Macron au Ghana : réponse du président Akufo-Addo

Après le Burkina Fasso, où le président français a tenu un discours indigne, puis la Côte d’Ivoire, Emmanuel Macron a conclu sa visite de trois jours en Afrique par un passage au Ghana, pays anglophone. Autant le président burkinabé n’a pas pu ou pas su afficher ses points de désaccords autrement qu’en s’éclipsant brièvement de la salle, autant le président ghanéen Nana Akufo-Addo, lui, a choisi de parler franchement, d’égal à égal, avec son homologue français… Un acte de souveraineté et d’indépendance que l’on aimerait voir plus souvent chez les dirigeants des anciennes colonies françaises.
Raphaël Berland

VERBATIM
« J’espère que le commentaire que je m’apprête à faire au sujet de ce problème ne va offenser personne dans cette salle.
Nous ne pouvons plus continuer à mener, dans nos pays, dans nos régions, dans notre continent, une politique sur la base de l’aide de l’occident, de l’Europe, de l’union européenne ou encore de la France.
Cela n’a pas marché, ça ne marche pas et ça ne marchera pas !
Il est de notre responsabilité de trouver des moyens pour développer nos nations par nous-mêmes. Ce n’est pas juste qu’un pays comme le Ghana, 60 ans après son indépendance continue à définir son budget de l’éducation et de la santé sur la base des financements provenant du contribuable européen.
Au stade ou nous sommes, nous devions être capable de financer nous-mêmes nos besoins de base.
Nous allons considérer les 60 années à venir comme un période de transition où nous pourrons être capable de voler de nos propres ailes.
Notre objectif n’est plus de compter sur ce que le contribuable français pourra nous donner. Nous accepterons cependant tout apport que le contribuable français pourra nous apporter à travers son gouvernement. Nous n’allons pas tout simplement tourner le dos à tout apport de l’autre.
Cependant, malgré tout ce qu’il a subi, le continent africain reste celui qui détient plus de 30% de toutes les ressources naturelles les plus importantes du monde. C’est le continent qui a de vastes terres fertiles et la plus grande population jeune, qui constitue une énergie et le dynamisme dont ce continent a besoin.
Regardez ces jeunes qui font preuve d’ingéniosité pour traverser le Sahara et la méditerranée. Nous avons besoin de cette énergie et de cette ingéniosité sur notre continent.
Et cette énergie-là, nous l’aurons ici sur notre continent si nous implémentons des systèmes politiques qui montrent à ces jeunes qu’ils sont l’espoir, et qu’il y a des opportunités ici en Afrique.
Les phénomènes de migration ne sont pas nouveaux, c’est aussi vieux que l’humanité et s’expliquent par le fait que les gens qui quittent le chez-eux le font parce que leur pays ne leur donne aucun espoir.
Ceux d’entre vous qui connaissent l’histoire de l’Europe savent que les grandes vagues d’immigration en Europe au 19ème siècle partaient de l’Italie et de l’Irlande. Des vagues et des vagues d’italiens et d’irlandais ont migré aux USA à la recherche du rêve américain parce qu’il n’y avait pas d’opportunité de travail en Irlande et en Italie.
Aujourd’hui, vous n’entendez plus parler de cette immigration-là.
Les jeunes italiens et irlandais restent chez eux. Nous voulons que les jeunes africains restent aussi en Afrique. Pour cela, nous devons refuser cet état d’esprit d’assisté. Cet état d’esprit qui consiste à demander ce que la France ferra pour nous.
La France peut faire ce qu’elle veut de son propre gré et si cela coïncide avec nos intérêts, « tant mieux » comme on dira en Français.
Mais notre principale responsabilité en tant que leader et en tant que citoyen c’est de développer nos propres pays, de mettre sur pied des systèmes de gouvernance qui font des leaders des personnes responsables de leur actes et qui utilisent les moyens mis à leur disposition pour le bien du peuple et non pour leur propre intérêts.
Notre préoccupation devrait consister à nous demander ce que nous devons faire pour éviter que l’Afrique continue à mendier de l’aide et à demander l’aumône dans ce 21e siècle.
Quand tu regardes l’Afrique et considérant ses ressources, C’est l’Afrique qui devrait donner de l’argent à d’autres pays. […]
Sans vouloir offenser le président français, car je suis francophile et je n’ai aucun problème avec la coopération française, mais notre défi majeur, notre par de responsabilité devrait être de créer les conditions nécessaires afin que nos jeunes cessent de braver tous ces dangers pour aller en Europe.
Ils n’y vont pas parce qu’ils veulent, mais parce qu’ils ne pensent pas qu’il y a des opportunités dans nos propres pays. Ces conditions, nous pouvons les créer si nous changeons cette mentalité de personnes qui dépendent des autres, cette mentalité d’assisté.
Et si nous y parvenons, nous verrons que dans une décennie l’Afrique émergera et on aura une nouvelle génération d’africain et en ce moment, les indépendances dont on a parlé pendant la période dite d’indépendance deviendront réelles et effectives.
J’espère qu’en disant cela, je n’offense pas l’intervieweur ou certains de mes amis dans l’assistance. Ceci est ce à quoi je crois fermement.
C’est pourquoi le slogan de mandat est : nous voulons construire le Ghana sans recours aux aides. Un Ghana qui est indépendant, un Ghana qui se suffit qui vole de ses propres ailes. Monsieur le président voilà contribution que je peux apporter.
Nana Akufo-Addo
(Translated by MB Achid / source)
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