chavarch Kotcharian.
La diplomatie azerbaïdjanaise a qualifié cette initiative « d’insulte supplémentaire au processus de négociations ». « Si l’Azerbaïdjan lance une nouvelle agression militaire, la reconnaissance de l’indépendance du Haut-Karabakh fera partie du programme » des autorités arméniennes, a déclaré Chavarch Kotcharian dans un communiqué.
Ces déclarations arrivent dans le jeu de quilles des relations azerbaïdjo-arméniennes alors même que la diplomatie azerbaïdjanaise accuse le gouvernement de Erevan de profiter de la crise syrienne pour peupler le Haut-Karbagh de réfugiés syro-arméniens. Edouard Nalbandian, ministre arménien des affaires étrangères, a déclaré en mars 2016 que « près de 20 000 réfugiés en provenance de la Syrie ont demandé protection en Arménie ». Nous ne saurons pas combien de ces demandeurs ont reçu une réponse positive à leur requête, ni combien sont venus et restés sans obtenir de réponse. Plusieurs témoignages, ainsi que des déclarations provenant de la représentation permanente du Haut-Karabagh elle-même, attestent de la réalité de l’installation de réfugiés dans le Haut-Karabagh. Cependant, aucun chiffre précis ne semble pouvoir être avancé.
L’enjeu diplomatique est donc régulièrement mis sur la table. Parfois à des fins électoralistes, les politiciens soufflent sur les braises. Quitte à risquer d’embraser la région. Dans l’opposition comme dans la majorité, pour des raisons diverses et parfois contraires, la crise karabaghtsie génère donc une situation profitable à une partie de la classe politique arménienne.

Soros, les lobbies de la diaspora et la FRA : agents de déstabilisation pilotés depuis des puissances étrangères ?

Les opposants Raffi Hovannissian et Jirair Sefilian, tous deux issus de la diaspora. Au service d’intérêts étrangers ? (image Katehon.com)
Mais tous les combattants de l’Armée de défense du Haut-Karabagh n’entendent pas en rester au combat par les urnes. Jirair Sefilian, dont les preneurs d’otages d’Erebouni exigeaient la libération, n’est pas issu du sérail karabaghtsi. Originaire de la diaspora arménienne du Liban, il s’engagea d’abord dans la défense des quartiers arméniens de Beyrouth durant la guerre du Liban, de 1983 à 1990, aux côtés de la Fédération Révolutionnaire Arménienne (FRA). Un parti de gauche de tendance socialiste, d’abord engagé auprès des Forces Libanaises et des Phalangistes de Bachir Gemayel, avant que cette dernière faction ne se retourne contre la FRA.
C’est fort de cette expérience militaire qu’il s’engagea de 1990 à 1998 dans la guerre du Haut-Karabagh contre les forces azerbaïdjanaises. Il quitta l’armée avec le grade de lieutenant-colonel. Il fut arrêté une première fois en 2006, en compagnie de Vartan Malkhasian, en tant que meneur du groupe d’opposition l’Alliance des Volontaires Arméniens.
En 2009, il devient chef du groupe d’opposition Parlement Fondateur, et se fait de nouveau arrêter pour cette raison le 8 avril 2015. Courant 2015, il fonde le Front de Salut Public Nouvelle Arménie. C’est dans ce cadre qu’il se fait arrêter une troisième fois le 20 juin 2016.

1991–1998: Ter-Petrosyan face à la diaspora

Levon Ter-Petrosyan, président arménien de 1991 à 1998, avait écarté Hovannissian du pouvoir.
Son partenaire pour la création du Front de Salut Public Nouvelle Arménie n’est autre que Raffi Hovannissian. Arménien d’origine états-unienne, né et ayant fait ses études en Californie. Il est arrivé en Arménie en 1990, promu ministre des affaires étrangères du gouvernement arménien dès 1991. Le 16 octobre 1992, le président Levon Ter-Petrosyan (issu de l’administration soviétique) pousse Hovannissian à la démission. Il le considère trop proche des lobbies de la diaspora dont Ter-Petrosyan tentait alors d’endiguer l’influence et l’ingérence au sein de la politique intérieure de l’Arménie.
Le problème étant que depuis la chute l’URRS, la majorité des organisations politiques arméniennes, ainsi que l’État arménien lui-même, sont drogués aux dons de la diaspora. Elle monnaye ainsi son influence directe sur les décisions du gouvernement et les actions de l’opposition.

