Yémen AN III : La guerre huis-clos d’un « rogue state », par René Naba

Pour mémoire, René Naba est un écrivain et journaliste, spécialiste du monde arabe. De 1969 à 1979, il est correspondant tournant au bureau régional de l’Agence France-Presse (AFP) à Beyrouth puis de 1979 à 1989, il a été responsable du monde arabo-musulman au service diplomatique de l’AFP.

Source : Madaniya, René Naba, 24/03/2017

«Le Yémen est le cimetière de ses envahisseurs. Evitez le». Recommandation du Roi Abdel Aziz Al Saoud, fondateur de la dynastie wahhabite, à ses héritiers.

UNE PROMENADE DE SANTÉ QUI VIRE AU CAUCHEMAR

Le baptême de feu du Roi Salmane Ben Abdel Aziz au Yémen, le 25 Mars 2015, deux mois après son accession au trône, se voulait une démonstration de force et de vigueur du monarque, au terme de dix ans de léthargie induite par son prédécesseur le nonagénaire Abdallah.
Œuvre de son fils, le prince Mohammad Ben Salmane, le prince héritier du prince héritier, l’expédition punitive de ce monarque octogénaire, de surcroît pâtissant d’une maladie handicapante (Alzheimer), contre le plus pauvre pays arabe, a tourné au cauchemar. La promenade de santé a viré au voyage au bout de l’enfer.
Le souverain, prudent, avait pourtant pris toutes les précautions : Pour la première guerre frontale de la dynastie wahhabite depuis la fondation du Royaume il y a près d’un siècle, une coalition de sept pays avait été mise sur pied alignant 150. 000 soldats et 1.500 avions. Une task force secondée par des mercenaires des compagnies militaires privées du type Blackwater de sinistre mémoire et la connivence tacite des « Grandes Démocraties Occidentales».
Le châtiment se devait être exemplaire et dissuader quiconque se dresserait contre l’hégémonie saoudienne dans la zone, particulièrement les Houthistes, secte schismatique de l’Islam orthodoxe sunnite, d’autant que la dynastie wahhabite considère comme sa chasse gardée absolue, son sas de sécurité, le Yémen, ce pays situé à la droite (yamine) sur le chemin de La Mecque, selon sa signification étymologique.
Mais « La tempête de la fermeté » s’est révélée catastrophique, malgré le blocus naval de la Ve flotte américaine de la zone (Golfe persique-Océan Indien), en dépit du puissant coup de main de la France à un mini-débarquement de troupes loyalistes à Aden, depuis la base militaire française de Djibouti. Malgré l’encadrement français des troupes saoudiennes assuré par le contingent de la Légion Étrangère stationné sur la base française d’Abou Dhabi, « Zayed Military City».
Malgré l’aménagement d’une base arrière saoudienne dans le ville portuaire d’Assab (Érythrée), sur la Mer Rouge, pour le recrutement et la formation des cadres de l’armée loyaliste pro saoudienne.

LA PROBLÉMATIQUE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE DU YÉMEN : UN COCKTAIL EXPLOSIF À BASE DE CORRUPTION ET DU QAT

