Le modèle déchu

Certains pourraient croire que cet article est spécifiquement anti-Macron, et pourtant...
Cet article ne prétend être que la dénonciation de près de quarante ans de continuité dans l'application de compromis utopiques, voire délibérément délétères, que ce soit pour le développement économique et social du pays, ou même pour sa stabilité et sa subsistance. La social-démocratie française - drapée de son image fourre-tout du « progressisme » - a été l'une des premières à s'imposer orgueilleusement comme un modèle indiscutable. Mais la voici rattrapée par de multiples autres en Europe qui ont pris le même chemin et connaissent les mêmes problèmes. Au delà des explications mono-causales des partis Je m'étais certes déjà exprimé quant au premier point, le plus pratique et matériel. C'est celui qu'on aborde en général : Cette situation budgétaire désespérée obligeant les tricheurs à procrastiner depuis trente ans sans savoir mettre fin à la coexistence impossible entre social-démocratie et libre-échange[1]. Même s'il ne s'agit pas du seul problème que la France et l'Europe connaissent il reste très sérieux. Il semble qu'aujourd'hui l'ampleur et la durée des contestations en France aient poussé Macron à poursuivre cette dissimulation de moins en moins efficace, encore une fois par l'achat d'une très relative paix sociale [2], cette fois moins par la dette que par le bradage des seuls biens de l'État qui rapportaient. Une mesure à très court terme. La mise au régime de CERTAINS services publics reste quant-à-elle dans la longue continuité du programme déjà amorcé depuis près de dix ans. C'est dire si toutes les autres cartouches utilisées pour cheminer discrètement vers les GOPE [3] ont été tirées ! A défaut du néolibéralisme pur et dur prévu pour ce quinquennat, nous aurons donc encore durant un moment du « entre-deux » . Mais l'européiste convaincu ou l'euro-acceptant qui prendra le mandat suivant avec le chargeur vide ne connaît pas son futur malheur. Le peuple qui l'aura élu ne connaît pas le sien non plus. La continuation de ce long travail d'hypocrite ne sera pas chose facile : Mais l'utopie de la social-démocratie à la fois providence et à la fois basée sur le consumérisme n'est pas le seul échec grave que nous connaissons, et beaucoup l'ont déjà remarqué. Chacun tentera d'avancer une cause essentielle au deuxième point que nous allons aborder, bien que je considère personnellement de multiples causes. Mais il est de plus en plus visible que notre pays qui se targue d'être un « Etat de Droit » en donne de moins en moins l'image, et ceci pour diverses raisons. C'est le cas au point que certains pourraient être amenés à se demander s'il faut vraiment être un Etat de Droit. Là aussi, le phénomène n'est pas nouveau : Depuis trente ans nous entendons parler des Droits de l'Homme, surtout et avant tout quand il s'agit de faire preuve de mansuétude envers un certain type de délinquance. Tant que celle-ci ne menace pas le pouvoir en place, bien sûr. Beaucoup pointent du doigt la réelle « délinquance en col blanc », mais cette dernière ne doit pas être prétexte à occulter celle qu'endurent de plus en plus directement ceux qui n'ont pas les moyens de s'échapper de leurs quartiers. Ici pas de LBD et même pas de matraque : Et pour cesser toute fausse polémique : Les deux milieux ne sont d'ailleurs pas si différents et fricotent même parfois ensemble, rappelons le : Si le démarrage de cette opération « amour de la délinquance » s'est opéré dans les années 80, probablement pour des raisons idéologiques hors sol propres à la gauche institutionnelle et aux trotskystes, elle s'est ensuite perpétuée avec la droite libérale : Raisons soi-disant économiques (ça dépend pour la poche de qui), et peur de laisser le monopole du « coeur » à la gauche, bien entendu. A chaque fois ce sont les chantres du pardon eux-mêmes (pardonnant au nom des autres, bien entendu) qui ne manquent pas l'occasion d'assimiler