Source : Le Monde diplomatique, Frédéric Lordon
Nicolas Hulot, passé à l’état de flaque de sirop, est répandu partout dans la presse. Macron laisse entendre qu’il réfléchit à un « green deal à la française ». Sur l’échelle ouverte de Richter du foutage de gueule, on se prépare des sommets — et les « jours heureux » nous sembleront comparativement un modèle de sincérité. Pendant ce temps, des économistes rêvent éveillés de « monnaie verte ». Benoît Hamon sort de son catafalque. On ne parlera plus bientôt que de « transition », comme déjà l’Union européenne sous les avisés conseils de BlackRock. Comme avec « l’Europe sociale et démocratique », mais un niveau au-dessus, on essaye de nouveau d’estimer le temps que toutes ces imbécillités vont nous faire encore perdre.
La transition n’est pas une question « écologique » (pour « écologistes »). Il ne s’agit pas de transiter vers un « capitalisme-respectueux-de-l’environnement » — on appelle « quadrature du cercle » les projets de transition vers les cercles carrés, et ça n’a jamais très bien fonctionné. Il ne s’agit pas de sortir du capitalisme « pas encore vert ». Il s’agit de sortir du capitalisme tout court.
Une transition de cette nature se réfléchit alors autour de trois grandes questions, toutes liées à la division du travail : 1) ce qu’on en garde, et ce qu’on en jette — le plus possible : nous avons sur les bras une planète qui tourne tantôt à l’incendie tantôt à la boîte de Pétri géante. 2) Le fait que la division du travail, spécialement sous la contrainte du « à garder », nécessite d’interroger la solution des autonomies locales. 3) Les nouveaux rapports sociaux dans lesquels la couler — pour qu’elle ne soit plus une division du travail capitaliste — et, d’abord, les fausses solutions qui rôdent en cette matière.
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