Le déclin des revenus pétroliers
Le revenu moyen annuel du Yéménite s’élève à 950 dollars par an (660 euros) du fait d’une guerre civile larvée depuis des décennies, du déclin de la production du pétrole, de la corruption et de la surconsommation du Qat.
La production de pétrole au Yémen a dégringolé ces six dernières années, passant de 450 000 barils par jour à 180 000 barils. Cette tendance était contrebalancée par les prix élevés du pétrole, qui constitue toujours 80% des revenus du gouvernement. Mais cette manne s’effondre, alors qu’une part toujours plus grande de l’argent est utilisée pour combattre les Houthistes.
Les Yéménites consacrent plus de 6% de leur PIB (Produit intérieur brut) aux dépenses militaires, ce qui les place au 7e rang mondial.
Corruption
Peu de pays peuvent rivaliser avec le Yémen en matière d’intensité et de créativité de la corruption. Parmi les près de 100 000 combattants que les généraux yéménites dirigent, un tiers environ sont des « soldats-fantômes », qui soit n’existent pas, soit ne se présentent jamais. Les officiers qui commandent ces fantômes gardent pour eux leurs salaires, revendent leurs armes et leurs couvertures, et alimentent ainsi le marché noir. Des fonds non-militaires sont également détournés, des hommes d’affaires engrangent d’énormes profits par le biais de contrats à fournisseurs uniques. Et il y a aussi les mezaniyya, ces subventions que le gouvernement accorde régulièrement aux tribus traditionnelles pour les aider à préserver leurs structures ; l’argent finit en fait souvent dans les poches des dirigeants tribaux.
Le Qat
Enfin, le Qat, un des gros postes de dépenses des Yéménites, ravage les budgets des familles, en même temps que leur santé. Cette plante dont l’effet stimulant est comparable à celui de l’amphétamine est d’usage répandu non seulement au Yémen mais aussi dans la totalité de la Corne de l’Afrique. Sa culture se fait au détriment de l’agriculture. Gros consommateurs de Qat, nombreux sont les yéménites qui consacrent le quart de leur revenu à cette drogue, au détriment des autres postes de dépenses du budget familial (éducation, santé, alimentation, habillement).

LE STATUT MINORITAIRE DES CHIITES

Au delà de cette problématique, les Houthistes, secte minoritaire de l’Islam, pâtissent de la même stigmatisation que les Chiites de Bahreïn en ce que le primat sunnite du Monde arabe frappe de suspicion toute revendication égalitaire qui battrait en brèche leur hégémonie, en accusant les contestataires d’être des « agents à la solde de l’Iran».
En fait, les Houthistes et leurs alliés souhaitent une participation plus active à la vie politique du pays, en proportion de leur importance démographique, au partage des richesses, de même que le respect du statut juridique relevant de leur confession. Le code de l’héritage faisait aussi partie des enjeux, car chez les sunnites, l’héritier mâle obtient le double de la part de la fille, alors que chez les Houthistes et, de manière générale, chez les chiites, l’héritage se fait à part égale entre filles et garçons.
Dans ce conflit hégémonique régional, l’Iran représente une double menace d’abord en temps qu’ « État révolutionnaire » dans une zone hyper conservatrice, ensuite qu’en tant que pouvoir fonctionnant sur le système électif, un système honni par les autocrates du Golfe, deux notions mortelles pour une monarchie absolutiste qu’est la dynastie wahhabite.
Le levier chiite-sunnite apparaît dans ce contexte comme un moyen détourné pour justifier ce combat contre un pays dont l’exemple pourrait contaminer l’ensemble des pétromonarchies. Le Sultanat d’Oman se refuse à cette logique éradicatrice en ce qu’il considère ce conflit régional comme une source d’affaiblissement de tous les protagonistes et un justificatif à une plus grande mainimise étrangère sur cette zone pétrolifère. Une façon de témoigner de son indépendance en secouant la tutelle trop lourde des Saoudiens

LES HOUTHISTES TAILLENT DES CROUPIÈRES À LEURS ADVERSAIRES

Malgré la disproportion des rapports de force, les Houthistes ont réussi à tailler des croupières à leurs adversaires. Et dès les premiers jours du conflit, ce fut la débandade. Les troupes saoudiennes ont déserté leurs postes face aux rebelles leur laissant près de 30 blindés en guise de prises de guerre. Au total 400 soldats saoudiens ont été tués au premier semestre du conflit.
La coalition sunnite, elle-même, s’est lézardée. Le Pakistan a refusé d’y participer de crainte d’être instrumentalisé. L’Égypte a pris ses distances face à la montée en puissance d’Al Qaïda, l’allié tacite des wahhabites, sur une base sunnite. Et les Émirats Arabes Unis ont levé le pied après quinze mois de combat.
Le 13 Août 2015 fera date dans les annales de cette guerre : les troupes d’Abou Dhabi, fer de lance de l’assaut contre Aden, bien que bénéficiant d’un encadrement technologique français depuis la base de Djibouti et la base aéronavale française de Cheikh Zayed, à Abou Dhabi même, ont essuyé de lourdes pertes en hommes et en matériel. Cent soldats ont été tués et une douzaine de chars Leclerc détruits ou endommagés. Le quotidien libanais « Al-Akhbar » ira même jusqu’à titrer qu’« Aden a été le cimetière des Chars AMX Leclerc », la fierté de l’armement français.
Fin août enfin, un terrible attentat contre une position pétro monarchique à Marib faisait 92 tués dans les rangs des assaillants notamment 45 soldats d’Abou Dhabi, 10 saoudiens et 5 qataris. Avec en prime la capture par Al-Qaïda pour la péninsule arabique de plusieurs soldats émiratis de même que leur équipement blindé.