« Le concept de partis politiques nationaux existant et fonctionnant en dehors de leurs pays est contre nature » avait déclaré Ter-Petrosyan à l’époque.
Razmik Panossian, « Between ambivalence and intrusion: Politics and identity in Armenia-diaspora relations » , Diaspora, 7, 1998, p. 171

De fait, comme le soulignent les politologues israéliens Yossi Chain et Aharon Barth :

« Depuis 1991, la diaspora a pris part à la scène politique intérieure. En sus de la Fédération Révolutionnaire Arménienne [la FRA, dite « Dashnak »], Le Parti Libéral Démocratique Arménien et le Parti Social Démocrate Hentchakian [dit « Hentchak »] furent importés par la diaspora. […] Le Président [Ter-Petrosyan] fit des gestes envers la diaspora en nommant certains de ses membres à des postes clés — Incluant l’états-unien d’origine Raffi Hovannissian. […] Après un rapprochement entre la diaspora et l’intérieur, les Dashnaks [donc les partisans de la FRA] constituèrent la plus ardente opposition à Ter-Petrosyan. […] Après que les Dashnaks eurent précipité de houleux débats concernant des problématiques fondamentales relevant des relations internationales (le Karabagh, le génocide et les relations avec la Turquie), Ter-Petrosyan répondit en rendant ces partis hors-la-loi en tant qu’ « organisations étrangères contrôlées depuis l’extérieur ». […] Sa crédibilité a été particulièrement entamée lorsque la Turquie refusa d’établir des relations avec l’Arménie, malgré sa volonté de renoncer à la reconnaissance de sa culpabilité concernant le génocide. Il perdit même le soutien de ses sympathisants dans la diasporas pour avoir « sous-estimé le risque d’un autre génocide » en n’effectuant aucun changement fondamental dans ses politiques concernant la Turquie et l’Azerbaïdjan. […] Ter-Petrosyan fut finalement poussé à la démission en 1998. À de nombreux égards, la diaspora a joué un rôle déterminant dans son expulsion. »

Yossi CHAIN, Aharon BARTH, « Diasporas and International Relations Theory » [Diasporas et théorie des organisations internationales], International Organisation, Volume 53, n°3, MIT Press, été 2003, pp. 469-470

Cependant, la position de Ter-Petrosyan vis-à-vis de la diaspora et de ses moyens financiers fut double. L’Arménie paie aujourd’hui encore les conséquences de cette duplicité. Comme l’écrivent encore Chain et Barth :

« Clairement, la politique de Ter-Petrosyan consistant à solliciter les ressources diplomatiques et financières de la diaspora tout en s’employant à neutraliser les voix de la diaspora concernant les problématiques internationales exacerba ses relations avec les Dashnaks les plus déterminés. »
Yossi CHAIN, Aharon BARTH, « Diasporas and International Relations Theory », p.470

