Jacques Sapir par Franck ABED

Questions : 1. Un homme d'affaire milliardaire a été élu Président des Etats-Unis. Comment expliquez-vous qu'un magnat de l'immobilier, immensément riche puisse être considéré comme une personne antisystème, par la presse et les observateurs politiques, alors que par sa situation sociale et familiale, il est un pur produit du système américain, notamment du rêve américain. En effet, il est petit-fils d'immigrés allemands, a dirigé pendant une décennie une émission de téléréalité suivie par plus ou moins 30 millions de personnes etc. Comment expliquez-vous qu'il soit vu comme un rebelle ? 2. Aux Etats-Unis, être fortuné signifie "avoir bien travaillé", alors qu'en France, cela signifie "avoir bien magouillé". Le rapport à l'argent reste très différent entre nos deux pauys. Aux USA ceux qui réussissent sont encouragés, vantés, célébrés, en France, ils sont bien souvent critiqués, jalousés, et on a souvent tendance à minimiser leur réussite. D'où vient cette différence de perception sur la réussite et l'argent entre nos deux pays ? Cela tient-il au protestantisme, au catholicisme ou à un autre facteur ? Par ailleurs Balzac disait derrière chaque fortune il y a un crime. 3. Nous sommes à quelques jours du premier tour de la primaire de la droite et du centre. De mon point de vue, les primaires aggravent les vices du régime des partis. Fondamentalement je ne crois pas à la rencontre démocratique d'un homme et du peuple via les urnes, mais que dire d'un système de l'aveu même d'Henri Guaino qui promeut les combinaisons, les pressions, les menaces. Sans rentrer dans le détail des programmes et des personnalités, car cela n'est pas intéressant, les primaires ne sont-elles pas l'expression même de l'illusion de la démocratie et la mise en avant des tares précédemment décrites ? En effet, seules les pontes des partis peuvent se présenter aux primaires, tout comme à l'élection présidentielle, où en théorie tout le monde (sous certaines conditions d'âge et de respect de la loi) peut se présenter, mais finalement seuls les poids lourds des grands partis peuvent se lancer dans la bataille présidentielle. Partagez-vous cette idée que les primaires sont de fait une farce démocratique pour amuser la galerie, le bon peuple ? 4. Jean-Marie LE PEN est profondément républicain, un républicain authentique si je puis dire, avec toutes les qualités et les défauts que cela comprend. Pourtant dans la gestion de son mouvement, et notamment dans le cadre de sa succession, on peut aisément dire qu'il l'a joué monarchique en adoubant, et j'emploie ce mot à dessein, sa fille, alors que celle-ci au moment des faits, était loin de faire l'unanimité au sein des militants, ces derniers préférant Gollnisch. A l'aune de cet exemple, parmi d'autres, sans oublier que la petite-fille de Jean-Marie est considérée comme la future héritière potentielle de Marine, ne peut-on pas considérer que la transmission héréditaire (même élargie) d'un pouvoir, notamment en politique, est en quelque sorte naturelle et donc logique ? 5. Dans la présentation de l'un de nos entretiens écrits, vous aviez déclaré la chose suivante : « ses positions sont éloignées des miennes sur de nombreux points : il est profondément catholique, et je suis quant à moi non moins profondément athée ». Dans l'histoire de l'humanité, toutes les grandes civilisations, tous les régimes politiques ayant laissé des traces positives dans l'histoire (Babylone, Athènes, Rome, et les monarchies européennes) avaient tous une sensibilité religieuse plus ou moins prononcée. Comment l'expliquez-vous ? Et d'une manière générale d'où vient votre athéisme ? 6. Dans la Grande fiction, sous-titré l'Etat cet imposteur, le professeur Hoppe écrit la chose suivante : « La propriété privée est plus productive. Ce qui est détenu en commun par la multitude fait l'objet d'autant moins de soin. Les hommes font très attention à ce qui leur appartient. » Il précise son argumentation de la manière suivante : « En outre, la propriété privée a existé partout et toujours, alors qu'aucune utopie communiste n'a jamais agi spontanément, où que ce soit. Enfin la propriété privée favorise les vertus de charité et de générosité. Elle permet à son détenteur d'agir ainsi à l'égard de ses amis qui se trouveraient dans le besoin. » Qu'en pensez-vous ? 7. Lorsqu'on étudie l'Antiquité, il est impossible de faire l'impasse sur la guerre du Péloponnèse entre Athènes et Sparte. Dans les milieux intellectuels, notamment universitaire, Athènes est largement préférée. Comment expliquez-vous cet état de fait ? Et vous quel est votre avis ?
Voir en ligne : http://www.agoravox.tv/IMG/jpg/jacques-sapir-franck-abed.jpg

Source