L’appel au boycott des produits israéliens ne relève pas de la liberté d’expression, mais constitue une provocation à la discrimination. Analyse critique d’une jurisprudence française

L’article qui suit est tiré du site internet Revue DLF (Revue des Droits et Libertés Fondamentaux). Son auteur, Jean-Christophe Duhamel, est Docteur en droit privé et Ingénieur de Recherche au CRDP (« Centre de Recherche Droits et Perspectives du droit »), au sein de l’ERADP (« Equipe de Recherches Appliquées au Droit Privé ») de la Faculté de Droit de Lille 2.

Raphaël Berland

Par ses arrêts du 20 octobre 2015, la chambre criminelle de la Cour de cassation assimile l’appel au boycott des produits d’origine israélienne à une provocation à la discrimination fondée sur la nationalité des producteurs et fournisseurs, délit visé à l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881. L’acte de boycott individuel mis en œuvre par le consommateur relève pourtant de son libre choix, si bien que cette répression de l’appel au boycott revient à sanctionner l’incitation à exercer une liberté. Une telle position assumée par la Cour de cassation peut troubler, sans compter qu’elle s’appuie sur une confusion regrettable entre la mise à l’index de produits à raison de leur origine géographique et la discrimination des producteurs à raison de leur nationalité. Aujourd’hui, c’est l’incitation à se mobiliser contre la politique d’un État, par un appel pacifiste et non violent à la conscience du consommateur citoyen, qui est menacée. Espérons que cette ingérence des autorités publiques françaises sera remise en cause par la Cour européenne des droits de l’homme sur le fondement de l’article 10 de la CEDH consacrant la liberté d’expression. Une telle ingérence ne semble en effet que très peu répondre aux buts légitimes, mis en avant par le juge français, de « défense de l’ordre » et de « protection des droits d’autrui », tout comme elle semble disproportionnée aux nécessités d’une société démocratique.
1 – C’est avec une plume prudente qu’il convient de commenter les deux arrêts rendus par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 20 octobre 2015 1, même s’ils s’inscrivent dans la continuité d’au moins deux décisions précédentes de la même juridiction 2. Cette prudence s’impose en raison du caractère clivant, polémique et passionné du sujet abordé : l’appel au boycott des produits israéliens tel que promu par la campagne internationale BDS (« Boycott, désinvestissement, sanctions »).
2 – Pour mémoire, ce mouvement créé en 2005 à l’initiative de la société civile palestinienne, présent à l’heure actuelle dans nombre de pays, porte des revendications précises et constantes : rétablissement d’Israël dans ses frontières reconnues par le droit international (ce qui implique le démantèlement des colonies et du mur de séparation jugés illégaux en droit international), égalité des droits entre Israéliens et Palestiniens, retour des réfugiés palestiniens. Son mode d’action consiste à inciter les citoyens à agir symboliquement contre la politique israélienne, ce qui s’inscrit dans la longue tradition du « boycott idéologique » 3. Si BDS prône un large éventail d’actions visant les institutions israéliennes et leurs partenaires (boycott d’ordre économique, financier, syndical, académique, culturel, sportif 4, suscitent sans doute le plus d’attention et de réactions les réguliers appels au boycott des produits israéliens adressés aux consommateurs 5. Concrètement, les militants BDS « s’installent » dans ou aux alentours d’un espace public de vente, généralement une grande surface référençant des produits d’origine israélienne, ou encore dans ou aux alentours des entreprises ayant une implantation ou des partenariats en Israël ou dans les territoires occupés 6, distribuent des tracts, portent des tee-shirts, brandissent des pancartes, scandent des slogans hostiles à la politique de l’État israélien, et appellent à la mise à l’index des produits et entreprises ciblés.
3 – C’est précisément au regard de tels faits commis dans la proche banlieue mulhousienne en septembre 2009 et mai 2010, et dans le contexte de l’adoption de la circulaire Alliot-Marie incitant les parquets à apporter une « réponse cohérente et ferme » aux « appels au boycott des produits israéliens 7 », que des militants de la campagne BDS avaient été poursuivis. Après deux jugements de relaxe prononcés fin 2011 par le tribunal correctionnel de Mulhouse 8, la Cour d’appel de Colmar déclarait les prévenus coupables du délit de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence envers un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une race, une religion, une nation 9. Frappées d’un pourvoi essentiellement fondé sur la violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et 24, alinéa 8 10 de la loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881, les deux décisions d’appel devaient être validées par la Cour de cassation dans ses deux arrêts du 20 octobre 2015. La Haute juridiction française a statué au prix d’une interprétation extensive du délit de provocation à la discrimination (I), et d’une interprétation restrictive de la liberté d’expression (II).
 

I : Une interprétation extensive du délit de provocation à la discrimination (art. 24, al. 8 L. 29 juillet 1881)

 
4 – La Cour de cassation estime que les juges du fond ont « relevé, à bon droit, que les éléments constitutifs du délit prévu par l’article 24, alinéa 8 de la loi du 29 juillet 1881 étaient réunis ». Partant, elle livre un guide de lecture de l’incrimination de provocation à la discrimination des personnes à raison de leur appartenance à une nation aboutissant à une interprétation singulière de ce texte pénal : d’abord une interprétation qui rompt tout lien entre la provocation à la discrimination et le concept juridique de discrimination, ce qui consacre une complète autonomie de l’alinéa 8 de l’article 24 de la loi de 1881 (A), et ensuite une interprétation qui assimile l’origine géographique d’un produit à l’origine nationale des personnes qui le produisent ou le distribuent (B).
 

A/ L’autonomie de l’alinéa 8 de l’article 24 de loi du 29 juillet 1881

 
5 – La loi sur la presse de 1881 ne pénalise pas les discriminations, mais uniquement la provocation à les commettre. C’est le code pénal, précisément les articles 225-1 et 225-2, qui pénalise la discrimination fondée sur une multitude de critères, tenant, entre autres, à l’origine, au sexe, à l’apparence physique, au patronyme, à l’état de santé, à l’orientation ou l’identité sexuelle, aux opinions politiques, et à l’« appartenance ou la non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ». Sur cette base, une distinction fondamentale est cependant opérée entre les discriminations pénalement répréhensibles et celles qui, alors même qu’elles seraient fondées sur un des critères précités, ne le sont pas. Pour faire l’objet de poursuites et d’une condamnation, la discrimination doit en effet répondre aux cas d’ouverture déterminés par l’article 225-2 du code pénal, lesquels consistent pour l’essentiel à « refuser la fourniture d’un bien ou d’un service », « à entraver l’exercice normal d’une activité économique quelconque », et « à refuser d’embaucher, à sanctionner ou à licencier une personne ». En dehors de ces cas, toute discrimination équivaut à l’exercice d’un choix qui ne peut être réprimé pénalement, à l’image des achats des consommateurs fondés sur des considérations géopolitiques…
6 – L’alinéa 8 de l’article 24 de loi du 29 juillet 1881 incrimine quant à lui ceux qui « auront provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ». Toute la question est de savoir si ce texte doit être considéré comme autonome vis-à-vis de l’article 225-2 du code pénal ; autrement dit, la provocation à exercer une discrimination non réprimée par cet article peut-elle être une infraction ? Une réponse négative s’imposait traditionnellement dans la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation 11, jusqu’à ce qu’une réforme en 2004 ne vienne, « implicitement » 12, rebattre la donne. La loi du 30 décembre 2004 13 introduit en effet un nouvel alinéa 9 à l’article 24 de la loi de 1881, incriminant la provocation à la discrimination des personnes à raison du sexe, du handicap, de l’orientation ou de l’identité sexuelle ; or, cet alinéa renvoie expressément à l’article 225-2 du code pénal. À l’époque, une telle contextualisation du délit de provocation à la discrimination était apparue nécessaire au législateur, « afin que la nouvelle incrimination ne permette pas de poursuivre les propos qui relèvent du débat public » 14. Mais précisément, l’interprétation de l’alinéa 8 de l’article 24 de la loi de 1881 développée jusqu’alors par la Cour de cassation avait préservé de cette dérive, sans qu’un renvoi à l’article 225-2 du code pénal ne fut nécessaire… 15. Quoi qu’il en soit, à partir de 2004, un décalage textuel demeura entre les deux alinéas, ce qui put laisser augurer l’existence d’un délit de « provocation générale » porté par l’alinéa 8, et d’un délit de « provocation spéciale » porté par l’alinéa 9 de l’article 24 16. Cette perspective s’est aujourd’hui bel et bien transformée en réalité…
7 – Déjà, la chambre criminelle, dans une affaire différente de l’espèce qui a abouti aux arrêts présentement commentés, avait refusé de transmettre une QPC relative au champ d’application de l’alinéa 8 de l’article 24 de la loi de 1881, estimant dépourvue de caractère sérieux la critique portant sur l’imprécision de ce texte pénal 17. Dans cette veine, la cour d’appel de Colmar avait estimé « qu’il importe peu que l’alinéa 9 de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 incrimine la provocation à la discrimination économique définie par l’article 225-2 du code pénal ». L’avocat général près la Cour de cassation devait également considérer que la notion de discrimination contenue à l’alinéa 8 de l’article 24 est « indéniablement autonome et vis[e] toute distinction, différence de traitement qui ne repose sur aucun fondement objectif, faite à raison uniquement de l’appartenance à une race, une nation, une ethnie ou une religion » 18. La Cour de cassation, dans la mesure où elle approuve la cour d’appel d’avoir caractérisé les éléments constitutifs du délit, s’approprie ces raisonnements.
8 – Par conséquent, le délit de provocation à la discrimination peut être constitué au regard de la loi de 1881, cette discrimination fût-elle licite et constitutive d’une liberté de choix au regard du code pénal. Appliquée aux appels au boycott par les consommateurs, cette solution aboutit à évacuer toute utilité à la démonstration d’absence d’« entrave à l’exercice normal d’une activité économique » au sens de l’article 225-2 du code pénal. Pourtant, une telle démonstration aurait pu être menée 19, tant il est vrai que l’adoption en 1977 20 de cette circonstance d’entrave économique avait une visée totalement étrangère au boycott par les consommateurs ; elle ne concernait que les échanges du commerce international, dans l’optique de préserver les relations commerciales des entreprises françaises avec leurs partenaires israéliens, malgré le boycott international entrepris par les États de la Ligue Arabe à partir des années 1950 21. En outre, toute condamnation des appels au boycott consumériste en raison de la politique d’un État aurait alors impliqué, si ce n’est de démontrer, à tout le moins de convaincre que l’« exercice normal d’une activité économique », en démocratie, ne s’accommode pas de la mobilisation citoyenne autour d’une cause relevant de la géopolitique internationale…
9 – Les boycotteurs français du tabac d’Afrique du Sud auraient peu apprécié la position actuelle de la Cour de cassation, position qui surprendrait vraisemblablement aussi les boycotteurs américains des fromages français après le déclenchement de la seconde guerre du Golfe, ou encore les boycotteurs australiens du vin français lors de la reprise des essais nucléaires à Mururoa… Ceci étant, d’un certain point de vue, la position de la Cour de cassation est sans doute appréciable, en ce qu’elle permettrait de s’attaquer non pas à la plus inavouable et critiquable liberté de conscience du citoyen, mais à la provocation à user de cette liberté de conscience conduisant à la création d’un « contexte idéologique » discriminatoire 22. Des exemples triviaux de comportements inacceptables peuvent être mobilisés : voici un collectif qui milite via internet pour que les personnes blanches ne serrent plus la main aux personnes noires, ou pour que les Français n’accueillent plus à leur domicile des personnes de nationalité chinoise ! En l’état de la jurisprudence, il s’agirait de délits de provocation à l’accomplissement d’une discrimination fondée sur la race ou l’origine nationale, même si, au regard du code pénal, tout un chacun est libre d’adopter ce comportement. On perçoit donc la limite qu’il y aurait à rétablir un strict lien de dépendance entre l’alinéa 8 de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 et l’article 225-2 du code pénal, limite qui du reste s’observe d’ores et déjà de manière flagrante dans l’alinéa 9 de l’article 24 23.
10 – Au total, si l’on accepte de considérer qu’il est des provocations à la discrimination légitimes et d’autres illégitimes, un point d’équilibre reste à trouver, tâche rendue ardue par l’existence d’un texte unique chargé d’appréhender des contextes d’appels à la discrimination potentiellement très éloignés… Même si le constat n’est pas rassurant en termes de dérive discrétionnaire du pouvoir judiciaire et de prévalence de sensibilités politiques dans l’office du juge, la marge d’appréciation de celui-ci pour départir les justes causes de celles qui ne le sont pas apparaît ici cruciale, autant que celle du ministère public qui dispose de l’opportunité de poursuivre 24.
 

