Le Poutinisme : évolution d'un système politique

Le terme Poutinisme pourrait être défini comme une pratique et une praxis du pouvoir, il constitue l'infrastructure du système politique existant actuellement en Russie et se manifeste par la centralisation du pouvoir autour de Vladimir Poutine. Le Poutinisme est également un métadiscours narratif de légitimation du pouvoir du chef de l'Etat et de son action. Le Poutinisme puise ses racines dans la perestroïka, dans le choc du démantèlement de l'URSS et dans les politiques de réformes économiques menées pendant les années 1990, une période perçue par les Russes comme un affaiblissement sans précédent de la Russie, autant en interne que sur la scène internationale. Dès le début de la décennie 2000, le chef du Kremlin a fixé un objectif : replacer la Russie au centre du jeu mondial et reconstruire un État qui soit une puissance prospère qui compte dans le monde globalisé. C'est la naissance du Poutinisme. Il peut ainsi être perçu comme l'esprit de revanche des défenseurs de l'État contre l'emprise ploutocratique sur le pouvoir politique et les secteurs stratégiques de l'économie russe, contre le risque d'éclatement de la Fédération de Russie et contre l'affaissement de la Russie sur le plan international, c'est une réaction qui bénéficie d'un grand soutien populaire. Jean-Robert Raviot est docteur (HDR) en science politique, professeur de civilisation russe contemporaine à l'université Paris Nanterre. Spécialiste de la politique intérieure russe, il a publié de nombreux articles et ouvrages. Il prépare un ouvrage de synthèse sur le « poutinisme ». Au cours de cette conférence au cercle Jean Bodin, intitulée « Le poutinisme : évolution d'un système politique », il fait la généalogie du Poutinisme, parle de ses caractéristiques et de son fonctionnement. Jean-Robert Raviot fait également l'inventaire des forces et des faiblesses du Poutinisme et s'interroge sur la pérennité de ce système après Poutine. C'est peut être la partie la plus intéressante de la conférence : il explique que le Poutinisme ne repose pas sur une gouvernance institutionnelle mais informelle qui se fonde principalement sur des liens personnels entre des hommes en particulier, Poutine occupant le centre de ce réseaux de solidarité pour en constituer le noyau. Quid de la pérennité de ce système après la présidence de Poutine ? Y'aura –t-il le même réflexe d'agrégation de l'élite politique russe autour de son nouveau chef ? Ou alors la succession se soldera-t-elle par une implosion de la classe dirigeante et une crise de succession qui serait une nouvelle source s'instabilité ? Jean-Robert Raviot explique également que l'avènement du leadership charismatique de Poutine fait consensus au sein du peuple russe, il est incontesté et incontestable. Mais la popularité de Poutine se combine à une défiance populaire très profonde des élites dirigeantes, perçues comme largement corrompues et privilégiées (la Russie est l'un des pays les plus inégalitaire au monde, il apparaît que les inégalités se sont accrues plus fortement en Russie qu'en Chine ou que dans les autres pays communistes d'Europe de l'est). Ainsi, faute d'une figure aussi charismatique et dominante que Vladimir Poutine, le Poutinisme cessera d'exister. Si le dépérissement du Poutinisme ne semble guère d'actualité avant 2024, il convient d'en souligner la fragilité. La période de transition post-Poutine qui s'ouvrira dans les années à venir pourrait s'avérer décisive. Index chronologique 00 :00 : Introduction 02 : 40 : Généalogie du Poutinisme : la crise des années 80-90 -La perestroïka et le délitement de l'Etat -Eclatement de l'URSS et reconfiguration géopolitique -Thérapie de choc ultralibérale -Indétermination institutionnelle et captation du pouvoir par des clans de ploutocrates, les gouverneurs des régions et les mafias -Chute démographique et baisse de l'espérance de vie 14 : 45 : Importance de la stabilité dans le discours de légitimation poutinien 16 : 25 : Extension de l'OTAN vers les frontières, manœuvres de conversion occidentaliste et d'affaiblissement de la Russie par l'occident 25 : 50 : Intervention de l'OTAN au Kosovo et prise de conscience russe de l'hégémonisme occidental 29 : 25 : Perception que l'alignement sur l'occident est un facteur d'affaiblissement interne et externe 31 : 00 : Crise de succession, arrivée de Poutine au pouvoir et allégeance des élites 36 : 15 : Naissance et caractéristiques du Poutinisme -Rétablissement de la verticale du pouvoir (reprise en main de l'Etat, des institutions et reconstruction d'une chaine de commandement). -Fabrication d'un consensus majoritaire autour du pouvoir -Néo-Etatisme à la russe : politique économique et sociale fondée sur un retour de l'Etat (mise sous tutelle de secteurs économique par l'Etat, contrôle de la nomination de certains patrons etc.) 41 : 15 : Risque d'éclatement de la Russie et défense de son unité territoriale 49 : 12 : prétorianisme et pérennité du consensus majoritaire - Avènement d'un leadership charismatique de Poutine -Patriotisme -Politique extérieure 1 : 00 :08 : Reprise en main étatique des secteurs stratégiques de l'économie russe -Affaire Khodorkovski comme facteur déclencheur du néo-étatisme à la Russe -Résistance de la Russie à la globalisation néolibérale -Début de la campagne médiatique russophobe en occident -Sanctions économiques et difficultés d'élaboration d'une stratégie de croissance -Corruption Source : Cercle Jean Bodin
Voir en ligne : https://www.agoravox.tv/IMG/jpg/raviot-poutinisme-russie.jpg

Source