Les USA brandissent à nouveau les armes chimiques pour justifier leur Choc des Civilisations

Les ambassadeurs américains et boliviens à l’ONU
Ce vendredi 8 avril, le Conseil de Sécurité de l’ONU se réunissait en urgence suite à la frappe américaine sur une base militaire syrienne. L’ambassadrice des Etats-Unis, Nikki Haley, a brandi des photos de civils syriens morts pour tenter de justifier la décision américaine. L’ambassadeur bolivien Sacha Llorenti a, de son côté, montré la fameuse photo de 2003, où l’on voit Colin Powell à l’ONU brandir une fiole d’anthrax ; ce qui, en des termes peu diplomatiques, pourrait signifier « arrêtez de nous prendre pour des imbéciles ».
En effet, à l’époque, le gouvernement de Georges W. Bush avait copieusement menti au monde entier (et à son propre peuple) au sujet de prétendues armes de destruction massive détenues par Saddam Hussein, tout cela afin de justifier l’intervention militaire américaine en Irak. Il s’est avéré que ces accusations étaient fausses, et largement fabriquées.

Pourquoi les États-Unis veulent-ils la guerre (mondiale) ?

Pour comprendre l’attitude belliqueuse et l’obstination guerrière actuelle des États-Unis, il est insuffisant d’incriminer l’administration Trump, ou bien le « complexe militaro-industriel » américain, bien qu’ils aient chacun leur part de responsabilité. En effet, la récente agression américaine en Syrie s’inscrit dans une longue liste d’interventions militaires occidentales dans des pays musulmans, à commencer par l’Afghanistan envahie par les USA dès 2001.
On pourrait croire qu’à chaque guerre (Irak, Liban, Palestine, Libye, Mali, Syrie, Yémen…), les armées française, anglaise, israélienne et américaine (et maintenant saoudienne) ne font que « réagir », pour « venir au secours des populations locales ». En réalité, ce discours officiel qu’on entend dans les médias occidentaux cachent mal une réalité beaucoup plus sombre. Ces guerres néo-coloniales constituent les différentes étapes d’un plan prévu de longue date. Le reste n’est qu’un « story-telling » de mauvais goût, et qui ne trompe plus grand monde.
Voici le témoignage-clef qui, personnellement, m’a mis la puce à l’oreille.

2007 : le témoignage choc du général américain Wesley Clarke

Lors d’une conférence donnée à San Francisco le 3 octobre 2007, Wesley Clark, général 4 étoiles retraité des Forces armées des Etats-Unis, affirme que dix jours seulement après le 11 septembre 2001, les invasions de sept pays dont l’Afghanistan, l’Irak, la Libye, la Syrie et l’Iran, avaient déjà été planifiées par le Pentagone. Rappelons que si d’importantes personnalités saoudiennes ainsi qu’une partie des services secrets pakistanais semblent impliqués dans l’attaque du 11 septembre, en revanche aucun des pays visés par ces guerres ne le sont. On peut donc constater que, si choc des civilisations « Occident contre Islam » il y a, il semblerait que ce soient les élites occidentales qui en soient les premières (voire les uniques ?) responsables.

Années 1970 : le Choc des Civilisations, par Bernard Lewis

Le concept de choc des civilisations, Occident contre Islam, a été popularisé par le professeur américain Samuel Hungtington, auteur du livre « Le Choc des civilisations » paru en 1996. Mais il est encore plus intéressant de s’intéresser à un personnage moins connu : son mentor, Bernard Lewis. Né en 1916 à Londres, Lewis est un historien, professeur émérite des études sur le Moyen-Orient à l’université de Princeton, spécialiste de la Turquie, du monde musulman et des interactions entre l’Occident et l’Islam. De citoyenneté britannique à sa naissance, il a aujourd’hui la double nationalité américaine et israélienne.
Dès les années 1970, Lewis avait envisagé de remodeler le Grand Moyen Orient selon ses vues, qui s’accordaient très bien avec celles de ses amis néo-conservateurs et sionistes de l’époque. Il est à noter que Bernard Lewis fut conseiller du Conseil national de sécurité américain alors présidé par Zbigniew Brzezinski ; Lewis fut également le conseiller de Benjamin Netanyahou, lorsque ce dernier était ambassadeur auprès de l’ONU. Voici donc cette fameuse carte :
Carte du Grand Moyen Orient selon Bernard Lewis

1982 : le Plan Oded Yinon

Ce sont les mêmes cercles de pouvoirs qui ont commandé la publication en 1982 du plan Oded Yinon, qui prévoyait l’annexion par Israël de plusieurs territoires voisins, afin de parachever le rêve sioniste de la reconquête « d’Eretz Israël » (le « Grand Israël »). Pour atteindre les frontières bibliques, on voit clairement qu’Israël doit conquérir tout ou partie de l’Egypte, la Jordanie, l’Irak, le Liban et la Syrie.
Une carte présentant le territoire d’ « Eretz Israël », du Nil à l’Euphrate.