B/ L’assimilation du boycott de produits à la discrimination des personnes visée à l’article 24, aliéna 8 de loi du 29 juillet 1881

 
11 – L’incrimination de l’article 24, alinéa 8 de la loi de 1881 énonce expressément que les provocations à la discrimination ethnique, raciale, religieuse ou nationale, ne peuvent être sanctionnées que lorsqu’elles sont proférées à l’égard « d’une personne ou d’un groupe de personnes ». L’argumentaire développé devant la cour d’appel de Colmar par les prévenus prenait particulièrement appui sur cet élément : « l’incrimination de la prévention s’emploie à protéger une personne ou un groupe de personnes […] et non pas à protéger un État, même s’il s’agit de produits exportés par celui-ci. […] – il ne peut être fait une assimilation entre l’État d’Israël et les producteurs israéliens des produits boycottés ». La cour d’appel devait balayer l’argument et affirmer de manière tranchée : les prévenus, « par leur action provoquaient à discriminer les produits venant d’Israël, incitant les clients du commerce en question à ne pas acheter ces marchandises à raison de l’origine des producteurs ou fournisseurs lesquels, constituant un groupe de personnes, appartiennent à une nation déterminée, en l’espèce Israël ». Un tel glissement sémantique qui part de la discrimination des produits israéliens pour arriver à la discrimination des producteurs ou fournisseurs à raison de leur origine pourra sembler bien insidieux ; pas étonnant donc qu’il fut l’élément central du moyen unique au pourvoi 25.
Monsieur R, auteur des paroles « La France est une garce, n’oublie pas de la baiser »
12 – Cette assimilation des personnes aux produits est le fruit d’une interprétation très large du texte, comme le souligne du reste le conseiller rapporteur près la Cour de cassation : « l’article 24 alinéa 8 incrimine la provocation à la discrimination à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes, et non à l’égard de produits : ce n’est que par le détour d’une interprétation que les juges identifient comme victimes de la provocation les  »producteurs israéliens », ou les  »producteurs de biens installés en Israël », ce qui peut prêter à discussion » 26. Une telle méthode d’interprétation large contrarie le principe d’interprétation stricte des lois pénales 27. Mais surtout, de même que, mutatis mutandis, le dénigrement d’un produit ne constitue pas per se une diffamation ou une atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne qui le fabrique ou le commercialise 28, le lien entre appel à la discrimination des produits au nom de la critique de la politique d’un État et appel à la discrimination des personnes est loin d’être automatique. Apprécié au regard des faits poursuivis, ce critère discriminatoire tiré de la nationalité des producteurs et fournisseurs paraît spécieux dès lors que le mouvement BDS et ses militants fondent et justifient leurs appels au boycott uniquement sur la base de la contrariété au droit international de la politique de l’État israélien. En outre, on avait cru observer dans la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation qu’une distinction se devait d’être opérée entre un État et ses ressortissants, seuls ces derniers pouvant être les cibles des provocations figurant à l’alinéa 8 de l’article 24. À l’occasion d’une affaire dont les amoureux de la grande littérature se souviennent, les passages d’une chanson, en l’occurrence « La France est une garce, n’oublie pas de la baiser », ou encore « La France est une de ces putes de mères qui t’a enfanté », n’ont pas été considérés comme des provocations visées à l’alinéa 8 de l’article 24 ; la Cour de cassation approuve les juges d’appel d’avoir considéré qu’« aucune parole du texte incriminé ne vient stigmatiser en particulier un groupe de personnes composant la nation française », les passages litigieux n’étant que « l’expression imagée d’une critique engagée, enragée, de l’État, non d’un outrage ou d’un appel à la haine envers l’ensemble des Français, comme le musicien a tenu à le préciser dès le premier couplet en soulignant  »Quand j’parle de la France/J’parle pas du peuple français » » 29. Il avait également semblé que lorsque BDS parlait d’Israël, il ne parlait pas des Israéliens, et que son action, « engagée », « enragée » même, visait la politique d’un État et de ses institutions, et n’était pas un appel à la discrimination « envers l’ensemble » de ses ressortissants 30. Dans une autre affaire, une personne était poursuivie du chef de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une nation, du fait de la mise en vente dans son commerce de tee-shirts flanqués de la mention « J’baiserai la France jusqu’à ce qu’elle m’aime ». Là encore, la chambre criminelle devait sanctionner les juges du fond ayant condamné le fournisseur de ces vêtements, dans la mesure où « il ne résultait pas des faits et circonstances que le prévenu entendait viser, par ses écrits ou ses imprimés, les Français en tant que groupe constitutif d’une nation » 31
13 – S’il fallait davantage convaincre, il suffirait de rappeler que BDS incite à ne pas acheter de produits dont l’indication d’origine géographique est Israël 32, et non à ne pas acheter de produits fabriqués ou distribués par des Israéliens. La nuance est de taille. Ainsi, un producteur et exportateur français installé en Israël verrait de toute vraisemblance ses produits faire l’objet d’un appel au boycott, nonobstant sa nationalité. À l’inverse, font ou ont fait aussi l’objet d’une campagne de boycott et de désinvestissement de la part de BDS des entreprises françaises ou étrangères en raison des moyens qu’elles mettent à la disposition de l’ État israélien dans l’occupation de la Palestine 33 ; Orange en fournit l’exemple topique en France 34. De même, si demain, Israël accédait aux revendications du mouvement BDS (égalité des droits, retour des réfugiés, démantèlement du mur de séparation et des colonies…), il n’y a pas de raison de douter que les appels au boycott envers les produits d’importation israéliens disparaîtraient. Bref, l’existence même des appels au boycott par les consommateurs est contingente à la politique d’un État, et non à la nationalité de marchands 35.
14 – Tous ces éléments plaidaient en faveur de la cassation des arrêts de la cour d’appel de Colmar. Pourtant, la Cour de cassation approuve pleinement les juges du fond, suivant en cela l’avis de l’avocat général 36, allant lui-même dans un sens similaire aux observations exprimées par le défenseur des droits dans le cadre d’une autre instance 37. Si l’on comprend donc bien les choses, la distinction entre la politique d’un État et sa population est artificielle dans l’hypothèse d’un appel au boycott, et tout appel à la discrimination du premier, au travers des produits, des services et pourquoi pas des activités et évènements importés sur le territoire national par ses ressortissants, est immanquablement une discrimination des membres de la seconde. Une fois de plus, les ex-prosélytes du boycott des Jeux Olympiques de Pékin sur le parcours de la flamme olympique à Paris en 2008 apprécieront grandement, tout comme les parlementaires qui brandissaient à l’époque dans les hémicycles français et européen le fameux logo olympique caricaturé sous forme de menottes entrelacées 38 … En tout cas, il aurait peut-être été hasardeux pour certaines grandes entreprises françaises menacées de boycott par des consommateurs chinois offusqués de l’épopée parisienne de la flamme, de tenter, en réaction à cette abjecte mobilisation citoyenne, un dépôt de plainte auprès des autorités judiciaires locales 39 ; mais qu’elles se rassurent, car au rythme où vont les choses, la Cour de cassation déclarera peut-être prochainement la compétence universelle de la France dans la lutte contre ce boycott infâme des nations…
15 – Pour tout dire, les appels au boycott consumériste, culturel, académique ou encore sportif, semblent à ce point liés à la liberté des citoyens de se mobiliser et au caractère démocratique d’un État qu’on ne cesse pas de s’étonner de l’application actuelle de l’article 24 alinéa 8 de la loi de 1881. On aurait au moins pu espérer que la Cour de cassation convoquât vertueusement dans le débat le principe supérieur de la liberté d’expression, d’ailleurs expressément intégré au moyen du pourvoi…
 