Les réseaux d’Hovannissian, du FRA à l’Open Society

George Soros en compagnie d’une délégation de l’AGBU, lobby de la diaspora arménienne aux États-Unis, et de cadres de l’Open Society, le 19 septembre 2007 à New York
Van Rompuy, président du conseil de l’Europe en compagnie de représentants de la NCI, l’organisation d’Hovannissian, en 2012
À cet égard, il n’est pas anodin que Raffi Hovanissian ait été le chef d’une section locale de la Fédération de la Jeunesse Arménienne de Californie, organe directement issu de la Fédération Révolutionnaire Arménienne. La FRA fait donc office de pont de liaison entre les deux chefs du Front de Salut Public Nouvelle Arménie, Jirair Sefilian et Raffi Hovannissian. Il est par ailleurs essentiel de souligner que l’organe personnel de promotion d’Hovannissian, la National Citizens’ Initiative (NCI), entretient au moins depuis 2011 des relations privilégiées avec la section géorgienne de l’Open Society Foundation de George Soros. On connaît le rôle de cette fondation dans la destabilisation du gouvernement géorgien en 2003, mais aussi dans l’importation de binationaux Géorgiens à la tête de l’Ukraine à partir de 2004.
Soros ne cache pas ses désirs d’ingérence dans la gestion des question sociétales en Arménie. Il communique régulièrement via sa page Twitter sur des sujets tels que « l’égalité des genres » ou les initiatives d’ « éducation inclusive » dans le petit pays du Caucase à la tradition chrétienne orthodoxe très marquée. Soros est en contact avec les lobbies de la diaspora arménienne aux États-Unis, au moins depuis 2007.
L’Open Society possède d’ores et déjà son propre organe en Arménie. On y fait la promotion de camps de vacances pour jeunes Arméniens sympathisants d’une intégration progressive à l’Union Européenne. La NCI d’Hovannissian quant à elle, participe à des colloques de l’UE sur la « démocratisation » de l’Arménie, comme en juillet 2012, en compagnie du président du Conseil de l’Europe Herman van Rompuy. Comme le révèlent les câbles publiés par Wikileaks, Hovannissian a été lui-même approché de la manière la plus directe par Marie Yovanovitch, tour à tour ambassadeur des États-Unis en Arménie, au Kirghizstan et en Ukraine.

27 octobre 1999 : assassinats au parlement contre l’alliance avec la Russie et la paix avec l’Azerbaïdjan

Karen Demirtchyan et Vazgen Sargsyan, assassinés en pleine séance au parlement le 27 octobre 1999.
Sefilian et Hovannissian ne sont pas les premiers militants politiques issus des rangs de la Fédération Révolutionnaire Arménienne à menacer directement le gouvernement arménien d’un coup d’État militaire. Le 27 octobre 1999, Nairi Hunanian, journaliste et ancien membre de la Fédération Révolutionnaire Arménienne, conduit un commando de 4 hommes armés de kalachnikovs au cœur du parlement arménien en pleine séance, blessant une trentaine d’hommes et en tuant 8.
Parmi les les politiciens assassinés : Vazgen Sargsian et Karen Demirtchian, respectivement nommés en juin 1999 premier ministre d’Arménie et président du parlement arménien. À la surprise des élites et des observateurs étrangers, Demirtchian, l’ancien premier secrétaire du Parti Communiste d’Arménie, représentant de l’ordre ancien, venait de remporter les élections parlementaires contre Robert Kotcharyan, fraîchement élu président de la république. Tout cela faisait suite à la démission de Levon Ter-Petrosyan. Il avait tenté de limiter l’influence de la diaspora sur la politique intérieure de l’Arménie, et la diaspora le lui a bien rendu.

La France et les États-Unis impliqués pour faire tomber les réseaux pro-russes ?

En 2000, les enquêteurs ont allégué que certains membres de l’entourage de Robert Kotcharyan étaient impliqués dans l’assassinat. De fait, l’assassinat permit à Kotcharyan d’émerger comme figure politique dominante dans le pays. L’ancien président Levon ter-Petrosyan lui-même accusa Kotcharyan et Serge Sarkissian (actuel président, à l’époque ministre de la sécurité nationale) d’être les véritables commanditaires de l’assassinat. Le frère de Vazgen Sargsian, Aram Sargsian, promu premier ministre puis désavoué par Kotcharyan après les attentats, ainsi que le maire de Erevan, Albert Bazeyan, adoptèrent un point de vue comparable à celui de Ter-Petrosyan concernant cette affaire. Ashot Manucharyan, ancien ministre de l’intérieur de Ter-Petrosyan, affirma quant à lui que le gouvernement arménien fut alerté par un pays étranger de l’attentat à venir. Il déclara :

« Les services spéciaux des États-Unis et de la France agissent pour détruire l’Arménie, et dans ce contexte, ils sont les plus susceptibles d’être impliqués dans la réalisation d’actes terroristes en Arménie » .

