L'appauvrissement des sols agricoles a supprimé cette double capacité de pénétration et d'absorption des eaux de pluie. Compte-tenu des surfaces considérables consacrées à l'activité agricole en France, ce sont des volumes d'eau astronomiques qui se retrouvent désormais à ruisseler au lieu de s'infiltrer dans les sols. Il faut bien comprendre que ces volumes, qui sont déjà significatifs à l'échelle d'un simple champ, deviennent spectaculaires à l'échelle d'un bassin versant, lorsqu'ils s'accumulent par nappes dans un cours d'eau. Un sol biologique riche en matière organique, par exemple, pourra absorber 20 % d'eau supplémentaire par rapport à un sol appauvri par les produits chimiques et le labour profond (constat du Rodale Institute), ce qui peut représenter une différence de 200 000 litres par hectare. Sur un petit bassin versant de 100 km2 constitué de 70 % d'agriculture, cela représente déjà un volume de 1,4 millions de mètres-cubes (1,4 milliards de litres) qui sera stocké ou infiltré au lieu de ruisseler pour s'accumuler dans les vallées. Imaginez le volume en jeu sur un bassin de 10 000 km2. Mieux encore : cette capacité d'infiltration est particulièrement cruciale lors des pluies violentes, c'est-à-dire lors des épisodes orageux. Un sol agricole vivant (en particulier riche en vers-de-terre) et bien structuré peut absorber entre 40 et 100 mm d'eau en une heure (voire 300 mm/h, cf. travaux de Marcel Bouché, INRA, 1990) et joue donc un rôle d'amortisseur des pluies d'orage. À l'inverse, la plupart des sols agricoles dégradés actuels n'absorbent qu'un à deux millimètres d'eau avant d'être immédiatement saturés en surface ; tout le reste (c'est-à-dire la quasi-totalité) ruisselle alors massivement et provoque des débordements violents des cours d'eau.
Voir en ligne : http://www.agoravox.tv/IMG/jpg/inondations-sols.jpg
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