1998 : le PNAC

Pour mieux comprendre les visées hégémoniques de l’administration Bush Junior, il est intéressant de se pencher sur le  rapport du PNAC. En effet, le « Plan for a New American Century » ou plan pour un nouveau siècle de domination américaine sur le monde, est un document publié en 2000 et co-signé notamment par Dick Cheney, Donal Rumsfeld et Paul Wolfowitz, qui seront un an plus tard les plus hauts responsables de l’administration de George W. Bush. Ce fameux rapport estimait que « le processus de transformation, même s’il apporte un changement révolutionnaire, sera probablement long en l’absence d’un événement catastrophique et catalyseur – comme un nouveau Pearl Harbor ».

2006 : les cartes « avant » et « après » de Ralph Peters

Alors que l’US army est engagée en Irak depuis 2003, les cartes « before » et « after » (« avant » et « après ») sont publiée dans une revue militaire américaine, AFJ (Armed Forces Journal), en juin 2006 sous la plume d’un lieutenant-colonel américain à la retraite, Ralph Peters. Elles montrent la volonté de certains faucons américains de remodeler le Grand Moyen Orient, et de diviser notamment des pays comme l’Irak, la Syrie, et l’Arabie Saoudite en plusieurs petits pays. On voit même qu’un état spécifique est prévu pour la Mecque.
Carte « after » de Ralph Peters
Carte « before » de Ralph Peters

Le rôle de Benjamin Netanyahou

Pourquoi Donald Trump qui, une semaine plus tôt, déclarait par le biais de son ambassadrice à l’ONU que le départ de Bachar Al-Assad n’était pas une priorité, décide-t-il brusquement de bombarder une base aérienne syrienne ? D’après nos sources, le président américain ne lirait même pas les notes de synthèse que lui préparent ses différents services de renseignement. On peut donc légitimement penser que son entourage a sur lui une influence importante concernant ses prises de décision, notamment sur les questions internationales.
Certains observateurs ont noté le récent revirement à la Maison Blanche de Steve Bannon, qui a perdu son poste et son influence, lui qui était en faveur d’un rapprochement avec la Russie, ce qui induisait de devoir trouver un terrain d’entente sur le dossier syrien. Ce revirement renforce un peu plus l’influence à la Maison Blanche de Jared Kushner, gendre de Donald Trump et ami de Benjamin Netanyahou.
J’avais publié un long article en 2015 pour expliquer en quoi et pourquoi l’actuel premier ministre israélien serait, d’après moi, un grand promoteur du choc des civilisations « Occident contre Islam ». Je voudrais ici rappeler que Benjamin Netanyahou est capable de manipuler diplomatiquement ses alliés, y compris américain, en fonction de ce qu’il croit être les intérêts d’Israël. J’en veux pour preuve cette vidéo, dans laquelle on peut l’entendre se venter d’avoir manipuler Bill Clinton avec les accords d’Oslo. En fait, il explique tranquillement comment il a réussi à duper tout le monde : Yasser Arafat, les palestiniens, Bill Clinton, les USA, l’ONU…

Trop de mensonge tue le mensonge

Malheureusement pour ces plans de démantèlement d’états-nation et de conquêtes, internet est passé par là, et la majorité des citoyens y compris dans les pays occidentaux ne font plus confiance aux discours politiques et médiatiques. Trop de « bébés jetés hors des couveuses » (mensonge servi à l’ONU par Georges Bush père pour justifier la première guerre d’Irak dans les années 1990), trop de fioles d’anthrax agitées à l’ONU. La coupe est pleine. C’est, en des termes plus diplomatiques que ceux que j’ai proposés dans mon introduction, ce qu’a certainement voulu signifier l’ambassadeur de la Bolivie auprès de l’ONU.
Raphaël Berland
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