À ce titre, il s’inquiéta de ce qu’

« un certain nombre de leaders du parti Dashnak [la FRA], agissent dans l’intérêt de la politique étrangère américaine ».

Nairi Hunanian : chef du commando, ex agent du FRA

Le meneur du commando du 27 octobre 1999, Nairi Hunanian, était-il mandaté par des puissances étrangères en vue de saboter le processus de paix ?
L’agent trouble Alexandre Litvinenko (dont on ne sait toujours pas s’il était espion pour le compte de la Russie et la Grande-Bretagne) déclara quant à lui dans un journal azerbaïdjanais, sans en apporter la preuve, que la Russie avait fomenté l’attentat. Afin d’enrayer le processus de paix entamé entre l’Azerbaïdjan, l’Arménie et la Turquie, selon ses dires. Si la thèse d’un sabotage délibéré du processus de paix semble plus que crédible, l’idée d’une initiative russe est contestable à plus d’un titre.
Certes, la Russie vend des armes à l’Azerbaïdjan et à l’Arménie, et en ce sens peut tirer avantage de la guerre. Mais il serait surprenant que Nairi Hunanian, ancien membre du Front Révolutionnaire Arménien, décide soudainement de se mettre au service des intérêts de la Russie. La Russie est loin d’être le seul pays à tirer quelque éventuel avantage de la poursuite de cette guerre.

Israël–Azerbaïdjan : « 90 % des relations sous la surface »

Ilham Alyiev et Benjamin Netanyahou à Davos en Janvier 2016
À l’issue de la guerre des 4 jours d’avril 2016, l’ambassadeur d’Arménie au Caire et en Israël remet une note de protestation au ministère des affaires étrangères de Tel Aviv. Au cœur des combats, un drone kamikaze Harop vendu par Israël à l’Azerbaïdjan aurait percuté un bus arménien, faisant 7 morts. C’est le Washington Post qui dévoile en premier l’information. L’article est assorti d’une vidéo du « drone kamikaze » a priori filmé par des Azerbaïdjanais le jour même de son explosion, le mardi 5 avril 2016.
Une opération commerciale d’envergure pour Israël. Le drone pourra désormais bénéficier de la mention « approuvé au combat ». Israël approvisionne l’Azerbaïdjan en radars, en missiles antichars et en instruments de vision nocturne. Le gouvernement de Tel-Aviv participe également à la modernisation de l’aviation militaire azerbaïdjanaise. On estime les enjeux financiers pour Tel-Aviv à 5 milliards de dollars.
L’auteur et journaliste états-unien Mark Perry a évoqué l’ampleur des relations entretenues entre Israël et l’Azerbaïdjan dans un article paru dans Foreign Policy en 2012.
Par ailleurs, Tel-Aviv entretient une « alliance stratégique » avec le gouvernement de Bakou (capitale de l’Azerbaïdjan). L’Azerbaïdjan se trouve au cœur de la stratégie du triangle géopolitique Ankara–Washington–Tel-Aviv. 40 % de la consommation de pétrole annuelle d’Israël dépend directement des importations de l’Azerbaïdjan. Pays turcophone, l’Azerbaïdjan est extrêmement lié à la Turquie, qui y joue une carte contre la Russie, soutien militaire officiel de l’Arménie.
Or, Tel-Aviv est en pleine négociation avec Ankara pour la création d’un pipeline. Il devrait servir à importer depuis Israël 20 % des réserves de gaz nécessaires à la Turquie. Un partenariat énergétique à mettre en relation avec celui envisagé entre Israël, Chypre et la Grèce. La prévision d’un accord sur les éventuelles retombées économiques de la guerre de Syrie n’est pas non plus étrangère au rapprochement de la Turquie et d’Israël, qui ont un ennemi commun contre lequel ils pourraient se prémunir ensemble : l’Iran.