certaines communautés à la délinquance, sous prétexte d'en faire une circonstance atténuante. Evidemment dans l'espoir de faire taire toute contestation du laxisme alors aussitôt assimilée à du racisme. Ils ont si bien réussi que l'effet de cette association donne à présent lieu à un retour de manivelle explosif de la part de l'opinion publique. Nos éducateurs « tolérants » se demandent encore pourquoi, ils n'ont toujours pas compris ! Mais à présent, on en est à la troisième phase : La résignation devant l'impuissance, une fois devant le fait accompli. De plus en plus de gens s'aperçoivent que c'est déjà trop tard, sauf moyens de répressions radicaux (j'entends par là : vraiment radicaux). C'est donc à classer dans l'impossible. Un cumul un peu trop indigeste Il est en général possible de faire accepter à la population un seul des deux problèmes cités ici. Mais les choses se corsent quand le niveau de vie supposé si extraordinaire ne l'est plus assez pour déclarer à la population que « ça ne va pas si mal que ça et que ceux qui se plaignent peuvent aller voir comment ça se passe ailleurs ». Ce fameux niveau de vie, c'était le seul argument qui restait, outre le concept très vague de « liberté », qui nous différenciait des pays de grands méchants extérieurs désignés ! Et que dire alors si l'insécurité et l'impunité ne permettent même pas au citoyen trop ordinaire d'avoir quelques aspirations audacieuses de liberté politique... Liberté, tout un programme Je fais en effet allusion au terme « liberté politique » et non à ce vague terme de liberté d'expression qui peut englober, selon l'interlocuteur, le droit de mentir, de choquer gratuitement, de pervertir les enfants, de parler au monde entier de ses histoires de cul [4], d'inciter au meurtre... Bref, ces choses hélas trop légales dans la pratique (si vous faites partie de la catégorie appropriée) et que certains prétendent pourtant ne plus pouvoir faire, comme ces artistes trop vus qui vieillissent mal, au cerveau ramolli par leur vie de patachon. Les rappeurs, quant à eux, ne se gênent pas pour user et abuser de ce « droit », défendus encore une fois par la gauche bobo antinationale : Bref, la liberté c'est comme la justice : Elle n'est pas la même pour tout le monde, vous l'avez bien compris. Ce droit à choquer n'est certes pas nouveau car la mouvance « artistique » soixante-huitarde et libertaire s'était déjà engagée sur cette voie. Fugain faisait l'apologie d'une émeute avec pillages et viols de masse (cf. « C'est la fête »), Gainsbourg récidivait plusieurs fois, décennie après décennie, avec deux ou trois chansons notoirement pédophiles. Mais aujourd'hui, la seule raison pour laquelle ce genre de chose passe mal n'est pas le fait que ce soit immoral, comme le prétendent les nostalgiques du Cohn-Bendisme pourfendeurs de « puritanisme ». Sûrement pas. Ce n'est simplement pas « féministe » ! Le progressisme est à présent empêtré dans ses contradictions, si bien qu'il lui faut chercher des coupables conservateurs là où il n'y en a pas. Un violeur ou un terroriste sera appelé un « conservateur » par des militantes comme Fourest, et la société sera occupée à débattre à côté du vrai problème, comme dans 90 % des débats politiques télévisés. Inutile de dire que le concept de liberté s'est déjà envolé dans la stratosphère, tant on ne sait même plus de quoi on parle. A côté de cela, si on adopte ne serait-ce que certaines opinions économiques non conventionnelles, qu'on aborde des questions sociales, morales, voire même juste des questions internationales, le « cause toujours » laisse la place dans le meilleur des cas à « ne viens plus à la TV » et dans le pire des cas à « tais toi ou ça va mal se finir ». Le maigre plan B c'est Youtube, ou plutôt c'était Youtube, avant que la modification des algorithmes de classement politiquement corrects n'aie permis que les vidéos trop dissonantes soient noyées sous des propositions « mainstream » bien plus