PRIME DE 7.500 DOLLARS PAR SORTIE AÉRIENNE ET UNE BENTLEY POUR CHAQUE PILOTE SAOUDIEN

Un désastre absolu en dépit de la présence de pilotes mercenaires français et américains, opérant dans les rangs saoudiens, alléchés par des primes de l’ordre de 7.500 dollars par sortie aérienne. Avec en surprime, une Bentley offerte par le prince Walid Ben Talal pour chacun des 100 pilotes saoudiens participant au bombardement du Yémen. Sans doute une façon très personnelle de développer le patriotisme, le sens du devoir et le goût du sacrifice au sein des forces armées saoudiennes.

SUD YÉMEN VERSUS SUD D’ARABIE

L’Arabie saoudite répliquait, en septembre 2015, avec l’intervention au sol de la coalition pétro monarchique, donnant une nouvelle dimension au conflit, conduisant les Houthistes, les contestataires de la « Pax Saoudiana », à porter la guerre sur le territoire même du Royaume.
L’opération terrestre saoudienne paraissait tout autant destinée à purger le traumatisme infligé à l’opinion locale après le lourd bilan de Marib et à calmer les craintes des parrains occidentaux quant à l’aptitude militaire saoudienne à mener à bonne fin cette guerre… qui apparaît sans fin.

TURPITUDES ET IMPOSTURES

A – La triple imposture de Tawakol Kkarmane
La guerre pétro monarchique contre le Yémen a mis en relief la triple imposture du Prix Nobel de la Paix 2011 et les turpitudes occidentales.
Unique femme membre de la confrérie des Frères Musulmans à avoir décroché un Prix Nobel de la Paix dans l’histoire de l’Humanité, Tawakol Karmane a ainsi rallié l’Arabie saoudite dans la Guerre du Yémen contre son propre pays, dans une démarche qui révèle sa triple imposture.

  • En tant que Prix Nobel de la Paix, elle a donné sa caution à une guerre
  • En tant que femme, elle a rallié le pays le plus régressif en matière des droits de l’Homme
  • En tant que Yéménite, elle a rallié les agresseurs de son propre pays

B- Les turpitudes occidentales
Complices tacites de l’agression pétro monarchique contre le Yémen, les pays occidentaux n’ont pipé mot ni contre les graves violations du droit humanitaire internationale, ni, pis, contre l’instrumentalisation des groupements djihadistes dans la guerre anti-houthistes.
Ainsi le Parti Al-Islah, la branche yéménite des Frères Musulman, a fait office de fer de lance du combat anti-houthistes bien que la confrérie soit inscrite sur la liste noire des organisations terroristes, alors qu’Al Qaida, la matrice des groupements djihadistes, opérait une percée remarquée dans le sud Yémen.

