Source : Graham E. Fuller, 03-05-2018
Je suis peut-être naïf, mais j’ai le sentiment que quelque chose de profond est peut-être en cours avec la récente et importante vague d’activités diplomatiques entourant le dirigeant, autrefois reclus, Kim Jong Un ; cela pourrait représenter un tournant dans la géopolitique de l’Asie de l’Est.
En Occident, on nous présente depuis longtemps des images de Kim qui suggèrent un leader immature, excentrique, voire bizarre, déconnecté des réalités du monde. En fait, bon nombre de ses déclarations au cours des dernières années ont été formulées dans le langage idéologique désuet d’un régime communiste isolé. Kim a également été grandiloquent et extrême dans ses discours – parfois égalé par une rhétorique américaine enflammée. Mais les actions de Kim au niveau diplomatique depuis les Jeux Olympiques sud-coréens de janvier ont été impressionnantes, tant dans la conception que dans l’exécution adroite. Il a démontré des capacités et un niveau d’engagement personnel et public international jamais vu auparavant chez un dirigeant nord-coréen. Il a l’air de s’en délecter.
Il y a d’abord eu l’offensive de charme de Kim par l’envoi de sa sœur aux Jeux olympiques d’hiver sud-coréens, offrant un contraste frappant avec l’apparition publique du renfrogné et peu gracieux vice-président Pence. Kim a ensuite exprimé sa volonté de rencontrer le président sud-coréen Moon Jae-in, suivi d’un voyage surprise à Pékin pour rencontrer publiquement le président chinois Xi Jinping. A Pékin, Kim a reçu un traitement de haut niveau marquant l’aplanissement considérable des relations jusqu’alors froides avec Pékin, dont le dirigeant avait déjà suivi les sanctions de l’ONU contre la Corée du Nord. Et finalement est venu le sommet très chorégraphié et spectaculaire d’avril entre les présidents Kim et Moon, au cours duquel le langage corporel et les images semblaient d’une nouveauté saisissante. Il ne fait aucun doute que leurs nombreuses réunions au fil des jours ont été soigneusement scénarisées, mais cela a quand même laissé une forte impression de quelque chose de nouveau et de plus spontané.
De nombreux spécialistes chevronnés de la Corée aux États-Unis nous avertissent que nous avons déjà vu tout cela de la part de dirigeants nord-coréens antérieurs, mais que Pyongyang a ensuite renié ses engagements et que les négociations se sont révélées n’être rien de plus qu’une imposture. Cela est vrai, bien que la responsabilité de ces échecs diplomatiques n’incombe pas uniquement à la Corée du Nord. Et un échec du sommet Trump-Kim ne peut certainement pas être exclu ; en effet, la réunion peut être sabordée à l’avance si les deux parties sont trop obstinées ou estiment qu’elles ont trop à perdre.Lire la suite
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