II : Une interprétation restrictive de la liberté d’expression (art. 10 CEDH)

16 – Au-delà de la violation de l’alinéa 8 de l’article 24 de la loi de 1881, le pourvoi s’appuyait sur la contrariété de la décision rendue par les juges de Colmar à l’article 10 de la CEDH. Cet article érige la liberté d’expression, entendue comme la liberté d’opinion et la liberté de recevoir et de communiquer des informations ou des idées, au rang des droits fondamentaux des individus que les autorités publiques des États signataires ne sauraient par principe contrarier. Exceptionnellement, toute ingérence dans la liberté d’expression, envisagée au § 2 de l’article 10 CEDH, n’est admissible que si elle est « prévue par la loi » 40, qu’elle est motivée par un « but légitime » comptant parmi ceux énumérés audit article 41, et qu’elle s’avère « nécessaire dans une société démocratique ».
17 – Répondant explicitement au moyen soulevé, la Cour de cassation tranche sans circonvolution : « l’exercice de la liberté d’expression, proclamée par l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, peut être, en application du second alinéa de ce texte, soumis à des restrictions ou sanctions qui constituent, comme en l’espèce, des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la défense de l’ordre et à la protection des droits d’autrui ». Les traits péremptoires de cet énoncé sont inversement proportionnels à son didactisme. Qu’il soit en effet permis de s’interroger : en quoi l’appel au boycott des produits israéliens est-il attentatoire à l’« ordre » et aux « droits d’autrui » ; en quoi la pénalisation de tels appels est-elle une « mesure nécessaire » dans une « société démocratique » ? L’étude de la jurisprudence de la Cour EDH montre qu’il n’est traditionnellement pas requis de s’attarder sur la première question, mais bien plus sur la seconde ; dit autrement, le contrôle de proportionnalité entre l’ingérence dans la liberté d’expression et les nécessités d’une société démocratique (B) doit compenser le contrôle minimum de l’existence du but légitime de cette ingérence (A). La mise en œuvre de cette méthode par les juges français a abouti à une interprétation restrictive de la liberté d’expression appliquée aux appels au boycott des produits israéliens.

A/ Le contrôle minimum du but légitime (« défense de l’ordre » et « protection des droits d’autrui ») de la pénalisation des appels au boycott

 
18 – Selon la Cour de cassation, la condamnation des appels au boycott des produits d’origine israélienne répond à deux des buts légitimes visés à l’article 10, § 2 CEDH : la « défense de l’ordre » et la « protection des droits d’autrui ». Une telle analyse pourrait sembler prendre beaucoup de distance avec ce qu’il conviendrait d’entendre, en première intention, par « ordre » et « droits d’autrui ». En effet, la rédaction de l’article 10, § 2 CEDH a ceci de particulier qu’elle lie la « défense de l’ordre » à la « prévention du crime », et la « protection des droits d’autrui » à la protection de la « réputation ». Même si la Cour EDH eut tôt fait de relativiser les effets des conjonctions figurant en particulier à l’article 10, § 2 CEDH 42, de telles associations de buts légitimes orientent néanmoins naturellement l’interprétation des expressions « défense de l’ordre » et « protection des droits d’autrui », qui pourraient s’entendre respectivement comme la préservation contre les troubles à l’ordre public ou privé, et comme la protection des droits liés à la personnalité. Ces deux points méritent d’être approfondis.

19 – D’abord, concernant la « défense de l’ordre », l’ingérence des autorités publiques consisterait donc à prévenir les risques de troubles ou à faire cesser les troubles effectifs à l’ordre public ou privé, auxquels pourrait aboutir une liberté d’expression par trop débridée. Par trouble à l’ordre, il faudrait bien entendre cette « atteinte à la paix publique ou à l’exercice d’un droit individuel » 43, et non une atteinte à ce qui relèverait d’un ordre moral. Il s’agirait donc de prévenir ou de condamner les voies de fait, rixes ou autres appels à la violence à l’encontre de personnes privées ou de dépositaires de l’autorité publique. En ce sens, un arrêt tout aussi récent qu’éclairant de la grande chambre de la Cour EDH a énoncé ce qui doit être entendu par « défense de l’ordre », et ce conséquemment à une différence de rédaction entre la version anglaise et française de l’article 10, § 2 CEDH 44. Tandis que la version française évoque la « défense de l’ordre », la version anglaise évoque « la prévention du désordre » 45 ; soucieuse de livrer une interprétation homogène, et partant cohérente, des deux versions de la convention, la Cour EDH est amenée à opérer la distinction entre une conception élargie et une conception étroite de l’« ordre » : alors que la première « est souvent choisie pour désigner le corps de principes politiques, économiques et moraux essentiels au maintien de la structure sociale et même, dans certains pays, pour englober la dignité humaine », la seconde « apparaît revêtir une portée plus étroite, renvoyant surtout […] aux émeutes ou à d’autres formes de troubles publics » 46. Pour les juges de Strasbourg, la notion d’ordre visée à l’article 10, § 2 CEDH doit s’interpréter uniquement en ce second sens étroit 47. Dès lors, dans cette espèce où étaient en cause des propos contestant publiquement le caractère génocidaire des actes commis à l’encontre des populations arméniennes au début du 20ème siècle, la Cour constate que « rien ne prouve que ces rassemblements aient réellement donné lieu à des affrontements », et que « rien ne prouve non plus que, malgré la présence d’une communauté arménienne comme d’une communauté turque en Suisse, ce type de propos risquait de susciter de graves tensions et de se solder par des affrontements » 48. Conclusion : « – la Cour n’est pas convaincue que l’ingérence dans le droit du requérant à la liberté d’expression visait la « défense de l’ordre » » 49. Cette solution offre une perspective différente à la décision de la Cour de cassation, qui s’appuie entre autres sur le critère de la « défense de l’ordre » pour justifier l’ingérence des autorités publiques dans la liberté d’expression des militants BDS, alors même qu’aucune voie de fait (comme par exemple un retrait autoritaire des produits des chariots des consommateurs), violence ou risque de violence physique ou autre destruction de produits ou vandalisme de rayonnages ne fut poursuivi 50.

20 – S’agissant du but légitime tiré de la « protection des droits d’autrui », le lien opéré par le texte européen avec la « réputation » inviterait à associer les droits dont il s’agit à ceux liés à la personnalité, tels le droit à la dignité, à la liberté des convictions politiques ou religieuses, ou encore par exemple à la libre orientation sexuelle… Et même à considérer que les « droits d’autrui » devraient s’étendre au-delà, c’est-à-dire à toute prérogative y compris d’ordre économique, nous avions précisément tenté de démontrer, apparemment sans succès aux yeux de la Cour de cassation, que le droit des producteurs et fournisseurs s’arrêtait au stade de l’offre de vente, en deçà d’un droit de conclure la vente qui n’existe pas51. L’avocat général ayant rendu son avis dans les arrêts du 20 octobre 2015 n’est peut-être pas resté totalement insensible à cet argument, dans la mesure où il s’est employé à le désamorcer en créant précisément un lien entre l’influence exercée sur le consommateur du fait de l’appel au boycott et la baisse théorique du volume de référencements dans les lieux de distribution 52. Cependant, un tel raisonnement n’établit pas en quoi les droits des producteurs israéliens ont été atteints, voire risquaient de l’être, alors même que l’action militante querellée n’a à aucun moment interrompu la liberté du commerce.