éloignées de la requête du visiteur, voire sous des inepties monumentales orientées cul. On débat déjà de la possibilité de censure automatisée sur les plateformes à grandes diffusion. Or il faut savoir que même dans les pays influents et dirigés par de « grands méchants » la situation ne sera alors pas pire. Peu nombreux et peu influents sont en fait les pays où la simple liberté individuelle elle-même et le droit à la vie privée sont menacés, et en général ils ne sont pas pris comme références, même pour servir de grands méchants. Donc pas de quoi faire rêver ou se consoler. Bref, si c'est pour gagner cette liberté là qu'on nous vante le laxisme judiciaire, à quoi sert ce dernier ? Que restera-t-il donc d'avantageux à vivre dans ce « monde libre » plutôt que de se retrouver chez des grands méchants pas libres et pas riches ? « Tu ne te rends pas compte » Certes, j'entendrai cela : Je ne me rendrais pas compte du fait que dans un « low cost country » on ferme sa gueule et on bosse dur pour survivre, et que risquer la comparaison est de l'inconscience totale. Et pourtant si, je me rend parfaitement compte de cela, tout comme du fait que les GOPE vont nous aligner sur ce modèle. Il reste à espérer que pendant que nous nous alignerons vers eux les « low cost countries » réviseront un peu leur droit du travail. Et j'ai bien écrit : un peu. Je n'espère pas plus. Dans tous les cas ce réalignement est la seule méthode pour faire survivre un système économique en situation de libre échange, que ce dernier soit capitaliste ou collectiviste. A la différence qu'il faudra en plus supporter l'insécurité qui explosera pour nous placer certainement plus au niveau du Bangladesh que celui de la Chine (que je préfèrerais largement). Considérant que les dernières élections ont démontré la quasi-totale euro-acceptation des votants, et donc l'acceptation implicite des GOPE, je prends donc acte de ce choix. Ils ont choisi ce modèle « ouvert » que je refusais, c'est le jeu de la démocratie. En revanche, l'incohérence est inacceptable. C'est pourquoi tout mouvement révolutionnaire proposant de « raser gratis » sans plan précis et sans contraintes crédibles (comme la régulation du commerce, l'utilisation rationnelle des taxes, la fin du laxisme judiciaire, la fin du « no-border » de fait) ne peut être qu'enfumage encore pire, source de chaos et de guerre civile. Inutile donc de me demander pour qui je prendrais parti dans le cas d'une réelle tentative de déstabilisation de la part de mouvements de ce type. Je ne serai pas là pour pleurer sur le sort de ce nouveau type de bandes qui ne seront sûrement pas aussi bien traitées que celles des « quartiers », même dans le cas de leur éventuelle association (ce qui est bien probable dans le cas de mouvements trotskystes). Quand on choisit, on choisit ! Annexe [1] https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/les-symptomes-d-une-chute-210209 [2] Certes, je ne prétend pas que le père Noël va passer, loin de là. Mais il était au départ prévu d'appliquer des mesures bien plus austères que celles appliqués aujourd'hui. Cette idée d'annoncer brusquement la couleur sous prétexte de « traitement de choc » n'a pas vraiment bien marché. La rhétorique de patron de start-up n'a rien arrangé alors que la mollesse et la fourberie de Hollande dissimulaient finalement mieux le plan. [3] Grandes Orientations de Politique Européenne : Des directives de Bruxelles que tous les candidats non clairement eurosceptiques (donc tous ceux qui dépassent les 5 % de voix à tous types d'élections) seront chargés d'appliquer. Macron ne fait que les appliquer comme son prédécesseur, aussi cautionné par les électeurs, mais nous arrivons dans une phase où ça se voit un peu plus. [4] Ca c'est non seulement toléré mais très bien vu de nos jours. C'est même politiquement correct.
Voir en ligne : https://www.agoravox.tv/IMG/jpg/euro-logo-fire.jpg

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