LE HADRAMAOUT SOUS LA COUPE D’AL QAIDA

Sans craindre la contradiction, l’Arabie saoudite s’est appliquée, à la faveur de la nouvelle guerre du Yémen, à aménager une plate-forme opérationnelle pour Al-Qaïda, son ennemi intime, dans la Hadramaout (Sud-Yémen) afin de disposer d’un débouché maritime qui lui permettrait de contourner le détroit d’Ormuz, à portée de tirs de l’Iran.
Au Sud Yémen même, une sourde lutte d’influence oppose d’ailleurs l’Arabie saoudite et Abou Dhabi sur le degré de coopération avec le parti Al-Islah, bête noire d’Abou Dhabi, en superposition à un conflit latent entre les Frères Musulmans et « Al-Qaïda pour la Péninsule Arabique » pour le contrôle du sud Yémen. Les Émirats ont d’ailleurs suspendu leur participation à la guerre le 16 juin 2016, au terme de 15 mois d’engagement, laissant sur le tapis 52 tués, et 3 hélicoptères abattus.
Le Hadramaout est ainsi tombé sous la coupe d’Al-Qaïda. Paradoxalement, à la faveur d’un coup de pouce de la France, grâce à un mini débarquement des troupes pro saoudiennes à Aden, parties de la base militaire française de Djibouti et à l’encadrement français des troupes saoudiennes assuré par le contingent de la Légion étrangère stationné sur la base aéroterrestre française d’Abou Dhabi.
Le Hadramaout, la plus importante province du Sud Yémen, représentant le cinquième du territoire sudiste, est ainsi en passe de devenir un sanctuaire d’Al-Qaïda, qui y fait régner sa loi, accaparant ses richesses, le transit de marchandises via le port de Moukalla et les royalties prélevées sur le transit du pétrole.
Le Hadramaout est à Al-Qaïda ce que le Nord de la Syrie est à Daesh, un levier terroriste aux mains des Saoudiens quand Daesh remplit une fonction identique pour le compte de la Turquie.
Français et Saoudiens projetaient d’aménager une plate-forme territoriale pour le président yéménite en exil, Abdel Rabo Mansour Hadi, afin d’y asseoir symboliquement son pouvoir sur le territoire national, mais, en embuscade, Al-Qaïda a raflé la mise, dans un mauvais remake d’un mauvais film. Les belligérants saoudiens et leurs alliés français paraissent avoir perdu de vue le fait que le Yémen est la patrie d’origine du fondateur d’Al-Qaïda, Oussama Ben Laden.
Embourbée depuis deux ans au Yémen, en dépit de l’armada qu’elle a mobilisée, la dynastie wahhabite baigne dans la plus grande confusion, s’appuyant ainsi sur le mouvement Al-Qaïda, de même que sur le parti Al Islah, proche des Frères musulmans, deux formations inscrites sur la liste noire des pétromonarchies, promues à nouveau au rang de partenaires de l’ombre.
La guerre frontale contre le Yémen visait à terrasser le petit voisin, afin de l’arrimer définitivement à la sphère d’influence saoudienne et à l’aseptiser de toute velléité contestataire. A défaut, la dynastie wahhabite chercherait à provoquer une nouvelle partition du Yémen, pour réinstaller son homme de paille, le président Abd Rabbo Mansour Hadi, qui a déserté le pouvoir sous les coups de butoir de ses adversaires Houthistes.

LE BILAN AU TERME DE 18 MOIS DE CONFLIT

Une enquête du Guardian en coopération avec le Yemen Data Project soutient que plus du tiers des attaques aériennes menées par l’Arabie saoudite ont visé des sites civils et pas de sites militaires tenus par les rebelles chiites.

  • Au moins 8. 600 bombardements aériens ont été menés par la coalition saoudienne : 3.577 ont touché des sites militaires et 3.158 des sites « non militaires »
  • Au moins 942 bombardements ont visé des zones résidentielles, 114 des marchés, 34 des mosquées, 147 des infrastructures scolaires et 26 des universités

En savoir plus

La guerre du Yémen a fait près de 10.000 morts depuis le 25 mars 2015, selon un bilan des Nations Unies publié le 30 août 2016, au terme de 18 mois de conflit.
Ce bilan, le dernier en date d’une instance officielle internationale, ne précise pas la proportion de civils parmi les victimes. Il représente plus du double de celui qui était jusqu’à présent dressé par les responsables et organisations humanitaires.
Ce bilan est susceptible de s’alourdir car certaines régions sont privées d’infrastructures médicales et les victimes sont parfois inhumées sans avoir été enregistrées, a précisé le coordonnateur humanitaire de l’ONU, Jamie McGoldrick.
Au conflit armé s’est ajoutée une grave crise humanitaire et alimentaire frappant la population yéménite. Le conflit a provoqué le déplacement de trois millions de Yéménites et contraint 200.000 personnes à l’exil. Sur une population de 26 millions d’habitants, 14 millions ont besoin d’une aide alimentaire, tandis que sept millions souffrent de l’insécurité alimentaire et que que plus de 21 millions de personnes (soit 80% de la population du pays) sont privées d’un accès suffisant aux denrées et aux services de première nécessité, eau potable, soins médicaux, électricité et fuel. Plusieurs hôpitaux ont été bombardés en 2016, poussant l’ONG Médecins sans frontières à évacuer son personnel de six centres de soins le 18 août 2016.