21 – Même si un certain nombre d’éléments invitent donc à la circonspection concernant la réalité des buts légitimes retenus par la Cour de cassation, une telle posture s’avère pourtant probablement inutile compte tenu des ressorts véritables du contrôle mis en œuvre par la Cour EDH. En effet, traditionnellement, la Cour EDH exerce un contrôle minimum de la motivation retenue par les autorités publiques quant au but légitime qui fonde une ingérence dans la liberté d’expression. Un auteur décrit ainsi une approche essentiellement casuistique, et non conceptuelle, des buts légitimes figurant à l’article 10, § 2 CEDH 53, si bien qu’il demeure très difficile d’en percevoir les contours, et partant d’anticiper ce qui, par exemple, relèverait de la « défense de l’ordre » ou de la « protection des droits d’autrui ». La Cour européenne admet de tels buts légitimes au gré d’espèces bigarrées, sans véritable cohérence conceptuelle. La « défense de l’ordre » a ainsi été retenue par la Cour EDH dans les situations variées et non exhaustives suivantes : interdiction d’un ouvrage appelant au séparatisme par des méthodes violentes 54 ; amendes pour trouble au bon fonctionnement d’une Assemblée parlementaire dans laquelle une bannière avait été déployée en séance et un porte-voix utilisé lors d’un vote 55 ; condamnation pour la publication d’un dessin post 11 septembre 2001 légendé comme suit : « Nous en avions tous rêvé, le Hamas l’a fait ! »56 ; arrêté d’expulsion consécutif à la prise de parole par un parlementaire étranger appuyant des revendications antinucléaires et indépendantistes exprimées par plusieurs partis locaux 57 … S’agissant de la « protection des droits d’autrui », outre les condamnations classiques en matière de propos, publications, diffusions ou expositions attentatoires à la réputation, à la vie privée ou menaçant l’intégrité des personnes visées 58, l’inventaire pourrait sembler encore plus hétéroclite : droit de l’opinion publique à être préservée d’une influence politique et droit des régies publicitaires à la neutralité de sorte à préserver leurs segments de marché 59 ; droit « à un régime politique véritablement démocratique au niveau local » 60 ; droit du public à ce que les avocats témoignent de « discrétion, d’honnêteté et de dignité » 61 ; droit « des téléspectateurs de recevoir une information objective et transparente » 62 ; droit pour une université catholique « à ce que son enseignement s’inspire de la doctrine catholique » 63. Les deux buts légitimes que sont la « défense de l’ordre » et la « protection des droits d’autrui » sont assez fréquemment caractérisés de manière cumulative pour une seule et même ingérence des autorités publiques 64.

22 – Outre ce très large éventail de situations qui caractérisent l’existence d’un but légitime, ce critère souffre également d’un grand déficit de fonctionnalité en jurisprudence européenne. De manière courante, les juges de Strasbourg ne s’appesantissent pas sur l’existence d’un tel but : ils consacrent l’essentiel de leur office à apprécier le caractère nécessaire de la mesure litigieuse dans une société démocratique, bien plus que sa justification formelle et objective tirée de la légitimité du but recherché par les États lorsqu’ils s’ingèrent dans la liberté d’expression 65. Ce constat s’est confirmé avec une remarquable constance jusqu’à aujourd’hui. Les juges s’en remettent le plus fréquemment à l’opinion de l’État attaqué, à laquelle ils opinent 66 ; parfois ils décèlent eux-mêmes le but poursuivi par l’ingérence lorsque l’État en cause demeure silencieux sur la question 67, voire s’inclinent devant le but prétendument légitime argué par l’État alors même qu’ils en contestaient la réalité 68 ! À notre connaissance, aucune décision ayant caractérisé une absence de but légitime fondé sur la « défense de l’ordre » ou la « protection des droits d’autrui » n’a invalidé, à ce titre, l’ingérence d’un État dans la liberté d’expression.

23 – Face à la grande diversité de situations caractérisant le but légitime de l’ingérence, ainsi qu’au caractère très peu fonctionnel de ce critère, la solution exprimée laconiquement par la Cour de cassation pourrait somme toute bien être admise par la Cour de Strasbourg. La répression des appels au boycott visait effectivement à défendre l’ordre et à protéger les droits d’autrui, tout simplement parce que ces deux notions sont extensibles à souhait et qu’elles ne sont pas opératoires dans le cadre du contrôle européen de conventionnalité. Cette atrophie conceptuelle et fonctionnelle est regrettable, en ce qu’elle vide la liste des buts légitimes établie à l’article 10, § 2 CEDH d’une bonne part de son intérêt, et prive tant le juge européen que national d’un outil de contrôle objectif des ingérences des autorités publiques. Il faudrait alors pouvoir compter, pour contrebalancer cette situation, sur le contrôle de proportionnalité beaucoup plus exigeant opéré à l’aune des nécessités d’une société démocratique…
 

B/ A la recherche du caractère « nécessaire dans une société démocratique » de la pénalisation des appels au boycott

 
24 – L’appréciation du caractère « nécessaire » de l’ingérence « dans une société démocratique » revient à mettre en œuvre un contrôle poussé de proportionnalité, à l’aide de critères appliqués avec une grande constance par la Cour EDH 69. D’abord, celle-ci fournit depuis longtemps la définition de l’adjectif « nécessaire », qui équivaut à « un besoin social impérieux » 70. Quant à la proportionnalité de l’ingérence, la Cour EDH explique le plus souvent la méthode d’évaluation qu’elle met en œuvre : « – il lui incombe de déterminer si la mesure incriminée était « proportionnée aux buts légitimes poursuivis » et si les motifs invoqués par les autorités nationales pour la justifier apparaissent « pertinents et suffisants » » 71. Intègre également fréquemment ce contrôle de proportionnalité, l’appréciation de la nature et de la lourdeur de la peine infligée par les pouvoirs publics lorsque l’ingérence se traduit par une condamnation pénale 72. Bien entendu, bien moins prolixe que la Cour EDH, la Cour de cassation ne livre pas le raisonnement mis en œuvre pour aboutir à sa solution du 20 octobre 2015. Mais dans la mesure où elle fait application du dispositif européen et qu’elle encourt la censure potentielle de la juridiction européenne, sa décision doit bel et bien respecter les critères de contrôle susmentionnés. La question est donc de savoir si la condamnation des appels au boycott des produits israéliens répond à un besoin social impérieux, si cette condamnation est proportionnée à la défense de l’ordre et à la protection des droits d’autrui, si les motifs de cette condamnation sont pertinents et suffisants, et si l’ampleur de la condamnation ne rend pas l’ingérence disproportionnée.

25 – Caractériser dans l’absolu ces critères n’est pas chose aisée, et partant, un utile point d’ancrage peut être trouvé dans l’arrêt Willem c. France, rendu par la Cour EDH le 16 juillet 2009 à propos d’un maire qui avait demandé à ses services municipaux de restauration de boycotter les produits israéliens 73, en particulier les jus d’orange. Sans prendre la peine d’établir le caractère nécessaire de l’ingérence dans la liberté d’expression du maire, c’est-à-dire d’expliquer en quoi elle répondait à un besoin social impérieux 74, les juges européens développent un argumentaire centré sur une idée simple (simpliste ?) 75 : « la Cour constate que le requérant n’a pas été condamné pour ses opinions politiques mais pour une incitation à un acte discriminatoire » ; « la justification du boycott exprimée tant lors de la réunion du 3 octobre 2002 que sur le site internet correspondait à une démarche discriminatoire et, de ce fait, condamnable ». En outre, toujours selon les juges, « l’amende infligée en l’espèce, d’une relative modicité, n’est pas disproportionnée au but poursuivi ». Et la Cour d’en conclure qu’« eu égard à la marge d’appréciation dont jouissent les autorités nationales en pareil cas, […] l’ingérence litigieuse était proportionnée aux buts légitimes poursuivis ». De toute évidence donc, les prises de positions publiques et autres manifestations d’opinions et d’idées critiques à l’égard de la politique d’un État relèvent de la liberté d’expression ; mais lorsqu’elles s’accompagnent d’un appel à commettre des discriminations, en l’occurrence sous la forme d’une incitation au boycott, la liberté d’expression s’estompe et l’ingérence des autorités publiques en devient légitime.