La « symbiose discrète » à l’œuvre

Israël et l’Azerbaïdjan sont des collaborateurs militaires de premier ordre. Dans un câble datant de 2008, révélé par Wikileaks, intitulé « La symbiose discrète de l’Azerbaïdjan avec Israël », Donald Lu, assistant chef de mission de l’ambassade des États-Unis à Bakou, citait Ilham Aliyev en personne. Le maître de Bakou y comparait la relation de son gouvernement avec celui de l’état hébreu à un Iceberg :

« Neuf dixièmes en sont sous la surface » aurait-il déclaré.

Dans un article paru dans le bimestriel états-unien Foreign Policy le 28 mars 2012, l’historien et journaliste états-unien Mark Perry, spécialisé dans le renseignement et les affaires étrangères, rapporte ces propos de responsables de l’administration Obama, datés de février 2012, :

« Les Israéliens ont acheté un terrain d’atterrissage, et ce terrain d’atterrissage, c’est l’Azerbaïdjan »

Ilham Alyiev a rencontré Shimon Perez à de nombreuses reprises entre 2012 et 2015.
L’Azerbaïdjan entretient une frontière avec le Nord de l’Iran. En février 2012, Gudrat Hasanguliyev, membre du parti au pouvoir, a proposé de rebaptiser l’Azerbaïdjan « Azerbaïdjan du Nord ». Il suggérait ainsi que les 16 millions d’Azéris vivant dans le Nord de l’Iran attendaient d’être libérés en tant qu’habitants de « l’Azerbaïdjan du Sud ». Implicitement, une telle déclaration impliquait l’annexion du Nord de l’Iran par l’Azerbaïdjan.
Dans son article de 2012, Mark Perry évoquait un rapport de Soner Cagaptay et Alexander Murinson pour le Washington Institute. Lequel affirmait que les Israéliens auraient certainement installé des stations d’écoute le long de la frontière irano-azerbaïdjanaise. L’administration états-unienne observe ce rapprochement de très près, car elle considère qu’il pourrait être un facteur supplémentaire d’embrasement de la région. Les diplomates et militaires des États-Unis ont confié leurs inquiétudes à leurs supérieurs et à Mark Perry conernant l’éventualité d’une attaque israélienne lancée depuis l’Azerbaïdjan sur l’Iran :

«Le principal objectif d’Israël est de garder l’Azerbaïdjan comme allié face à l’Iran, une plateforme de reconnaissance vers ce pays et un marché pour ses équipements militaires […] «Bien sûr, s’ils font ça [attaquer l’Iran depuis l’Azerabïdjan], cela élargit le conflit, cela le rend plus compliqué. C’est extrêmement dangereux.»

Le double jeu de l’OTAN avec l’Azerbaïdjan et l’Arménie

Les partenariats croisés conclus par la Russie avec l’Azerbaïdjan et l’Arménie sont souvent évoqués par les médias occidentaux, notamment français, pour en déduire une certaine duplicité de la part de Moscou. C’est oublier un peu vite qu’en politique étrangère, les blanches colombes sont des oiseaux rares. Lorsque le conflit est évoqué, les partenariats comparables conclus par l’OTAN et ses pays membres avec les belligérants sont rarement mis sur la table aux côtés de ceux conclus par la Russie, ne serait-ce qu’à titre comparatif.

L’OTAN « sécurise » les pipelines de l’Azerbaïdjan

Pourtant, comme on peut le lire sur le site de l’OTAN,

« L’Azerbaïdjan fournit en effet des soldats à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) en Afghanistan. Il a aussi participé activement par le passé à l’opération menée au Kosovo. »