UNE GUERRE À HUIS CLOS

La guerre du Yémen se déroule à huis clos. Aucune voix de la grande conscience humaine, pas plus Bernard Kouchner, Fondateur de « Médecins sans frontières », que Bernard Henry Lévy, le théoricien du botulisme, n’ont pris la peine de dénoncer ce massacre en circuit fermé, encore moins Laurent Fabius, l’ancien ministre des Affaires étrangères, dont les partenaires syriens d’Al Qaida, Jabhat an Nosra, font du « bon travail en Syrie».
Au terme de deux ans de boucherie en circuit fermé, les Nations Unies ont donné à savoir que l’Arabie Saoudite avait utilisé des armes non conventionnelles (armes à sous-munition, voire armes chimiques) et pourrait s’être rendue coupable de crimes de guerre voire de crimes contre l’humanité. Mais le Royaume, fort de sa puissance financière, a menacé de couper les vivres à l’ONU et à la totalité des agences spécialisée, notamment l’UNRWA (Agence de Secours pour les Réfugiés Palestiniens) s’il devait faire l’objet de poursuites.
Pis la dynastie wahhabite a laissé planer la menace d’une Fatwa d’Oulémas Sunnites décrétant l’ONU « Ennemi de l’islam». Un comportement digne d’un état voyou.
Le bombardement d’un 4 me hôpital géré par « Médecins sans frontières » au Yémen –un hôpital pour enfant- en Août 2016, sera fatal à la réputation saoudienne, entraînant le départ partiel des conseillers militaires américains, soucieux de ne pas cautionner des « crimes de guerre».
Le bombardement d’une cérémonie funéraire, le 8 octobre 2016 à Sanaa, qui a fait 140 morts parmi les civils, a accentué les préventions occidentales, à l’égard de la conduite de la guerre par les Saoudiens, incitant les États Unis à se démarquer encore plus de leurs alliés pétro monarchiques en spécifiant publiquement que la coopération saoudo américaine dans ce domaine ne constitue pas « un chèque en blanc».
Camouflet supplémentaire, une immense manifestation de soutien aux Houthistes a eu lieu samedi 20 août 2016 à Sanaa, contrôlée par les rebelles chiites alliés à l’ancien président Ali Abdallah Saleh depuis septembre 2014, en réplique aux bombardement réguliers de la ville par les Saoudiens.

LE PRÉSIDENT NOMINAL DU YÉMEN EN EXIL EN ARABIE SAOUDITE ET LE CHEF DES FRÈRES MUSULMANS YÉMÉNITES, EN EXIL EN TURQUIE

La réunion quadripartite le 26 Août à Djeddah entre John Kerry et ses collègues d’Arabie Saoudite, des Émirats Arabes et du Royaume Uni en vue de dégager une « sortie de crise honorable » pour les pétromonarchies a suscité de vives réactions des autres protagonistes islamistes redoutant leur mise à l’écart.
Daech a revendiqué trois jours plus tard, le 29 Août, un attentat à Aden faisant 60 morts parmi les recrues de la nouvelle armée yéménite commanditée par les Saoudiens et le Chef du Parti Al Islah, Mohammad Abdallah Al Badoumi, depuis sa résidence de Turquie, a annoncé la constitution d’un Front des groupements islamistes radicaux yéménites, par l’alliance de son mouvement avec le groupement salafiste, le Parti Al Rachad (la sagesse), en vue de mener une guerre confessionnelle de longue durée contre les Houthistes.
Pour le lecteur arabophone http://www.al-akhbar.com/node/263964
Drôle de pays dont le président nominal Abdel Hadi Abed Rabbo Mansour vit en exil à Djeddah sous les fourches caudines de son parrain saoudien et le chef des Frères Musulmans yéménites, un des acteurs majeurs du théâtre des opérations,vit, lui, en exil en Turquie sous la houlette de son mentor néo-ottoman… tels de fantoches manipulés par leurs commanditaires