26 – La Cour de cassation n’a vraisemblablement fait que relayer, assez approximativement au demeurant 76, cette position du droit européen qui consacre une interprétation restrictive de la liberté d’expression. L’usage de ce qualificatif semble, en effet, devoir s’imposer dès lors que l’appel au boycott n’est jamais qu’une incitation à ce que le consommateur exerce sa liberté. En discriminant les produits de consommation sur la base de critères politiques, philosophiques ou encore religieux, en faisant prévaloir une opinion citoyenne dans l’acte de consommation, le consommateur ne fait que confronter le producteur au caractère démocratique de l’économie libérale, ne fait que le confronter à la liberté de conscience des citoyens. En incitant à ne pas consommer tels ou tels types de produits, les mouvements pro-boycott ne sont qu’un vecteur de sensibilisation à l’exercice par le consommateur de cette liberté. Dans cette mesure, on en viendrait même à se demander si la Cour de cassation et la Cour EDH ne se tromperaient pas de perspective : et si l’appel au boycott par les consommateurs était en réalité, si ce n’est « nécessaire dans une société démocratique », au moins intimement lié à la démocratie 77 ? Autant dire qu’il est difficile de percevoir quel « besoin social impérieux » rendrait « nécessaire » la condamnation des militants BDS. Et pourtant, de récentes et éloquentes déclarations du Premier ministre dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale livrent des motivations politiques à cette répression : « il y a trop souvent dans un certain nombre d’initiatives (…) la volonté, derrière 78, de confondre critique légitime de la politique de l’État d’Israël avec l’antisionisme et l’antisionisme qui bascule dans l’antisémitisme » 79. Ce qui revient à estimer que les juges, même ceux de la Cour EDH, se tromperaient sottement de qualification juridique en retenant une provocation à la discrimination là où il n’y aurait, « derrière », que provocation au racisme et à la haine… Outre qu’elle constitue une contestable, dangereuse et détestable mise en équation dénoncée par des lignes indémodables d’Edgar Morin 80, une telle façon d’appréhender les choses emporterait, d’un point de vue juridique, une présomption d’antisémitisme concomitante à la critique d’Israël, au-delà de la nature des propos effectivement tenus. C’est un euphémisme que de dire qu’une telle démarche intellectuelle serait assez gênante en droit pénal. Si tout un chacun, et en particulier le personnel politique, est libre de supputer que la critique d’Israël accule à l’antisémitisme, le juge quant à lui ne peut établir ipso facto un tel lien. Il doit se borner à statuer sur les faits incriminés, c’est-à-dire sur le contenu et la nature des propos incitant à ne pas consommer des produits d’origine israélienne, et s’abstenir à cette fin de toute divination. Tel est probablement un des enseignements majeurs à tirer du récent arrêt Perinçek c. Suisse rendu par la Cour EDH le 15 octobre 2015 81, qui énonce que la négation du caractère génocidaire des événements dont les Arméniens de Turquie ont été victimes durant la période 1915-1917 n’équivaut pas à des propos racistes, incitant à la haine, à la violence ou à l’intolérance, lesquels seuls pourraient fonder l’ingérence des autorités publiques dans la liberté d’expression.
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27 – Par ses deux décisions du 20 octobre 2015, la Cour de cassation livre une interprétation contestable de l’article 24 de la loi de 1881, et emprunte à la Cour EDH son approche restrictive de la liberté d’expression frappant les appels au boycott fondés sur la critique de la politique des États. Cette position ne peut qu’étonner si on la confronte aux grandes mobilisations citoyennes ayant emprunté la voie du boycott pour servir les justes causes de la lutte contre la ségrégation aux États-Unis, contre l’apartheid en Afrique du Sud ou encore contre le colonialisme en Inde. C’est un fait, l’Histoire a la plupart du temps donné raison à cette arme des pauvres, cette arme des sans pouvoir, qu’est le boycott d’initiative populaire 82. Une telle perspective historique conforte les propos du Rapporteur spécial des Nations-Unies sur la situation des droits de l’homme dans les territoires occupés, propos contrastant nettement avec les positions de la Cour de cassation et du gouvernement français actuel : « Le Rapporteur spécial demande à la société civile de mener dans le cadre national de vigoureuses campagnes de boycottage, de désinvestissement et de sanctions à l’encontre des entreprises mentionnées dans le présent rapport, jusqu’à ce qu’elles alignent leurs politiques et leurs pratiques sur les normes et le droit internationaux, ainsi que sur le Pacte mondial » 83. Cette stigmatisation des acteurs économiques en raison de leurs activités et de leurs relations d’affaires avec les territoires occupés découle de l’illégalité internationale de la politique de l’État israélien 84 ; espérons seulement que le Rapporteur spécial des Nations-Unis n’émette pas de position semblable sur le territoire français, car seule l’immunité diplomatique le préserverait de poursuites pénales ! Même en Israël, la constitutionnalité de la loi anti-boycott votée en 2011 par la Knesset avait créé un sérieux débat juridique avant qu’elle ne soit finalement validée par la Cour Suprême le 15 avril 2015 85 ; mais ce dispositif, dépourvu de sanction pénale, prévoit uniquement l’allocation de dommages-et-intérêts civils… A l’heure actuelle, la France s’expose en vérité à un sérieux risque d’isolement sur la scène européenne, sans ignorer toutefois le climat de pressions grandissantes venues d’outre-Atlantique pour que les États membres de l’Union Européenne s’engagent dans une voie similaire à celle sur laquelle la chambre criminelle de la Cour de cassation a décidé de louvoyer 86.

Jean-Christophe Duhamel (source)
 

Notes :

