Les prisons françaises face à la crise : état des lieux

En France, comme chacun sait, les prisons sont saturées, et ce, en dépit du fait que les condamnations à moins de 2 ans sont aménagées, en dépit du fait que les peines ne sont pour ainsi dire jamais effectuées dans leur totalité et en dépit du fait que des condamnés multi-recidivistes (parfois des dizaines de mentions au casier) n'y séjournent parfois jamais. Face à la crise, certains pays comme l'Iran ont décidé de gracier 10 000 détenus. Alors que nous n'en sommes qu'au début d'une quinzaine de confinement (qui durera vraisemblablement davantage) et que les visites au parloir ont été suspendues, les premiers incidents ont commencé dès le premier jour : * A Anger : l'intervention des ERIS (Équipes Régionales d'Intervention et de Sécurité) a été nécessaire à la maison d'arrêt (Ouest-France) : "Nous avons une cinquantaine de détenus sur une cour de promenade qui refuse de réintégrer les cellules" a déclaré la responsable. Selon le quotidien régional ils scandent "Remettez nos parloirs !" * A Maubeuge et Douai : Même incidents avec là encore intervention nécessaire de l'ERIS * A Grasse (mardi matin) : Une mutinerie s'est déclenchée avec une soixantaine de détenus qui ont envahi un bâtiment de la prison. Alors qu'ils se trouvaient en promenade, ils ont fracturé les portes et se sont retrouvés dans les couloirs de la prison. Un surveillant a été évacué en urgence d'un poste de contrôle. Aucun agent n'a été en danger d'après le syndicat FO pénitentiaire. Les forces de l'ordre de Grasse ont été dépéchées sur place afin de venir en aide aux surveillants qui ont effectué 4 tirs de sommation. La situation extrêmement tendue a pu être maitrisée. * A Fresnes (deuxième prison la plus importante d'Europe) : 5 cas ont été confirmés, un détenu âgé de plus de 70 ans est décédé et une centaine de détenus étaient à l'isolement mardi soir. La situation y est particulièrement tendue avec des centaines de détenus placés soit à l'isolement soit en quarantaine. * A Perpignan : Une centaine de détenus ont refusé mardi de réintégrer leurs cellules. Selon le syndicat Force Ouvrière Pénitentiaire les surveillants de l'établissement ont pu se mettre en sécurité et les forces de l'ordre sur place afin de sécuriser les lieux et aider les surveillants de la prison ont pu rétablir l'ordre. * A Épinal : Lundi, durant l'après-midi, 25 détenus ont refusé de réintégrer leur cellule, un mouvement de protestation lié aux conditions de leurs incarcérations. À 18h05, 8 détenus avaient réintégré mais 17 détenus bloquaient toujours l'établissement. À 19 heures, l'ensemble des détenus avaient réintégré leurs cellules. Aucun blessé à déplorer. * Valence (lundi après-midi) : Un surveillant a été testé positif au coronavirus. Sur la structure de Paris-la-Santé, un détenu était suspecté d'être contaminé. Selon les informations d'actupenit.com il a été placé seul en cellule au niveau du quartier d'isolement. * A Argentan (jeudi) : Quinze détenus de la prison ont refusé de réintégrer leurs cellules et sont montés sur le toit de la salle polyvalente vers 15H15. D'après les informations d'Actu.fr, de nombreux policiers et gendarmes ont été sollicités ainsi que les Équipes Régionales d'Intervention et de Sécurité de Rennes (ÉRIS35). Une note du 15 mars 2020 de la direction de l'administration pénitentiaire qui édite les initiatives à prendre localement afin de contrer la prolifération du virus Covid-19 dans les détentions métropolitaines et d'Outre-Mer a été diffusée mais au lundi 16 mars, très peu d'établissements avaient pris des mesures de sécurité selon le Syndicat FO qui a estimé que le personnel, tout comme la population pénale étaient en danger. Il a réclamé alors un confinement total des prisons françaises. « l'arrêt pur et simple de toutes les activités et des parloirs dans les établissements de métropole et d'Outre-Mer doit être imposé ainsi que la limitation des déplacements au strict minimum des détenus, la gestion « portes fermées » doit être la règle ! Un plan de déploiement de matériel de protection (masques et gel hydroalcoolique) doit être effectif pour l'ensemble des personnels exerçant leurs missions. La direction de l'Administration Pénitentiaire doit aussi recenser immédiatement tous les personnels ayant une situation de santé à risque afin de les protéger, comme l'a demandé le Président de la République jeudi dernier. ». Les journalistes de France Inter ont joint par téléphone des détenus : l'un d'eux à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis a expliqué qu'afin d'éviter les crispations, la direction de la prison avait augmenté le nombre de promenades. "Aller au parloir, c'est un réconfort. On voit sa famille, on prend des nouvelles. Et là, je n'ai plus le droit d'aller voir ma femme, mes enfants. C'est très très dur.". Un autre incarcéré à la maison d'arrêt de Villepinte a expliqué que sa sœur était contaminée par le Coronavirus et qu'il se sentait impuissant et isolé. Il a aussi affirmé que la tension était montée d'un cran : "Là, ça va vraiment basculer dans une petite guerre à l'intérieur de la prison. Il y a déjà eu des tensions, des gens qui criaient, tapaient sur les portes". "80% des détenus font entrer leur cannabis au parloir". D'où la question : Combien de temps les prisons françaises vont-elles tenir ? Sources : actupenit.fr, France Inter, actu.fr
Voir en ligne : https://www.agoravox.tv/IMG/jpg/eris-prison-argentan.jpg

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