LA LOI JASTA : UNE TUILE SUPPLÉMENTAIRE

Tuile supplémentaire : Alors que le Royaume est enlisé dans un conflit sans fin au Yémen, le congrès américain a en effet voté La Loi JASTA [Justice Against Sponsors of Terrorism Act]. L’adoption de cette loi le 9 septembre 2016 autorisant les Américains à poursuivre le Royaume saoudien en dédommagement des dégâts subis par les pirates de l’air, a placé l’épée de Damoclès en suspension au dessus de la dynastie wahhabite.
15 des 19 auteurs des attentats du 11 septembre à New York et Washington étaient Saoudiens. L’attaque a été commanditée par Al-Qaïda. Les raids contre les symboles de l’hyperpuissance américaine avaient fait 3.000 morts.
La Mairie de New York, réclame à elle seule un dédommagement de 95 milliards de dollars en compensation de la destruction des tours du World Trade Center, des destructions annexes et les pertes humaines des services publics (pompiers, policiers). Au total, le préjudice américain est estimé à près de Trois trillions de dollars (trois mille milliards de dollars).
À l’image de son partenaire saoudien, le pouvoir socialiste français baigne lui aussi dans la confusion la plus totale, car son alliance avec l’incubateur du djihadisme planétaire obère son discours sur une « guerre de civilisations », que Manuel Valls, Premier ministre, ne souhaite pas perdre. En s’alliant avec ses ennemis ? En une nouvelle illustration de la rationalité cartésienne ?
L’Arabie Saoudite s’est imposée sur le marché international des armes comme la deuxième puissance importatrice, derrière l’Inde, avec 9,7 milliards d’euros d’armes importées entre 2010 et 2015, selon Amnesty International. Ce chiffre ne tient pas compte des armes légères. Parmi les plus gros exportateurs mondiaux, figurent, par ordre décroissant, les États-Unis, la Russie, la Chine, l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni.
L’action du gouvernement François Hollande a été particulièrement fructueuse sur ce plan, avec un record de 15 milliards d’euros de commandes d’armement signées en 2015, suivie par les États-Unis (6 milliards de dollars) et le Royaume Uni (4 milliards), selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri).
« Le Yémen est le cimetière de ses envahisseurs. Évitez le». Recommandation du Roi Abdel Aziz Al Saoud, fondateur de la dynastie wahhabite, à ses héritiers. Visiblement les héritiers n’en ont cure de ce conseil et ils en paient le prix…. au prix fort.
Quatre pétro monarchies (Arabie, Qatar, Koweït, Émirats Arabes Unis) ont conclu en 2016 des transactions militaires de l’ordre de 40 milliards de dollars avec les États-Unis. Cette transaction d’une telle importance intervenant en pleine récession économique de ces pays, -de surcroît protégées par un chapelet de bases militaires le long du golfe arabo-persique-, apparaît comme une police d’assurance contre toute tentative de déstabilisation de ces pays, alors que l’Arabie et le Qatar sont particulièrement dans le viseur de l’opinion internationale pour leu rôle dans la promotion du terrorisme islamique à l’échelle internationale.
Riyad et Doha passent pour avoir dépensé, à eux deux, près de quarante milliards de dollars en six ans, dans les guerres de Libye, de Syrie et du Yémen. Pour la plus grande satisfaction de l’Otan et d’Israël, un état supposé être l’ennemi officiel du Monde arabe.
La moralité -tout le moins la morale du grand capital- qui pourrait se dégager de la guerre du Yémen est la suivante : Le dollar est Roi et le Roi du pétrodollar s’intronise ipso facto le Roi des Rois, tout en recyclant au passage ses pétrodollars dans les circuits de la finance mondialisée. Une morale de voyous d’un état voyou.
Source : Madaniya, René Naba, 24/03/2017
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