  1. Cass. crim., 20 oct. 2015, n°14-80.020 et n°14-80.021, rendus en des termes identiques ; Comm. com. électr., 2015, comm. 99, obs. A. Lepage ; JCP éd. G. 2015, 1356, note F. Dubuisson et G. Poissonnier ; Gaz. Pal. 9-10 déc. 2015, p. 7, note L. Sermet et G. Poissonnier ; D. 2016, 287, note J.-C. Duhamel et G. Poissonnier. 
  2. Cass. crim. 28 sept. 2004, n°03-87.450 ; Dr. pénal 2005, comm. 4, obs. M. Véron ; Cass. crim., 22 mai 2012, n°10-88.315, AJP 2012, p. 592, note F. Dubuisson et G. Poissonnier. ;Gaz. Pal. 28 juil. 2012, p. 22, obs S. Detraz ; D. 2013, 457, obs. E. Dreyer ; RSC 2012, 610, obs. J. Francillon ; Comm. com. électr. 2012, comm. 100, obs. A. Lepage ; JCP éd. G. 2012. 1318, n°4, obs. B. de Lamy. 
  3. Sur la distinction conceptuelle entre « boycott idéologique » et « boycott consumériste », v. Nyström (I.), Vendramin (P.), Le boycott, Les presses de Sciences Po., 2015, p. 13 et s. Ce type de boycott reçoit de nombreuses illustrations sur un plan historique, à l’image de celui ayant sévi à l’échelle internationale contre le régime d’apartheid d’Afrique du Sud, de celui mené en Inde contre le colonialisme britannique, ou encore plus récemment de celui frappant les produits français aux États-Unis consécutivement au refus d’intervention dans la seconde guerre du Golfe ; pour une histoire du boycott, v. Esteves (O.), Une histoire populaire du boycott, 2 tomes, L’Harmattan, 2006. 
  4. Sur le site de l’association BDS (bdsfrance.org), figurent les différents domaines du boycott qu’elle préconise. À titre d’illustration récente, le mouvement BDS a organisé une manifestation appelant, devant l’enceinte sportive, au boycott de la rencontre France – Israël à Montpellier dans le cadre de l’Eurobasket en septembre 2015.) 
  5. Le présent commentaire croise une autre actualité. L’Union Européenne a récemment pris une position nette en faveur de l’étiquetage spécifique des produits issus des colonies israéliennes, qui ne sont pas reconnues comme des territoires israéliens par le droit international ; v. notice interprétative de la Commission européenne du 11 novembre 2015 (C (2015) 7834 final) sur l’indication de l’origine des produits en provenance des territoires occupés par Israël depuis juin 1967 (texte consultable en version anglaise : http://www.eeas.europa.eu/delegations/israel/documents/news/20151111_in…). L’initiative communautaire a créé une vive polémique avec les autorités israéliennes ; v. not. « L’étiquetage par l’UE des produits fabriqués dans les colonies provoque la fureur d’Israël », Le Monde, 11 nov. 2015. 
  6. A l’exemple de la société française Orange ; sur ce cas, v. infra, note n°34. 
  7. Circulaire CRIM-AP n°09-900-A4, 12 fév. 2010, Procédures faisant suite à des appels au boycott des produits israéliens ; pour l’étude de cette circulaire et de la circulaire Mercier, v. notre article, « La tentative de pénalisation des appels au boycott des produits israéliens par les circulaires Alliot-Marie et Mercier », RDLF 2015, chron. n°05 (revuedlf.com). 
  8. TGI Mulhouse, 15 déc. 2011, n°3309/2011 et n°3310/2011 ; Gaz. Pal. 16 févr. 2012, p. 9, note G. Poissonnier ; D. 2012, 439, obs. G. Poissonnier. 
  9. CA Colmar, 27 nov. 2013, n°13/01122 et n°13/01129, rédigés en des termes identiques ; JCP éd. G., 2014, 83, note F. Dubuisson et G. Poissonnier. 
  10. Actuel alinéa 7 depuis que la loi n°2014-1353 du 13 novembre 2014 a abrogé les dispositions incriminant la provocation et l’apologie du terrorisme, alors objet de l’alinéa 6 de l’article 24 ; par commodité, seront conservées les références à l’alinéa 8. 
  11. Cass. crim., 12 avr. 1976, n°74-92.515 ; Bull. crim., n°112, p. 273 ; Cass. crim., 22 mai 1989, n°86-95.845. 
  12. Thierry (J.-B.), « Presse et communication – Provocation aux crimes et délits », J.-Cl. Lois pénales spéciales, Fasc. 60, spéc. n°27. 
  13. Loi n°2004-1486 du 30 déc. 2004 portant création de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité. 
  14. Clément (P.), Assemblée Nationale, archives de la 12ème législature, CR intégraux, session ordinaire 2004-2005, 2ème session, 7 déc. 2004 ; en l’occurrence, le débat public en cause était celui relatif à l’ouverture du mariage aux couples de même sexe. 
  15. Situation totalement admise par le rapporteur au Sénat de la loi du 30 déc. 2004, qui justifie cependant les vertus du renvoi exprès à l’art. 225-2 c. p. par l’effet désinhibiteur sur les prises de position publique en matière de mariage et d’adoption pour les couples de même sexe, libérées de la crainte d’un contentieux pour provocation à la discrimination ; v. Lecerf (J.-R.), Rapport Sénat n°121, 15 déc. 2004, p. 28. 
  16. Thierry (J.-B.), loc. cit. 
  17. « …cette question ne présente pas à l’évidence un caractère sérieux dès lors que les termes de l’article 24, alinéa 8, de la loi du 29 juil. 1881, qui laissent au juge le soin de qualifier des comportements que le législateur ne peut énumérer de façon exhaustive, sont suffisamment clairs et précis pour que l’interprétation de ce texte, qui entre dans l’office du juge pénal, puisse se faire sans risque d’arbitraire, et que, d’autre part, l’atteinte portée à la liberté d’expression par une telle incrimination apparaît nécessaire, adaptée et proportionnée à l’objectif de lutte contre le racisme et de protection de l’ordre public par le législateur », in Cass. crim., 16 avr. 2013, pourvoi n°13-90.008 ; Dr. pén. 2013, comm. 109, note M. Véron. 
  18. Avis de l’avocat général F. Cordier, spéc. p. 4. 
  19. V. par ex., de manière convaincante, Médard (R.), « Provocation à la discrimination et appel au boycott de produits étrangers : la Cour de cassation tranche le débat », La Revue des droits de l’homme, 8 déc. 2015, n°16 et s. (revdh.revues.org). 
  20. Loi n°77-574, 7 juin 1977 portant diverses dispositions d’ordre économique et financier ; JO 8 juin 1977, p. 3151. 
  21. Sur la question, et spécifiquement sur les motivations ayant présidé à l’adoption de la loi de 1977, v. Bismuth (J.-L.), Le boycottage dans les échanges internationaux au regard du droit. Remarques autour et sur la loi française du 7 juin 1977, Economica, 1980. 
  22. Beignier (B.) (et. al.) (co-dir.), Traité de droit de la presse et des médias, Litec, 2009, spéc. n°841, p. 515 : la provocation est réprimée car « elle créée un contexte idéologique, entretient une tension constituant un terrain favorable au passage à l’acte ». 
  23. Thierry (J.-B.), loc. cit.: « Ainsi, inciter des individus à refuser l’entrée de leur domicile aux personnes d’une nationalité déterminée est punissable au titre de la provocation à la discrimination, alors que la même provocation concernant des personnes handicapées ne l’est pas, car il ne s’agit pas d’un acte visé à l’article 225-2 du Code pénal ». 
  24. « La tâche des juges est très délicate : devant lutter contre les discriminations encouragées par un discours douteux et devant, aussi, protéger la liberté d’expression, y compris sur les sujets sensibles et polémiques », in Beignier (B.) (et. al.) (co-dir.), op. cit., n°844, p. 516. 
  25. « … les slogans et tracts en cause qui ne visaient pas les producteurs et fournisseurs israéliens [ne] manifestaient [pas] l’hostilité à l’égard de la population israélienne, les propos et tracts visés à la prévention appelant au boycott des produits israéliens, en expliquant qu’il s’agissait ainsi de dénoncer des actes qualifiés de criminels commis par le gouvernement israélien dans les territoires palestiniens, comme l’acte de prévention permet de s’en assurer, sans viser ni stigmatiser la population israélienne elle-même, ni même les producteurs et fournisseurs israéliens, ni appeler à une discrimination à leur égard, visant seulement le boycott des produits d’origine israélienne, lesdits propos et tracts polémiques s’inscrivant dans le cadre d’un sujet d’intérêt général et international majeur sur le sort fait au territoire et à la population palestinienne, qui ne dépassaient pas les limites admissibles de la liberté d’expression de la critique de la politique d’un gouvernement ou d’un État ». 
  26. Rapport du conseiller rapporteur J.-Y. Monfort, spéc. p. 8 ; adde, Dreyer (E.), obs. ss. Cass. crim, 22 mai 2012, précit. : « … on nourrit quelques doutes à l’égard de la qualification utilisée. Etaient en cause, non des personnes, mais des produits et la politique d’un Etat. Il ne s’agissait pas […] de susciter un sentiment d’hostilité ou de rejet envers un groupe de personnes clairement identifié à raison de ses origines, de sa race ou de sa religion. […] Il y a un pas entre le boycott d’un produit et celui de son producteur que la cour d’appel n’aurait pas dû franchir ». 
  27. Art. 111-4 c. p. ; à ce titre d’ailleurs, le pourvoi visait également l’article 7 CEDH reprenant le principe de légalité des délits et des peines : autant dire qu’était reproché à la cour d’appel d’avoir appliqué un texte pénal qui ne correspondait pas aux faits poursuivis. 
  28. Conformément à une position nette de la Cour de cassation, v. Cass. crim., 19 janv. 2010, n° 08-88.243 ; Dr. pén. 2010, comm. 48, note J.-H. Robert ; Gaz. Pal. 16 juin 2010, p. 167, note F. Fourment ; Cass. 1ère civ., 20 sept. 2012, n° 11-20.963 ; Comm. com. électr. 2012, comm. 136, obs. A. Lepage. 
  29. Cass. crim., 3 fév. 2009, n°08-85.220 ; Rev. Lamy dr. imma. 2009, n°47, p. 55, note L. Costes. 
  30. Rappelons à ce titre les slogans retenus à l’encontre des militants BDS dans la prévention : « Palestine vivra, boycott Israël », « Boycott des produits importés d’Israël, acheter les produits importés d’Israël, c’est légitimer les crimes à Gaza, c’est approuver la politique menée par le gouvernement israélien » et « Israël assassin, Carrefour complice ».
  31. Cass. crim., 1er mars 2011, n°10-83.267. 