L’Azerbaïdjan joue un rôle de premier ordre dans les stratégies de diversification d’approvisionnement de l’Europe de l’Ouest en ressources énergétiques
Le gouvernement Azerbaïdjanais a bien compris qu’il devait permettre à l’OTAN de garantir la « sécurité » de ses ressources énergétiques. Seule garantie de ne pas faire les frais, dans les années à venir, d’une « révolution populaire » installant au pouvoir un régime plus favorable aux intérêts occidentaux. L’OTAN dispose donc désormais d’infrastructures à Bakou. Elle y a notamment installé les locaux de l’École Internationale de l’OTAN en Azerbaïdjan, la NISA, mais également d’un Centre Euratlantique. L’Azerbaïdjan intéresse l’OTAN pour les mêmes raisons qu’Israël. Il lui ouvre les portes d’un couloir énergétique contournant la Russie.
Même s’il ne subvient qu’à 1 % des besoins mondiaux et que ses réserves ont été certainement surestimées (pour des raisons politiques ?), le pipeline Bakou–Tbilissi–Ceyhan, passant par la Géorgie et la Turquie, lui ouvre ces portes, préfigurant peut-être des investissements du même type, tels que ceux concernant la construction des pipelines Southstream et Nabucco.

La concurrence OTAN/OTSC en Arménie

L’Arménie, comme l’Azerbaïdjan, a dû payer son tribut militaire au Kosovo et en Afghanistan. En 2010, elle a accueilli un exercice du « Partenariat Pour la Paix » (PPP) de l’OTAN sur son territoire. Depuis le 28 janvier 2016, Erevan elle aussi dispose de son centre universitaire cofinancé par l’OTAN, l’Université Nationale de Recherche pour la Défense (NDRU) afin, selon les termes de l’OTAN, de

« promouvoir l’introduction des bonnes pratiques académiques occidentales dans les programmes de formation Défense dispensés en Arménie »

L’Arménie est membre de l’OSTC, l’alliance militaire faisant bloc face à l’OTAN
Traduction : faire émerger une jeune élite arménienne favorable aux perspectives et aux manœuvres de l’OTAN dans la région. Le gouvernement arménien ne peut qu’avoir conscience qu’il navigue dangereusement entre deux eaux à courants contraires. Depuis sa création en 2002, l’Arménie est membre de l’Organisation du Traité de Sécurité Collective (OTSC). Cette concurrente de l’OTAN est structurée autour de la Russie, et regroupe la Biélorussie, le Kazakhstan, le Kirghizistan, le Tadjikistan, la Russie et l’Arménie. Malgré les tentatives manifestes de déstabilisation visant notamment à écarter l’influence russe du pouvoir arménien, il est difficile pour le gouvernement arménien de se défaire de ses engagements vis-à-vis de l’OTAN, quand bien même il ne souhaiterait pas « devenir membre de l’Organisation » .

Est-Ouest, Nord-Sud

Vers un encerclement de la Russie ?
Par le biais d’un conflit inter ethnique ultra localisé aux enjeux globaux et complexes,  les grandes puissances placent leurs pions dans la guerre au gré de leurs déclarations de paix. D’aucuns verront dans la colonisation occidentale de ses anciens satellites, une tentative d’encerclement de la Russie. D’autres au contraire, pointeront du doigt les « manigances » de la Russie pour y conserver son influence.
… Ou vers un encerclement préalable de l’Iran ?
L’Azerbaïdjan, point-relais dans l’arc énergétique reliant Tel-Aviv à Kaboul en contournant Téhéran ?
Mais en changeant d’échelle pour croiser la perspective Nord-Sud, plus discrète, à celle des violents courants Est-Ouest, on jaugera du poids que fait peser la Géorgie sur la région par le Nord, à la fois comme base arrière de l’OTAN dans les tentatives de déstabilisation de l’Arménie, et comme passerelle de contournement de la Russie dans l’acheminent du pétrole et du gaz vers « le monde libre ». Par le Sud, on portera un regard attentif aux mouvements venus d’Azerbaïdjan, dirigés vers l’Iran. On s’interrogera alors sur le rôle que joue dans cette histoire le pays qui, de l’aveu même de Washington, a fait de l’Azerbaïdjan son aéroport. Ce petit pays dont le président azerbaïdjanais déclare lui-même qu’il entretient avec le sien des relations comparables à celle d’un iceberg dont 90 % de la matière se situerait sous la surface.
Galil Agar
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Cet article Haut-Karabagh : l’Arménie et l’Azerbaïdjan au cœur de la « nouvelle guerre froide » est apparu en premier sur Cercle des Volontaires.