  32. L’indication « Made in Israël » est le principal critère de boycott. Ce « label » est d’ailleurs lui-même controversé en Europe, eu égard à la confusion qu’il distille entre le territoire israélien et les territoires occupés par Israël. À l’occasion d’un renvoi préjudiciel, la CJUE devait ainsi refuser le bénéfice d’exemption douanière sollicité par une société israélienne pour ses exportations en Allemagne de produits manufacturés dans les territoires occupés, au motif que « l’accord d’association CE-Israël doit être interprété en ce sens que les produits originaires de Cisjordanie ne relèvent pas du champ d’application territorial de cet accord et ne sauraient donc bénéficier du régime préférentiel instauré par celui-ci » (v. CJUE, 25 fév. 2010, C-386/08, Firma Brita GmbH /Hauptzollamt Hamburg-Hafen, § 53). Dans un rapport paru en 2012, la Banque mondiale fait état du montant avancé par le gouvernement israélien de 300 millions de dollars annuels d’importations européennes (manufacturières et agricoles) en provenance des implantations israéliennes en Cisjordanie, tandis que d’autres sources avancent un chiffre de 5,4 milliards de dollars pour 2008, ce montant incluant les biens partiellement produits dans ces colonies ou composés d’éléments en étant issus ; v. The World Bank, « Fiscal Crisis, Economic Prospects. The Imperative for Economic Cohesion in the Palestinian Territories », Economic Monitoring Report to the Ad Hoc Liaison Committee, September 23, 2012, §26, p. 13. Sur la récente position de l’Union Européenne en faveur de l’étiquetage spécifique des produits issus des territoires occupés, v. supra, note n°5. 
  33. A titre d’exemple, peuvent être citées Hyundai, Caterpillar, Veolia, Alstom, Volvo, Motorola, G4S, Hewlett Packard ; pour un aperçu, v. http://bdsmovement.net/activecamps/consumer-boycott
  34. Des actions ont été menées par la campagne BDS depuis 2011 devant des points de vente de la société Orange, stigmatisée pour ses relations commerciales dans les territoires occupés avec la société israélienne Partner Communications. La publication en mai 2015 d’un rapport par un collectif d’ONG et de syndicats (FIDH, CGT, Solidaires, CCFD, LDH, AFPS, Al-Haq) dénonçant les « liaisons dangereuses d’Orange dans le territoire palestinien occupé » (disponible à l’adresse https://www.fidh.org/IMG/pdf/rapport_orange-web.pdf) devait accroître la pression sur ses dirigeants, et amener son PDG à envisager la résiliation de l’accord de licence de marque conclu avec la société israélienne. Cette annonce suscita de fortes controverses à l’été 2015 ; v. « Orange clôt la polémique avec Israël », Challenges, 30 juin 2015. Finalement, l’initiative de rupture de l’accord commercial fut prise par la société israélienne Partner Communications en janvier 2016 ; v. « Partner Comms résiliera son accord de licence avec Orange », Reuters France, 5 janvier 2016. 
  35. Dans le même sens, v. Médard (R.), op. cit., n°32. 
  36. « On ne saurait, artificiellement, comme le fait le demandeur, dissocier totalement les produits de ceux qui les produisent, fabriquent ou fournissent. Le boycott qui est prôné invite nécessairement à faire une distinction entre les producteurs et fournisseurs israéliens, à raison de leur nationalité et les autres. Cette distinction est fondée sur la nationalité et le fait même de provoquer à faire cette différence est précisément ce qui est prohibé par la loi », in Avis précit., spéc. p. 6. 
  37. Décision du Défenseur des droits MLD-2013-116, 25 oct. 2013, spéc. n°23 : « – il n’est pas contestable que l’invitation au boycott des produits litigieux était dirigée contre des producteurs israéliens à raison de leur seule appartenance à ladite nation » (souligné et mis en gras dans le texte original). 
  38. Et que dire des responsables politiques appelant au boycott de l’Année du Mexique en soutien à Florence Cassez ? V. « Florence Cassez – Martine Aubry appelle aussi à boycotter l’Année du Mexique en France », Le Point, 11 févr. 2011. 
  39. « Les produits français, victimes collatérales des JO ? », Le Figaro, 11 avr. 2008 ; « Menacé de boycott, Carrefour donne des gages à Pékin », L’Express L’Expansion, 16 avr. 2008.
  40. Il ne semble pas nécessaire de s’attarder sur cette question précise pour les besoins du présent commentaire. Rappelons tout de même que selon la Cour EDH (Salov c. Ukraine, Requête n°65518/01, 6 sept. 2005) : « l’une des exigences dérivant de l’expression « prévue par la loi » est la prévisibilité de la mesure concernée. On ne peut considérer comme une « loi » qu’une norme énoncée avec assez de précision pour permettre au citoyen de régler sa conduite : en s’entourant au besoin de conseils éclairés, il doit être à même de prévoir à un degré raisonnable dans les circonstances de la cause les conséquences qui peuvent découler d’un acte déterminé. […] Le degré de précision requis dépend dans une large mesure du contenu du texte en cause, du domaine qu’il couvre, ainsi que du nombre et de la qualité de ses destinataires ». Eu égard aux analyses développées dans la première partie de la présente étude, la prévisibilité de l’incrimination et de la sanction de l’appel au boycott par le mouvement BDS demeure sujette à caution, ce dont attestent plusieurs décisions de relaxe qui ont pu être prises par des juridictions du fond ; sur ces décisions, v. les références citées et les analyses dans notre article : « La tentative de pénalisation des appels au boycott des produits israéliens par les circulaires Alliot-Marie et Mercier », précit.
  41. A savoir, pour reprendre les formulations précises du texte : « la sécurité nationale », « l’intégrité territoriale ou la sûreté publique », « la défense de l’ordre et la prévention du crime », « la protection de la santé ou de la morale », « la protection de la réputation ou des droits d’autrui », l’objectif d’« empêcher la divulgation d’informations confidentielles ou de garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire ». 
  42. V. par ex. Cour EDH, Engel et autres c. Pays-Bas, Requêtes n°5100/71, 5101/71, 5102/71, 5354/72, 5370/72, 8 juin 1976, spéc. n°98. 
  43. Association Henri Capitant, Vocabulaire Juridique
  44. Cour EDH, Perinçek c. Suisse, Requête n°27510/08, 15 oct. 2015 ; Dr. pénal 2015, comm. 139, obs. F. Safi ; JCP éd. G. 2015, 1179, obs. G. Gonzalez ; D. 2015, 2183, obs. G. Poissonnier. 
  45. « – prevention of disorder ». 
  46. Cour EDH, op. cit., n°146. 
  47. Id., n°151 : « la Cour estime que, puisque les mots employés dans le texte anglais apparaissent à même de s’entendre seulement en un sens étroit, la meilleure manière de concilier les expressions « défense de l’ordre » et « prevention of disorder » dans les textes français et anglais de l’article 10 § 2 consiste à les interpréter dans leur sens le moins large » ; contra, Engel et autres c. Pays-Basloc. cit
  48. Cour EDH, Perinçek c. Suisseop. cit., n°153. 
  49. Id., n°154. 
  50. La situation serait différente si par exemple, l’appel au boycott, anticipé par ses détracteurs, donnait lieu à une contre-manifestation et aboutissait à un risque d’affrontement sur la voie publique. 
  51. V. notre article, « La tentative de pénalisation… », précit. : « Le consommateur se trouve en bout de chaîne du processus économique ; doit-on seulement rappeler ce qui relève de l’évidence, à savoir que l’activité économique normale du producteur se borne à fabriquer et proposer à la vente ses produits ? En exerçant sa liberté, le consommateur n’entrave aucunement l’exercice normal de l’activité économique du producteur concerné, c’est-à-dire sa pleine et totale capacité et liberté de produire et proposer ses produits à la vente. À l’inverse, un producteur ou exportateur verrait bien son activité économique entravée si, par exemple, un distributeur décidait de ne pas référencer ses produits eu égard à leur nationalité d’origine ou si un groupe militant empêchait le débarquement de marchandises israéliennes dans un port ou dans un lieu de vente ou de stockage : c’est alors l’accès au marché qui lui serait interdit, et donc son activité économique qui s’en verrait entravée ». 
  52. Avis précit., loc. cit. : « L’action telle qu’elle était conçue avait pour but d’entraver l’activité économique normale de producteurs à raison de leur nationalité, la réduction de la consommation par les clients, la baisse des achats ne pouvant que pousser le magasin à ne pas contracter avec ces producteurs et à rendre l’activité économique normale de ceux-ci plus difficile ». 
  53. Greer (S.), Les exceptions aux articles 8 à 11 de la Convention européenne des Droits de l’Homme, éd. du Conseil de l’Europe, 1997, not. p. 30 et s. 
  54. Cour EDH, Ekin c. France, Requête n°39288/98, 17 juil. 2001, n°48. 
  55. Cour EDH, Szél et autres c. Hongrie, Requête n°44357/13, 16 sept. 2014, n°49. 
  56. Cour EDH, Leroy c. France, Requête n°36109/03, 2 oct. 2008, n°36. 
  57. Cour EDH, Piermont c. France, Requête n°15773/89 et 15774/89, 27 avr. 1995, n°72. 
  58. V. par ex. Cour EDH, Nikula c. Finlande, Requête n°31611/96, 21 mars 2002, n°38 ; Giniewski c. France, Requête n°64016/00, 31 jan. 2006, n°40 ; Stângu et Scutelnicu c. Roumanie, Requête n°53899/00, 31 jan. 2006, n°44 ; Vereinigung Bildender Künstler c. Autriche, Requête n°68354/01, 25 jan. 2007, n°29 ; Alves Da Silva c. Portugal, Requête n°41665/07, 29 oct. 2009, n°26 ; Fatih Tas c. Turquie, Requête n°36635/08, 5 avr. 2011, n°33 ; Couderc et Hachette Filipacchi Associés c. France, Requête n°40454/07, 10 nov. 2015, n°79 ; Paturel c. France, Requête n°54968/00, 22 déc. 2005, n°26. 
  59. … dans un contexte de refus de diffusion d’une publicité audiovisuelle stigmatisant l’élevage en batterie : Cour EDH, VgT Verein Gegen Tierfabriken c. Suisse, Requête n°24699/94, 28 juin 2001, n°60 et s. 
  60. … dans un contexte d’incompatibilité avec des activités politiques visant les fonctionnaires des collectivités locales : Cour EDH, Ahmed et autres c. Royaume-Uni, Requête n°65/1997/849/1056, 2 sept. 1998, n°54. 
  61. … dans un contexte d’interdiction d’une publicité diffusée par un avocat : Cour EDH, Casado Coca c. Espagne, Requête n°15450/89, 24 fév. 1994, n°46. 
  62. … dans un contexte de sanction d’une chaîne de télévision du fait d’un reportage critiquant l’attitude de la Suisse durant la seconde guerre mondiale : Cour EDH, Monnat c. Suisse, Requête n°73604/01, 21 sept. 2006, n°41. 
  63. … dans un contexte de rejet d’une candidature d’un enseignant qui témoignait de positions contraires à la doctrine catholique : Cour EDH, Lombardi Vallauri c. Italie, Requête n°39128/05, 20 oct. 2009, n°41. 
  64. Cour EDH, Kutlular c. Turquie, Requête n°73715/01, 29 avr. 2008, n°41 ; Vajnai c. Hongrie, Requête n°33629/06, 8 oct. 2008, n°34 ; Féret c. Belgique, Requête n°15615/07, 16 juil. 2009, n°59 ; Castells c. Espagne, Requête n°11798/85, 23 avr. 1992, n°39 ; Erbakan c. Turquie, Requête n°59405/00, 6 juil. 2006, n°46 ; Soulas et autres c. France, Requête n°15948/03, 10 juil. 2008, n°30. 
  65. Caractéristiques à cet égard, quelques décisions escamotent la question du but légitime, considérant expressément que le contrôle essentiel et suffisant consiste à apprécier le caractère nécessaire dans une société démocratique de l’ingérence ; v. Cour EDH, Parti Populaire Démocrate – Chrétien c. Moldova, Requête n°28793/02, 14 fév. 2006, n°54 ;Verein Gegen Tierfabriken Schweiz (VGT) c. Suisse, Requête n°32772/02, 4 oct. 2007, n°60 ; Sükran Aydin et autres c. Turquie, Requêtes n°49197/06, 23196/07, 50242/08, 60912/08 et 14871/09, 22 jan. 2013, n°47. 
  66. … parfois en contemplation téléologique du texte national ayant servi de fondement à l’ingérence. Parmi les nombreuses références, v. not. s’agissant des buts légitimes de « défense de l’ordre » et/ou de « protection des droits d’autrui » : Cour EDH, Piermont c. France, Requêtes n°15773/89, 15774/89, 27 avr. 1995, n°72 ; Ekin c. France, Requête n°39288/98, 17 juil. 2001, n°48 ; Cuc Pascu c. Roumanie, Requête n°36157/02, 16 sept. 2008, n°25 ; De Diego Nafria c. Espagne, Requête n°46833/99, 14 mars 2002, n°31 ;Vördur Ólafsson c. Islande, Requête n°20161/06, 27 avr. 2010, n°73 ; Hertel c. Suisse, Requête n°59/1997/843/1049, 25 août 1998, n°42 ; Vogt c. Allemagne, Requête n°17851/91, 26 sept. 1995, n°51 ; Du Roy et Malaurie c. France, Requête n°34000/96, 3 oct. 2000, n°25 ; Nikula c. Finlande, Requête n°31611/96, 21 mars 2002, n°38 ;Schweizerische Radio- und Fernsehgesellschaft SRG c. Suisse, Requête n°34124/06, 21 juin 2012, n°49. 
  67. Cour EDH, Karsai c. Hongrie, Requête n°5380/07,1er déc. 2009, n°20 et s. 
  68. Cour EDH, Erdogan Gökçe c. Turquie, Requête n°31736/04, 14 oct. 2014, n°29 ; Dink c. Turquie, Requêtes n°2668/07, 6102/08, 30079/08, 7072/09 et 7124/09, 14 sept. 2010, n°118. 
  69. En témoignent les décisions précitées, auxquelles il peut être renvoyé. 
  70. Cour EDH, Handyside c. Royaume-Uni, Requête n°5493/72, 7 déc. 1976, n°48 ; Sunday Times c. Royaume-Uni, Requête n°6538/74, 26 avr. 1979, n°59. 
  71. Parmi de nombreuses décisions, v. Cour EDH, Balsyte-Lideikiene c. Lituanie, Requête n°72596/01, 4 nov. 2008, n°77 ; Ibrahim Aksoy c. Turquie, Requêtes n°28635/95, 30171/96, 34535/97, 10 oct. 2000, n°57 ; v. déjà Lingens c. Autriche, Requête n°9815/82, 8 juil. 1986, n°40 ; Barthold c. Allemagne, Requête n°8734/79, 25 mars 1985, n°55. 
  72. V. par ex. Cour EDH, Camlibel c. Turquie, Requête n°64609/01, 22 déc. 2005, n°24. 
  73. Cour EDH, Willem c. France, Requête n°10883/05, 16 juil. 2009 ; Journ. dr. int. 2010, p. 1022, note J. Fernandez. 
  74. Ce qui valut à la Cour EDH une critique acérée : « – l’arrêt rendu n’apparaît pas en parfaite adéquation avec l’exercice d’une magistrature judiciaire suprême. La Cour pèche par manque de discernement, de motivation, en un mot, de rigueur juridique. Ainsi l’incise signalant que l’appel au boycott de produits étrangers relève en droit français de la seule compétence du gouvernement et non des autorités municipales (par ailleurs agrémentée d’un propos moralisateur sur le rôle du maire) manque totalement de pertinence. Mais surtout, la Cour, d’une part, avalise une application extensive de la loi pénale (l’appel à la discrimination économique n’est pas visé par la loi du 29 juill. 1881) et, d’autre part, se dispense de motiver le brevet de conventionnalité accordé au caractère « nécessaire » de la condamnation prononcée […]. Plus prosaïquement, est éminemment attristante l’atteinte portée par la Cour à l’exercice de la liberté d’expression. Est-il désormais, plus généralement interdit à toute personne résidant en France (ou dans un pays européen disposant d’une législation comparable) de lancer un appel au boycott contre les produits en provenance de pays méconnaissant les libertés (Libye, Iran, Ouzbékistan, Chine, Zimbabwe…) ? », in Flauss (J.-F.), « L’appel au boycott économique », AJDA 2009, spéc. p. 1944. Adde, Dubuisson (F.), « La répression de l’appel au boycott des produits israéliens est-elle conforme au droit à la liberté d’expression ? », RBDI 2012, p. 177 et s., spéc. p. 190 et s.: « La motivation de la décision de la Chambre dans l’affaire Willem est en toute hypothèse particulièrement indigente, ce qui jette un sérieux doute sur la capacité de cet arrêt à faire jurisprudence. […] – de manière assez surprenante, la Chambre s’abstient de procéder à tout examen sur la « nécessité » de l’ingérence dans la liberté d’expression de M. Willem ». 
  75. Cour EDH, op. cit., n°35 et s. 
  76. En effet, la qualité de maire du requérant semble avoir été dans l’affaire Willem un élément important du raisonnement de la Cour (v. not. n°37 de l’arrêt précité) : ses propos appelant au boycott des produits israéliens tenus au conseil municipal ont engagé la collectivité territoriale dans son ensemble mais également les services municipaux sur lesquels il avait autorité, services qui gèrent des fonds publics utilisés pour les achats de la commune. La situation d’un militant associatif, qui exprime une opinion politique dans un espace public, ne détient aucune autorité politique ou administrative et n’a aucun pouvoir sur les vendeurs et les consommateurs présents, est sensiblement différente. 
  77. En ce sens, v. Médard (R.), op. cit., n°51 ; adde, v. l’opinion dissidente du juge Jungwiert dans l’arrêt Contrairement Willem c. France précité : « J’ai la ferme conviction qu’une société démocratique doit tolérer voire parfois même susciter un tel débat ou une incitation à l’action. aux juridictions françaises, et contrairement à l’avis de la majorité, j’estime que les déclarations du requérant incriminées dans la présente affaire reflètent, compte tenu des circonstances de l’espèce et de la tonalité générale de ses propos, l’expression d’une opinion ou d’une position politique d’un élu sur une question d’actualité internationale ». 
  78. Souligné par nos soins. 
  79. Discours du mercredi 16 décembre 2015 ; v. not. « Valls condamne les campagnes de boycott des produits israéliens », Les Echos, 16 déc. 2015. Propos confirmés devant « les Amis du CRIF » : « Valls envisage des mesures contre les manifestations en faveur du boycott de produits israéliens », Le Monde, 19 janv. 2016. Morin (E.), « Antisémitisme, antijudaïsme, anti-israélisme », Le Monde, 19 fév. 2004. 
  80. Morin (E.), « Antisémitisme, antijudaïsme, anti-israélisme », Le Monde, 19 fév. 2004. 
  81. V. supra, note n°44. Adde, Hochmann (T.), « Négationnisme du génocide arménien : défauts et qualités de l’arrêt Perinçek c. Suisse », RDLF 2015, chron. n°27 (revuedlf.com).
  82. Pour une histoire du boycott, V. Esteves (O.), ouvrages précit. 
  83. Falk (R.), Rapport du Rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, 19 sept. 2012, spéc. § 99, p. 27. Les parlementaires français n’étaient pas non plus en reste voici encore quelques années pour exprimer leur soutien à l’égard du boycott mené par les consommateurs en raison de l’illégalité internationale des activités des entreprises : « – l’appel au boycott comme arme ultime d’une consommation responsable, doit être considérée comme licite dès lors qu’il est établi par des rapports crédibles d’organisations internationales et d’ONG dignes de foi qu’une multinationale viole délibérément et gravement la légalité internationale », in Assemblée Nationale, Rapport d’information sur le rôle des compagnies pétrolières dans la politique internationale et son impact social et environnemental, n°1859, 1999, p. 134 (http://www.assemblee-nationale.fr/legislatures/11/pdf/rap-info/i1859-01…). 
  84. Illégalité qui s’aggrave avec l’extension des colonies dans les territoires occupés, situation dont le secrétaire général des Nations-Unies s’est ému récemment au grand dam de l’Etat israélien, v. « Israël accuse Ban Ki-moon d’encourager le terrorisme », Le Monde, 26 janv. 2016 ; sur le caractère économique et lucratif des implantations israéliennes de Cisjordanie, v. le rapport très complet publié en janvier 2016 par l’organisation non gouvernementale Human Rights Watch, Occupation, Inc. How Settlement Businesses Contribute to Israel’s Violations of Palestinian Rights (disponible à l’adresse www.hrw.org/report/2016/01/19/occupation-inc/how-settlement-businesses-…). 
  85. V. « High Court largely upholds controversial anti-boycott law », Haaretz, 16 avr. 2015. 
  86. A l’été 2015, le Président Obama devait signer un amendement à la loi américaine autorisant les négociations avec les représentants de l’Union Européenne sur le traité de libre-échange transatlantique (Trade Promotion Authority (TPA) law). Cet amendement pose le rejet officiel du boycott des produits israéliens comme condition d’adhésion et de mise en œuvre du traité. Les propos du député républicain Peter Roskam, promoteur de l’amendement et opposant farouche au mouvement BDS, traduisent bien l’esprit de cette initiative américaine : « Cela va forcer les entreprises comme le géant des télécommunications Orange, qui est partiellement détenu par le gouvernement français, à réfléchir à deux fois avant d’engager une guerre économique contre Israël. Ces entreprises ne seront plus en mesure d’attaquer librement un allié clé des États-Unis sans conséquence » ; v. not. « Roskam Anti-BDS Provisions Signed Into Law », 29 juin 2015 (www.roskam.house.gov/media-center/press-releases/roskam-anti-bds-provis…) ; « Obama signe le projet de loi anti-BDS », The Times of Israel, 30 juin 2015. On peut voir dans cette attitude des autorités américaines une rupture avec l’approche bien plus libérale qu’avait endossée la Cour Suprême des Etats-Unis vis-à-vis du boycott, dans sa décision National Association for the Advancement of Colored People v. Claiborne Hardware Co. (No. 81-202) [458 U.S. 886] du 2 juillet 1982 ; v. www.law.cornell.edu/supremecourt/text/458/886

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